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Compte rendu de la réunion de l'équipe des Fasti du 17 janvier 2003

 

Informations générales

Le volume des Fasti sur Rodez (par Matthieu Desachy) est paru. Pour l'obtenir au tarif préférentiel réservé aux membres du groupe, merci de faire parvenir à Hélène Millet un chèque de 25 € libellé à son nom. Le volume sur Mende paraîtra d'ici la prochaine réunion. Sées et Angers sont les suivants sur la liste.

Soutenances : Véronique Julerot (Les élections épiscopales à la fin du XVe siècle) et Emmanuelle Vernin (Le quartier canonial du Puy), membres du groupe des Fasti, viennent de soutenir leur thèse de doctorat.

Le CD-Rom Ut per litteras apostolicas (analyses des bulles du XIVe siècle) est consultable en trois lieux par les membres des Fasti : à l'IRHT à Paris et Orléans, et en Sorbonne, salle G 687 (contacter Hélène Millet ou Christine Barralis pour y avoir accès).

N.B. : l'IRHT met aussi à disposition (à Orléans seulement), les reproductions sous forme de CD-Rom des registres pontificaux de la série du Vatican. Pour l'instant l'IRHT possède tous les registres jusqu'à Urbain V exclu. Les registres du pontificat d'Urbain V et de la période du Grand Schisme devraient être achetés cette année.

Grâce à une subvention du LAMOP (Laboratoire de médiévistique occidentale de Paris-I), la refonte des traitements informatiques appliqués à nos bases de données (pour en faire soit des livres soit un élément d’une base cumulée) est en cours, sous la direction d’un informaticien de chez Brepols. Le logiciel–clé n’en sera plus Dbase mais Access. De nouvelles informations seront données à ce sujet lors de la prochaine réunion.

L'informatisation du fichier Lesellier progresse : une base Access a été créée dans le cadre d'un contrat alliant le GDR SALVÉ, l'IRHT et l'EFR. Laurent Vallière a déjà saisi presque 4 000 fiches. Il est possible pour les membres du groupe de solliciter une bourse de l'EFR pour aller à Rome participer à ce projet (le temps de bourse se répartissant entre l'informatisation 3h / jour et les recherches personnelles).

Dans la dernière livraison de la Revue Mabillon, deux articles peuvent intéresser les membres des Fasti : celui de F. Délivré, « La visite du primat d’Aquitaine Simon de Beaulieu, archevêque de Bourges, dans la province ecclésiastique de Bordeaux (1284) » et celui de X. Hermand, « Les relations de l’abbaye cistercienne du Jardinet avec des clercs réformateurs des diocèses de Cambrai et de Tournai (seconde moitié du XVe s.) ».

Un nouveau venu parmi les Fasti, Yann Dahhaoui, prépare un DEA sous la direction de Claude Gauvard sur les figures de l'évêque des Innocents et de l'évêque des Fous (qui sont élus pour une journée par les enfants de chœur, lors de cérémonies satiriques). Si vous avez mention de tels personnages dans vos sources, merci de le contacter (10 rue Barbette, 75003 Paris ; mail: yann.dahhaoui@wanadoo.fr).

La prochaine réunion est fixée au Vendredi 27 juin 2003.

Communications sur les chapitres O.S.A.

La règle de saint Augustin en usage dans le chapitre de Mende, par Philippe Maurice, avec des précisions de Jean-Loup Lemaitre

Le chapitre de Mende a décidé l'abandon de la règle O.S.A. au tout début du XIIIe siècle. Les AD de Lozère conservent un manuscrit intitulé Martyrologium, du XIIe siècle, qui contient entre autres la règle suivie par le chapitre. La règle est souvent conservée dans le martyrologe du chapitre (c'est le cas à Béziers, Carcassonne, etc.). Pour avoir des descriptions précises de ces ouvrages, il faut se reporter au répertoire des obituaires établi par J.-L. Lemaitre. A Mende, ce ms. était le symbole de la charge de l'archidiacre et servait à recevoir les serments d'entrée en charge des clercs de la cathédrale.

D'après J.-L. Lemaitre, la règle appliquée est la même partout, les variantes entre manuscrits de chapitres différents ne portant que sur la forme et non sur le fond. On peut se reporter à l'édition critique du Præceptum faite par Luc Verheijen (La règle de saint Augustin, Paris, Etudes augustiniennes, 1967). Il serait intéressant de faire un répertoire des livres liturgiques de chaque cathédrale, en identifiant les livres réellement utilisés par le chapitre. Mgr Martimort a déjà fait un tel travail pour le midi, dans le n° 17 des Cahiers de Fanjeaux sur Liturgie et musique (« Répertoire des livres liturgiques du Languedoc antérieurs au concile de Trente », p. 52-80). Il faudrait ensuite étudier les ajouts et aménagements apportés par nos chanoines à ces textes (par ex. pour celui de Mende : y a-t-il des ajouts au martyrologe d'Usuard ? Des homélies spécifiques à Mende ?).

Les statuts réformateurs de l'évêque Jean de Vissec pour le chapitre de Maguelone (1331), par Jean-Loup Lemaitre

Maguelone est un chapitre régulier jusqu'au début du XVIe siècle. Sur ce chapitre, on peut consulter Germain (A.), Maguelone sous ses évêques et ses chanoines, Montpellier, 1869 ; et le Cartulaire de Maguelone, éd. J. Rouquette et A. Villemagne, Montpellier (la B.N.F. et la Sorbonne n'ont que des exemplaires incomplets. Seul l'évêché de Maguelone a une version complète).

Jean de Vissec, originaire du diocèse de Nîmes, est chanoine puis prévôt du chapitre avant d'être élu évêque en 1328. Son premier acte en tant que prélat est de nommer des vicaires généraux, qui sont tous d'anciens chanoines, et de procéder à toute une série de nominations au sein du chapitre. Lors du chapitre général de la Toussaint 1331, il promulgue des « declarationes, ordinationes et statuta » qui traitent en détail de l'ensemble des offices tenus par les chanoines (mais pas des dignités) : prévôt, cuisinier, vestiaire, etc. Ce texte très long règle la gestion quotidienne de la vie et des biens du chapitre. Il est en fait plus proche d'un coutumier monastique que d'une collection de statuts synodaux (il faut souligner qu'au XIIe siècle, la collection du Liber ordinis de Saint-Victor de Paris a beaucoup circulé en France, mais ce document n'en est pas directement inspiré). La raison d'être de ces statuts est difficile à cerner, faute d'une étude approfondie de la situation du chapitre au début du XIVe siècle (pour une fois c'est l'abondance, et non la pénurie, d'archives sur cette période qui a freiné la réalisation d'une telle étude). La question de leur application réelle se pose aussi. Le texte a été manifestement pensé en langue d'oc, avant d'être écrit en latin : la structure des phrases s'en ressent, et beaucoup de mots de langue d'oc ont été conservés ou sommairement latinisés.

Le préambule du texte contient la liste de tous les chanoines, au nombre de 63. Il faut souligner que dans les chapitres OSA, il n'y a pas de prébendes, puisque les chanoines vivent en communauté. Par conséquent il n'y a pas forcément un nombre fixe de chanoines (bien que ce soit le cas à Auch), d'autant plus que se pose le problème du décompte des novices appelés à devenir chanoines : non seulement ils doivent faire un certain temps de noviciat, mais en plus, une fois qu'ils ont pris l'habit, il s'écoule un certain délai avant qu'ils n'aient voix au chapitre. La liste des chanoines fait apparaître qu'environ la moitié d'entre eux sont en charge d'un « prieuré ». Deux problèmes se posent à ce sujet : résident-ils dans les « prieurés » ? A Mende, la plupart des chanoines titulaires de prieurés s'y font remplacer par des vicaires. Et que sont ces « prieurés » ? Dans le diocèse de Maguelone, le mot parrochia n'existe pas, on emploie seulement celui de prioratus. Par conséquent, il s'agit sans doute ici de cures à desservir. Ces prieurés-cures, qui sont à la collation ordinaire du chapitre, entrent au XIVe siècle dans le champ de la collation apostolique : il faut prêter une attention particulière au terme employé par les lettres apostoliques pour les désigner. Soulignons enfin que les trois archidiacres n'appartiennent pas au chapitre.

Notice institutionnelle du chapitre d'Auch, par Françoise Merlet-Bagnéris

Il s'agit d'un très gros diocèse (environ 500 cures d'âmes, réparties en 14 archidiaconés) et le siège archiépiscopal est très riche au XVe siècle. Entre 1410 et 1414, le diocèse fut temporairement démembré par la création de l'éphémère évêché de Mirande. Les collégiales sont nombreuses. Un premier groupe d'entre elles, les plus importantes, ont été instituées dans l'élan du mouvement canonial de la fin du XIe siècle, en liaison avec le développement du pèlerinage de Saint-Jacques. Cinq de ces collégiales sont étroitement liées au chapitre cathédral. Les membres des huit autres sont nommés en partie par le chapitre, en partie par l'archevêque et en partie par les consuls de la ville. Beaucoup sont sécularisées vers 1548, au moment où le chapitre cathédral négocie sa propre sécularisation.

Le soin des pauvres est particulièrement développé puisque la cérémonie du Mandat, inaugurée en 1175, se transforme ensuite en une distribution quotidienne de nourriture (à Maguelone, par ex., la distribution est hebdomadaire). Bien qu'il s'agisse d'un chapitre OSA, les chanoines vivent à la fin du MA dans des maisons individuelles, dans et hors le cloître. Le dortoir n'est plus occupé que par certains des prébendés des communautés de la cathédrale, qui y dorment dans des chambres individuelles, avant d'être désaffecté en 1444 et de servir d'asile de nuit pour les pauvres. La majeure partie des bâtiments actuels est postérieure au MA : le palais archiépiscopal date du XVIIIe siècle, et la cathédrale, commencée au XVe siècle, date essentiellement du XVIe siècle. Le chapitre suit officiellement la règle OSA jusqu'à sa sécularisation en 1548, mais dès le XIIe siècle au moins, il a des coutumes particulières, connues sous le nom de statuta antiqua. Normalement, il n'y a pas d'autre rang que celui de l'ancienneté d'entrée, comme dans toutes les églises soumises à la règle de saint Augustin, mais cela reste à vérifier dans la pratique. Les chanoines, initialement au nombre de 25, sont ramenés à 20 par une ordonnance épiscopale de 1331. A côté du haut-chœur des chanoines, apparaissent 34 prébendés, répartis en plusieurs communautés avec leurs règles propres.

Le volume sur Sées : une suite de problèmes à résoudre, par Pierre Desportes

Pourquoi, malgré le gros travail fourni par Françoise Loddé (†), a-t-on obtenu si peu de résultats pour Sées ? Quelles ont été les solutions adoptées pour compenser cette pénurie d'informations ?

a) Le problème de la chronologie : Sées est devenu un chapitre régulier en 1131 et a été sécularisé en 1547. Entre ces deux dates, nous connaissons très peu de noms de chanoines. Un universitaire américain, D. Spear, prépare un ouvrage sur les dignitaires de la province de Rouen avant 1200 = il existe une petite période de chevauchement, avec, souvent, une marge d’incertitude. Le volume des Fasti intégrera une liste complémentaire des chanoines pour la période 1500-1547.

b) Le patrimoine du chapitre : il est beaucoup mieux connu que les hommes. Etant donné le lien très fort existant entre l'état des revenus et la vie du chapitre, il a été décidé de remettre dans le volume des Fasti l'article publié précédemment par F. Loddé sur le temporel.

c) L'identification des individus : au total on aura environ 180 noms (+ une quarantaine pour le début du XVIe siècle et une vingtaine d'incertains à cheval sur les XIIe et XIIIe siècles). On ne connaît bien que les dignitaires, surtout les archidiacres, et les chanoines remarqués pour leur irrégularité. Cela pose le problème de la représentativité du fichier prosopographique.

d) La régularité de la vie : pourquoi le chapitre ne s'est-il pas sécularisé, malgré les pressions des rois anglo-normands au XIIe siècle, et les difficultés des siècles précédents (notamment la guerre, qui gêne la vie régulière) ? Probablement parce que les chanoines voulaient éviter la concurrence de candidats étrangers, et parce que le patrimoine n'était pas suffisant pour être découpé en prébendes « viables ». La règle n'est pourtant pas appliquée strictement : en 1520, une tentative de restauration de celle-ci, par l'arrivée de 8 nouveaux chanoines réformés, aboutit à un échec.

Notice Institutionnelle de Sens, par Vincent Tabbagh

Diocèse partagé en 5 archidiaconés et 12 doyennés, comprenant au total 715 paroisses séculières, sans compter les prieurés-cures. Sur les 19 collégiales, 3 sont d'origine immémoriale, 2 datent du XIe siècle, 11 de la fin du XIIe et du début du XIIIe siècle, et une du XIVe siècle. La cathédrale actuelle, dont la reconstruction commence au XIIe siècle, conserve la trace des deux églises disparues du groupe primitif, sous la forme de deux chapelles. Le développement des chapelles a par ailleurs été très modeste dans ce bâtiment. L'autorité de l'archevêque sur le diocèse est très étendue : il nomme à la grande majorité des canonicats et détient en patronage les deux tiers des cures séculières. Avec une taxe de 6 000 florins, le siège est au XIVe siècle le 5e plus riche de France. L'officialité de Sens est doublée dès le XIIIe siècle d'officialités foraines dans les seigneuries archiépiscopales. La question de l'existence d'une officialité métropolitaine n'est pas encore résolue. Le chapitre de Sens est marqué par l'indécision de ses contours : beaucoup de personnages sont alternativement appelés chanoines ou chapelains, ce qui semble être une caractéristique bourguignonne. L'histoire de la formation du chapitre cathédral, qui intègre progressivement différentes communautés ou groupes de chanoines, est très complexe. Il y a 48 chanoines, mais seulement 40 prébendes (certaines sont divisées en quarts de prébende). Les maisons du quartier canonial sont la propriété du chapitre, qui les confie aux chanoines à titre viager. Cependant, à la fin du XVe siècle une certaine liberté de transaction des maisons semble s'être installée et les chanoines ou leurs héritiers peuvent les vendre. L'archevêque-légat Guillaume de Champagne a imposé une importante réforme des dignités au XIIe siècle. Leur ordre s'est stabilisé au début du XIVe siècle : le doyen tient la première place, les archidiacres (sauf celui de Sens) viennent après tous les autres dignitaires. Trois dignités (doyen, précentre et cellerier) sur 9 sont électives, les autres sont à la nomination de l'archevêque. Quatre officiers sont nommés annuellement par le chapitre pour administrer ses revenus. En vue d'égaliser les revenus de chacun, les prébendes font l'objet d'une partition régulière (normalement tous les 7 ans), et l'office de la Chambre perçoit sur les prébendés des recompensationes, redistribuées ensuite. Le bas-chœur de Sens se caractérise par sa modestie : il compte peu de chapelains, auxquels les archevêques préfèrent les vicaires, nommés annuellement et qui ne peuvent détenir aucun autre bénéfice.

L'évêque, le chapitre, l'hôpital : projet d'enquête, par Pascal Montaubin

P. Montaubin nous propose de nous intéresser à la manière dont évêque et chapitre répondent à l'injonction du Christ d'apporter de l'aide aux pauvres. Il serait intéressant notamment de vérifier la thèse soutenant que les clercs séculiers ont progressivement perdu le contrôle des institutions caritatives. Voici quelques questions à poser :

  • sur les aspects institutionnels : nos élites participent-elles à la fondation ? Où se fait cette fondation (dans le groupe cathédral) ? Font-elles des dons ? Qui a la tutelle de ces établissements ? (= qui nomme les administrateurs ? qui vérifie les comptes ?) Qui a la juridiction sur ces établissements ? Pourquoi les pouvoirs laïcs reprennent-ils ces institutions à partir du XIVe siècle ? (s'agit-il d'une dynamique propre à ces pouvoirs ou d'une conséquence de la détérioration de la situation des hôpitaux ?).
  • sur les rapports spirituels entre les évêques/chanoines et les institutions caritatives : ces élites recherchent-elles la prière des pauvres et des malades ? (voir les legs, obituaires, etc.) Ont-elles laissé des textes traitant des devoirs caritatifs du clergé ? En somme, évêques et chanoines s'inscrivent-ils dans une pastorale de la charité ? Considèrent-ils ces œuvres d'assistance comme une légitimation de leur place dans la société ?

Pour commander le volume.

Contenu du volume :

  • 272 pages.
  • 390 notices prosopographiques.
  • 27 biographies d'évêques.

Ce volume consacré au diocèse de Mende contient en outre une carte du diocèse, une présentation du quartier de la cathédrale avec trois plans, une étude de ses bibliothèques et de ses reliques, une notice sur le tombeau de Guillaume Durand.

« Soulignons pour finir le grand intérêt du livre, maillon supplémentaire pour la connaissance de l'Église médiévale dont tant reste à découvrir. » (Véronique Julerot dans: Revue Mabillon, n.s., t. 17, 2006, p.336-337).

 

Diocèse de Mende : note liminaire, par Hélène Millet

Le travail de recherche qui est à l’origine de ce huitième volume des Fasti Ecclesiae Gallicanae n’était pas consacré à l’histoire ecclésiastique. Philippe Maurice a en effet soutenu en 1995 à l’université de Tours une thèse de doctorat sur La famille en Gévaudan au XVème siècle, d’après les sources notariales (1380-1483) et c’est dans ces sources qu’il a découvert l’existence des chanoines de la cathédrale de Mende en tant que clients particulièrement bien attestés. Avertie par Christiane Deluz et Bernard Chevalier que la thèse comportait en appendice un copieux catalogue biographique portant sur cent deux chanoines de Mende et que cet appendice ne figurerait pas dans la version publiée (La famille au Gévaudan au XVème siècle, Publications de la Sorbonne, Paris, 1998), j’ai proposé à son auteur d’entrer dans l’équipe des Fasti et d’étendre ses investigations aux siècles antérieurs en vue de travailler à l’établissement du volume mendois. C’est le 5 mars 1999, au cours d’une visite qui est restée gravée dans ma mémoire, que le « marché » fut conclu.

Aux Archives départementales de la Lozère, pour l’aider dans cette démarche chronologiquement régressive et dans les méandres des institutions ecclésiastiques, Philippe Maurice savait pouvoir compter sur la généreuse complicité d’Hélène Duthu. A l’époque, Anne-Sabine Delrieu commençait justement des recherches sur le chapitre cathédral de Mende au XIVème siècle à partir de la comptabilité capitulaire. Toutes les conditions semblaient donc requises pour que s’établisse une fructueuse collaboration autour du diocèse mendois. Celle-ci a d’abord remarquablement fonctionné, puis les hasards de la vie professionnelle ont éloigné de Mende aussi bien Hélène Duthu qu'Anne-Sabine Delrieu, et Philippe Maurice s’est retrouvé seul au moment de prendre la plume pour rédiger les différentes composantes du volume. L’ampleur de la tâche à accomplir n’était cependant pas pour l’effrayer, car, dans le même temps, il a constamment travaillé à l’établissement d’un recueil de biographies du Gévaudan médiéval qui s’étend à l’ensemble de la population aussi bien laïque qu’ecclésiastique. Autant dire que rien de ce qui est mendois ne lui est étranger !

Pour les périodes antérieures au XVème siècle, les sources notariales ne pouvaient évidemment suffire à faire connaître les notables ecclésiastiques mendois, et Philippe Maurice a dû, lui aussi, alimenter ses notices à l’inépuisable documentation pontificale. Mais le profond ancrage de son travail dans les sources locales au sens large – à savoir des sources qui n’émanent pas exclusivement du chapitre ou de l’évêché – lui donne une saveur particulière et explique que le volume ne comporte pas les annexes, devenues habituelles dans la collection, où sont répertoriés les individus dont l’appartenance au chapitre pose problème. Il explique aussi que les notices biographiques des évêques du XIIIème siècle fassent une place très large aux affaires temporelles, militaires surtout, relatives au Gévaudan et que Philippe Maurice ait au contraire connu la tentation d’abandonner à leur obscur destin les pontifes des siècles ultérieurs, assez nombreux à faire figure d’étoiles filantes à Mende.

Parce qu’elles portent sur des personnages à la carrière bénéficiale plus étendue et souvent mieux connue, les notices biographiques épiscopales renvoient presque systématiquement à d’autres notices déjà publiées dans les volumes de la collection, soit dans le répertoire prosopographique soit dans le catalogue des notices d’évêques. On voit ainsi commencer à se mettre en place quelques éléments du puzzle que les Fasti Ecclesiae Gallicanae ambitionnent de reconstituer. Ces interférences de plus en plus nombreuses obligent à une vigilance accrue et le rapprochement des informations peut révéler des affirmations contradictoires ou manquant de cohérences dont il faut alors vérifier la fiabilité et la pertinence auprès des autres auteurs. La nécessaire harmonisation des données a contribué à renforcer le réseau des échanges entre chercheurs et, pour ce qui est de ce volume, je souhaite saluer tout particulièrement les généreuses relectures ou collaborations de Pierre Desportes, Fabrice Ryckebusch et Pierre Jugie. Les cardinaux sont ainsi des personnages redoutables pour ce qui est de l’évolution de leur carrière bénéficiale : supposées bien connues, celles-ci reposent en fait trop souvent sur des affirmations imprécises ou erronées pour lesquelles les possibilités d’erreurs sont encore multipliées par les cas relativement fréquents d’homonymie à l’intérieur des familles.

Au début de 2003, j’ignorais encore lequel des deux volumes de la collection, celui sur Angers ou celui sur Mende, verrait le jour le premier. L’ancienneté a finalement joué en faveur d’Angers et je tiens à remercier Philippe Maurice d’avoir supporté sans maugréer que la publication de son livre soit ainsi retardée. Cet ajournement n’a cependant pas permis que nous disposions des nouvelles procédures d’édition pour la fabrication de ce volume. Il faut se résigner : innombrables sont les raisons qui peuvent apporter des retards à la réalisation des projets. Mais l’avenir s’annonce plein d’espérances : Kris Klykens achève en ce moment même de mettre au point les programmes tant attendus.

Le temps joue d’ailleurs aussi en faveur du programme : nos recueils sont de plus en plus diffusés et utilisés. Les occasions pour les chercheurs de nous signaler compléments et corrections se multiplient elles aussi par voie de conséquence. Les facilités du courrier électronique favorisent considérablement ces échanges, que ce soit entre collaborateurs de l’équipe des Fasti ou avec les lecteurs. Ceux-ci trouveront d’ailleurs bientôt sur le site web des pages consacrées à la mise à jour des volumes déjà publiés. La progression du programme par le processus de la « boule de neige » est une source de satisfaction et d’encouragement. Que tous ceux qui y prennent part soient ici remerciés.

Orléans, le 10 mars 2004, Hélène Millet, directeur du programme.

 

Extrait du volume concernant le diocèse de Mende

Biographie de Guillaume Durand (pages 87-96)

n°129 Guillaume quarti, IIIIe, Durand (17 décembre 1296-juillet 1330)

1 – Si les fastes actuels de l’Église de Mende considèrent à juste titre Guillelmus Duranti comme étant le sixième évêque à porter ce prénom, les actes de son époque le présentent sous le nom de G. quarti ou Guilhelmus IIII. Toutefois, certains auteurs le nomment Guillaume Durand II, par référence à son oncle, Guillaume Durand I.

Natif de Puimisson, comme son oncle et prédécesseur, il est le frère de Pierre, héritier de la famille, et des chanoines Bernard (127) et Pons (130). En 1318, il obtient l’expectative de bénéfices pour ses frères, Guillaume, Bernard (127) et Pons (130), pour son neveu, Raymond Blanc, pour ses cousins, Guillaume d’Aquisvivis, du monastère bénédictin de Saint-Thibéry, diocèse d’Agde, Pierre Raynaldi, prieur de Chadenet, Guillaume Carrerie de Bassano (81) et Étienne Bedos (53), ainsi que pour ses familiers, Jacques Folquier (139) et Raymond André de Forcesio (18).

Ce personnage tient une place fondamentale dans l’histoire de la Chrétienté du début du XIVe siècle mais il a suivi toute cette carrière en demeurant évêque de Mende. Il possède une maison à Paris, où il séjourne souvent, rue de la Calandre, ainsi qu’un château à Argenteuil.

3 – Le 7 mars 1291, sur la requête de Paul Baussan (45) et d’Adémar Charbonier (94), il obtient du pape la collation du prieuré de Saint-Médard de Banassac (en Gévaudan), vacant après la mort d’un de ses parents, Hugon d’Aquisvivis.

Il est chanoine et archidiacre de Mende en 1296, lors de son élection comme évêque. Il résigne alors son archidiaconat, son canonicat et son prieuré de Banassac qui sont conférés à François André (17).

4 – Le 17 décembre 1296, sur l’intervention du chapitre de Mende, des clercs, du peuple, des vassaux du diocèse de Mende et du roi de France, Boniface VIII confirme l’élection de Guillaume qui succède ainsi à son oncle. Le pape accorde une dérogation en tenant compte que Guillaume n’est pas encore prêtre. Guillaume semble avoir été sur place et il a donc dû immédiatement entrer en fonction.

5 – Guillaume prend rapidement en main son diocèse et attache à son service des hommes qui figuraient dans l’entourage de son oncle et qu’il connaît bien : Raymond Barrot (39), Jean de Moriès (225), Pierre Gasc (147), Guillaume Savion, juge temporel, auxquels il associe de nombreux Gabalitains, voire des parents des précédents comme son chancelier, le notaire Jean Gasc. Mais il engage aussi à son service le célèbre juriste, Pierre d’Aurelhac Jacobi (115), qui rédigera la Pratique d’or et qui sera son official en 1312.

Le 24 juin 1297, Boniface VIII l’autorise à contracter un emprunt de trois mille livres tournois. Le 29 juillet, le pape le relève de son serment, prêté au moment de sa promotion comme évêque, de se rendre à Rome en pèlerinage tous les deux ans. Le 6 décembre, avec cinq autres chanoines, il fixe un statut selon lequel les chanoines s’engagent à ne pas présenter aux prébendes vacantes ceux dont les parents jusqu’au troisième degré se sont emparés des biens de l’Église ou ont violé ses droits. Cinq ans plus tard, le 25 décembre 1302, le pape confirmera ce nouveau statut.

Guillaume entre en conflit avec Astorg, seigneur de Peyre, qui a reçu l’hommage de Drogon de Ribennes pour des fiefs dont lui, évêque, se dit le suzerain. Le 28 mai 1298, un accord est passé entre les parties, représentées par Pierre de Basalgette, juge de Peyre, et Pierre Gasc, hebdoma­dier de Mende, en vertu duquel chacun échange des droits. Au monastère Saint-Sauveur-de-Chirac, le 6 juin 1299, l’évêque approuve les coutumes de la Garde-Guérin sous la forme établie, en son absence, par son vicaire, Raymond Barrot, le 7 février 1299, en ajoutant toutefois un article. Ces coutumes seront modifiées par Barrot en 1310 et par Guillaume le 16 janvier 1313.

Il réunit le prieuré de Saint-Martin-de-Lanscule à la mense épiscopale et donne en échange aux moines de Cendras et à leur abbé, Guillaume Jourdan, les prieurés du Collet-de-Dèze et de Cassagnas, le 24 juillet 1299. Toutefois, le premier étant d’un trop grand rapport, les moines acceptent en échange l’église de Saint-Privat-de-Vallongue, le 15 janvier 1300. Douze jours plus tard, le 27, il transige avec le chapitre de Mende afin de fixer les limites de leurs juridictions respectives dans le mandement de Mende. Il procède à un échange de biens avec Bompar Lordet, prieur du monastère Saint-Sauveur de Chirac, après quoi l’abbé de Saint-Victor de Marseille ratifie cet acte, à Balsièges, en septem­bre 1300. Au commencement du mois de juillet 1301, avec le chapitre, il fixe et précise les droits et devoirs du sacriste avant de pourvoir à la sacristie, vacante depuis un an.

Absent de sa capitale au début de novembre 1301, il y revient en décembre et accorde la cure de Saint-Symphorien à Itier Julien. En 1302, l’abbé de la Chaise-Dieu lui cède les prieurés de Fournels, de Brion, de Termes, de Saint-Pierre-le-Vieux et du Bacon. En juin de cette année, il rapporte en la cathédrale des reliques de la Sainte-Croix que le roi de France lui a offertes. À la fin de ce mois, il reçoit les moniales de Mercoire et les bénit toutes en les entendant individuellement en confession dans le chapitre de Mende. Le 3 juillet, il inféode des droits sur Mijavols, près de Florac, à Bertrand de La Garde qui lui rend hommage. Il accorde personnellement un lods à un Mendois, le 13 juin 1303. En 1305, avec l’aval du roi, il fait arrêter Aldebert de Peyre, prieur d’Ispagnac et neveu homonyme de l’évêque de Viviers (236), qui s’est révolté contre lui, puis il l’excommunie et le destitue de son bénéfice.

Le pape Clément V l’autorise à réunir à la mense épiscopale l’église de Saint-Bauzile le 18 août 1306 puis celles de Saint-Alban et du Recoux en 1312. Le 19 novembre 1308, Guillaume informe le chapitre de Mende que le prieur de Sainte-Énimie souhaite rattacher diverses églises et chapelles à son monastère en échange de quoi les églises de Cultures et d’Estables et d’autres chapelles, sur lesquelles ce monastère a des droits, seraient unies à la mense épiscopale. Le chapitre ayant donné son accord, Guillaume charge les chanoines Bedos (53), Barrot (39) et Tournel (305), de procéder aux échanges.

Dès son ascension sur le siège de saint Privat, Guillaume relance avec intérêt la question de l’enquête sur les droits respectifs de l’évêque et du roi. La conception de Guillaume s’oriente dans un sens extrême des droits des évêques puisqu’il considère que la bulle d’or de 1161, hommage féodal rendu au roi par l’évêque Aldebert, avait été une erreur, une démarche humiliante, et que l’évêque de Mende n’avait, dans les temps anciens, jamais reconnu que la terre du Gévaudan fît partie du royaume ni que les évêques fussent sujets du roi. Il en conteste aussi la valeur juridi­que, dans la mesure où l’évêque a alors rendu ce premier hommage sans l’accord du pape, ni du chapitre, ni des barons. En 1301, il réunit le chapitre et s’accorde avec lui afin de déterminer le cadre du paréage. Il sollicite l’intercession des cardinaux Giovanni Boccamazza et Étienne de Bruges afin de négocier au mieux avec le roi. Des personnages éminents s’attellent alors à dresser un traité, tel Gaucelin de La Garde, évêque de Maguelone (169) et ancien compagnon de l’évêque Odilon de Mercœur, Pierre Flotte, Pierre de Chapelle, archevêque de Toulouse, et Pierre de Belleperche, membres du Conseil privé. Quelques années plus tard, après la mort de Gaucelin, le traité est mis au point par Guillaume de Nogaret, Guillaume de Plasian, juge-mage, Gilles Aycelin, archevêque de Narbonne, Pierre de Belleperche, devenu évêque d’Auxerre, et Mathieu des Essarts, évêque d’Évreux. Tout est conclu en février 1307. Le roi et l’évêque se répartissent la suzeraineté sur le pays. Guillaume a bénéficié du soutien du chapitre qui lui accorde successivement des subsides : un premier, annuel, de soixante sous tournois et de la moitié des revenus vacants, tant qu’il sera à Paris, en 1297, un second, identique, pour six ans, le 15 septembre 1309, et un troisième se composant des mêmes droits aux bénéfices vacants et de six livres tournois, pour six autres années, en 1318. Ce traité consacre définitivement la soumission des barons au roi et à l’évêque. Les barons tentent de s’y opposer et font appel devant le parlement de Paris en novembre 1307, le verdict mettra longtemps avant de tomber et il leur donnera tort, en 1341.

À Paris, en l’église des Augustins, le 18 février 1309, il reçoit l’hommage de Gaston d’Armagnac et de son épouse, Valpurge, pour leurs biens sis en Gévaudan. En avril, il passe avec le roi un accord selon lequel il obtient le tiers des biens confisqués aux juifs expulsés du diocèse de Mende. Au faubourg Saint-Marcel, en la maison du comte d’Armagnac, le 2 mai, il reçoit l’hommage du comte, Bernard, et de son épouse, Cécile, pour tout ce que le couple tient en Gévaudan. Le 12 janvier 1311, depuis la maison de maître Guillaume de Lachamp, près de Saint-Germain, faubourg de Paris, il concède aux prêtres et clercs de Marvejols l’érection de leur communauté en collégiale.

Après un bref retour à Mende, en 1312, il voyage à Paris et à Rome. Par des lettres patentes, le roi l’autorise à transférer des terres d’un revenu de vingt-cinq livres tournois par an à des ecclésiastiques, en mars 1310. Puis il lui renouvelle cette grâce pour les chapellenies que Guillaume a l’intention de fonder, en février 1315, après quoi il l’autorise à acquérir des rentes jusqu’à soixante livres parisis, pour des ecclésiastiques, en octobre 1317. Guillaume réunit à la mense épiscopale le prieuré de la Fage-Saint-Julien en 1312 et la cure d’Esclanadès en 1315.

Les officiers de Guillaume, toujours prompts à affirmer les droits de l’Église de Mende, détruisent les fourches patibulaires que Drogon de Ribennes avait plantées dans le mandement du château de Ribennes. Drogon proteste le 3 novembre 1316 et déclare qu’il a le droit de dresser ses fourches et qu’il n’acceptera pas qu’elles soient de nouveau mises à terre. Depuis Paris, le 23 février 1317, Guillaume autorise son vicaire général, Raymond Barrot, à conférer tout bénéfice vacant du diocèse pendant son absence. En compagnie du chanoine Bernard Durand et de plusieurs autres, Guillaume est institué exécuteur testamentaire par le chanoine Étienne Bedos (53) le 6 mars. Vers cette époque, il excommunie Falcon de La Fare, prieur de Saint-Christophe, qui a négligé de se rendre au synode de Mende.

En 1318, il doit alors faire face à une révolte des barons du Gévaudan, en particulier de Béraud de Mercœur et d’Astorg de Peyre, qui portent leurs accusations devant le pape et le roi.

La même année, Jean XXII lui donne la faculté de dispenser de tout empêchement trois clercs devant recevoir des bénéfices, de conférer l’office de tabellion apostolique à deux personnes, de célébrer ou de faire célébrer la messe avant le jour et de faire restaurer les cimetières et les églises profanés par un prêtre compétent. Le 19 mars 1324, le pape renouvelle la dernière autorisation. En 1320, Guillaume aurait fait construire l’église de Bramonas. Le mercredi après Pâques 1324, il consacre l’église de Barjac, puis, le 11 mars 1328, depuis sa maison d’Argenteuil, il confère cette église à Raymond Alamand. Le 24 juin 1329, à Paris, il restitue des terres à son familier, Lambert de Châteauneuf, qui n’avait pas tenu compte du droit de préemption de l’Église de Mende.

6 – Le 23 août 1305, sur mandat du pape Clément V, à Florence, avec Pelfort de Rabastens, abbé de Lombez, il intervient en faveur des Gibelins assiégés dans Pistoia par les Guelfes, mais ces derniers, excommuniés, triomphent en avril 1306 et consacrent l’échec de Guillaume. Ce dernier parcourt alors la Toscane, la marche d’Ancône et la Romagne. En 1307, il est en Angleterre où il enquête en vue de la canonisation de Thomas de Canteloup, évêque d’Hereford.

Fidèle serviteur de Philippe le Bel, Guillaume s’engage dans la lutte contre les Templiers et devient, en août 1308, l’un des huit commissaires nommés par le pape pour instruire leur procès. En 1309, à Paris, en l’abbaye Sainte-Geneviève, il assiste à la première commission pontifica­le convoquée dans le cadre de cette affaire. Le 5 juin 1311, il remet un rapport dans le cadre du procès des Templiers qui lui vaut l’inimitié des partisans du Temple.

En 1310, il arbitre un conflit entre Amauri II, vicomte de Narbonne, et le frère de ce dernier.

Le 16 octobre 1311, lors du concile de Vienne, il livre son rapport, Tractatus de modo generalis concilii celebrandi, sur les remèdes à apporter à la crise de la Chrétienté, dans lequel il remet en question l’absolutisme de Rome, et il le soutient avec une telle force qu’il risque, selon Jacques Duèze (futur Jean XXII), de provoquer un schisme. Son projet de réforme est rejeté bien qu’il réponde aux aspirations de nombreux évêques. Toutefois Clément V le suit dans l’idée de supprimer l’Ordre du Temple, par mesure administrative et non par sentence judiciaire, et le concile accepte cette procédure lors d’une sentence définitive le 22 mars 1312. Le roi l’autorise alors à se constituer une garde personnelle afin d’assurer sa défense contre tout attentat.

En 1313, à Paris, en présence du roi, il participe à une réunion de prélats et de barons qui délibèrent sur la formation d’une croisade. À l’occasion de ce séjour, il requiert le prévôt de Paris de faire libérer l’un de ses vassaux, Richard de Peyre, alors détenu au Châtelet.

En 1316, il siège aux Enquêtes et à la Grande Chambre, à Paris. Le nouveau pape, Jean XXII, opposé aux idées du rapport qu’il a rendu au concile de Vienne, promulgue une constitution qui va en sens inverse et renforce les pouvoirs pontificaux, le 15 septembre. À la mort de Jean 1er, fils de Louis X, en novembre 1316, Guillaume joue un rôle important, en qualité de juriste, pour conforter le droit de succession de Philippe V. Comme conseiller royal, il ouvre une campagne à la cour afin de critiquer la position du pape et tend ainsi à brouiller le pape et la cour royale ce qui lui vaut l’inimitié de Jean XXII, qui diligente des enquêtes contre lui. Il échappe toutefois aux sanctions du fait du crédit dont il jouit à la cour et le pape continue à l’utiliser pour diverses missions.

En 1317, il négocie un traité avec la Castille. Il arbitre aussi le paréage passé entre l’évêque de Rodez et le comte d’Armagnac mais le pape casse les décisions de Guillaume en ce domaine. En 1318, avec les évêques du Puy et de Laon, les comtes de Clermont et de Forez, ainsi que le sire de Sully, il est délégué comme ambassadeur du roi auprès du pape. Le 10 mars, avec l’évêque de Laon, il est chargé par Jean XXII de recevoir la résignation d’un canonicat de Saint-Laurent-la-Gâtine et de le conférer à un proche du roi. Le 21 mars, le pape le charge d’instruire un complément d’enquête dans le procès intenté à l’évêque de Chalon, par l’archevêque de Reims. La même année, Guillaume arbitre un différend entre Isabelle, duchesse de Bretagne, et son beau-frère, Gui, et le roi Philippe V le place sous sa sauvegarde spéciale, ainsi que ses biens et ses serviteurs, après avoir appris que l’on cherchait à lui nuire. En mai, il intervient, sur le plan juridique, dans l’établissement du mariage de Jeanne, fille de Louis X, et de Philippe, fils du comte d’Évreux. Le 9 juin, l’évêque de Maguelone lui demande de le faire indemniser à la suite de violences exercées par Jean de Sancerre, sénéchal de Beaucaire.

En 1319-1321, il part à deux reprises en Angleterre afin de conclure la paix entre les rois d’Angleterre et d’Écosse. En juillet 1321, il assiste à l’assemblée des députés de Paris, réunis sur la question des mesures et des monnaies. En 1323, avec Amauri de Narbonne, il prépare une croisade dont le projet échoue.

Le 6 février 1324, Jean XXII lui donne mandat pour recevoir huit personnes désignées par le roi aux prébendes de quatre cathédrales ou collégiales choisies par le même prince, à l’exception de celles de Rouen, de Reims, de Paris, de Laon, de Chartres et d’Amiens.

En 1329, sur ordre de Jean XXII et de Philippe de Valois, il part en Égypte, en compagnie de Pierre de la Palu, patriarche de Jérusalem, afin de préparer une croisade. Il accompagne alors Marie, fille de Louis de Bourbon, et l’époux de celle-ci, Guidon, roi de Chypre. Le 24 avril, il obtient du pape le droit de recevoir l’absolution à l’article de la mort et une indulgence pour lui et ses familiers. Le pape renouvelle cette indulgence le 10 août suivant. Il avait emmené avec lui Jean Raynald, hebdo­madier de la cathédrale de Mende, qui meurt, comme lui, lors de ce voyage.

8 – Homme de grande culture, dans son traité remis au concile de Vienne, il se réfère à Ambroise, Augustin, Jérôme, Grégoire, Isidore de Séville, Bède le Vénérable et Bernard de Clairvaux. Il combat avec vigueur l’usure dans son additif aux Statuta de son oncle. Il annote également le Directorium Chori de ce dernier. Il laisse encore le compte-rendu de son enquête préparatoire à la canonisation de Thomas de Canteloup, évêque d’Hereford, et plusieurs lettres. Dans son mémoire sur les préparatifs de la croisade, il critique les excès des princes : passion pour la chasse, dots excessives de leurs filles, altération des monnaies et dépenses exorbitantes.

Juste après le concile de Vienne, en 1312, de retour à Mende, Guillaume fonde le collège de Tous les Saints, dans la cathédrale, en faveur de quatre prêtres, et cela en conformité avec les vœux de son défunt oncle et prédécesseur. La présentation en revient à Pierre, frère de Guillaume, puis à ses héritiers. En même temps, il fonde le collège Saint-Privat. Ses trois frères, Pierre Durand, et les chanoines Bernard et Pons, présentent un vicaire au collège de Tous les Saints en 1318. Les chapel­lenies du collège de Tous les Saints sont sous le patronage de Pierre Durand, de Puimisson, en 1343. En 1392, noble Flotard de Madreras, héritier universel de Saure, fille de Guillaume Durand, est le patron de l’une de ces chapellenies. Le collège comportera au moins sept chapelains en 1428.

En 1380, le trésor de la cathédrale comporte plusieurs chapelles offer­tes par Guillaume. Une, violette, composée d’une chasuble, d’une chape, de deux dalmatiques, d’une aube avec parements et médaillons, d’une ceinture, de trois amicts, d’un manipule, d’une étole et d’un tour de cou. Une autre, blanche, en étoffe brochée en or, avec liserés, composée d’une chasuble, d’une chape, de deux dalmatiques, d’une aube avec parements rouges et médaillons, de deux autres aubes avec parements brodés, d’une ceinture, de trois amicts, de trois tours de cou, de trois manipules et de deux étoles. Une troisième chapelle, de même couleur, comprenant une chasuble et deux dalmatiques, aux armes de Guillaume.

9 – Boniface VIII l’autorise à tester le 30 avril 1297, puis Jean XXII en fait autant le 10 mars 1318, avant de lui accorder une indulgence pour que son confesseur le remette de ses péchés à l’article de la mort, le 1er juin 1325. Il meurt à Nicosie en juillet 1330.

Un an auparavant, alors qu’il partait pour la Terre sainte, le 24 avril 1329, il avait obtenu du pape, pour lui et ses familiers, le droit de faire séparer leurs os, leurs viscères et la « viande » de leurs corps, afin de les rapatrier, tout en ayant la possibilité d’élire sépulture là où ils voudraient.

Il ne profite pas de ce privilège et son corps est mis dans un sac de cuir et inhumé sur place, à Nicosie, à gauche du grand autel de l’église cistercienne de Sainte-Marie de Beaulieu. Toutefois, il ne subsiste plus la moindre trace de cette inhumation et les historiens locaux ne s’accordent pas vraiment sur le lieu où se dressait l’église Sainte-Marie, détruite au XVIe siècle.

Un cénotaphe en marbre, en forme de gisant, a été construit pour lui en l’église Notre-Dame de Cassan (Hérault), dans la chapelle Saint-Privat élevée par Guillaume. Il se trouve aujourd’hui à Toulouse, au musée des Augustins. Sa tête mitrée repose sur un coussin alors qu’il tient sa crosse de la main droite. Deux dragons sont couchés à ses pieds. Les écus qui accostent le gisant sont effacés mais, sur l’aube du gisant, figurent un lion et des trèfles qui apparaissent dans le chef des armoiries de Guillaume Durand speculator, ce qui tendrait à confirmer que les deux évêques, l’oncle et le neveu, portaient les mêmes armes.

11 – Armes personnelles : voir celles de son oncle, qui précèdent.

Armes en qualité d’évêque, en 1310 : d’or à trois pals de gueules, chargé d’un buste mitré tenant de la main droite une épée, et de la sénestre une crosse, le tout d’or (d’après sceau de la cour commune, parti aux armes du roi en un, aux armes de l’évêque en deux).

Sceaux : n° 1, appendu à un texte du paréage, en février 1307 : frag­ment d’un sceau ogival de 60 millimètres, représentant un évêque debout, dans une niche de style gothique, qui était sans doute surmontée d’une autre niche, avec la légende « …illi dei gra …. lita… » (pour « Sigillum Guilhelmi dei gracia guabalitanorum episcopi ») ; le contre-sceau repré­sente une pierre gnostique, un crabe, un scorpion et deux poissons, sans légende.

n° 2, appendu à une charte de juillet 1317 : ogival de 60 millimètres, représentant un évêque debout, vu de face, mitré, crossé et bénissant, placé dans une niche principale ; dans une niche supérieure, le Christ en croix, avec la vierge et saint Jean, debout, avec la légende « S’ Guilli dei gra. e … itis gabalitani », qui correspond à « Sigillum Guilhelmi, Dei gracia episcopi et comitis gabalitani ». Pas de contre-sceau.

n° 3, appendu à une charte de septembre 1317 : le même, avec pour contre-sceau un évêque debout, vu de face, à mi-corps, tenant une épée de la main droite et sa crosse de la gauche, et pour légende « X S. G. epi Mimatensis ».

Arch. nat., JJ 41, acte 17 ; JJ 42B, acte 17 ; JJ 45, acte 21 ; JJ 48, acte 207 ; JJ 50, acte 137 ; JJ 53, acte 357 ; J 204, fol. 2 ; J 206, n° 2 ; J 341, n° 4.

Arch. dép. de la Lozère, 3E 1589, fol. 18 ; 2275, fol. 81v ; G 53 ; 1057 ; 1118 ; 1350, fol. 13, 26, 60v , 66v , 70v , 121, 125v , 128v , 140 ; 1351, fol. 46v ; 1352, fol. 11v , 37v , 39v , 68, 93v ; 1353, fol. 52v , 62 ; 1363, fol. 5v ; 1364, fol. 22 ; 1374, fol. 54 ; F 1193 ; G 2366, 2381, 2385.

Registres de Nicolas IV, 4560, 4561.

Registres de Boniface VIII, 1492, 1762, 1921, 1958, 2131, 4985.

Lettres communes de Jean XXII, 1567-1571, 2237, 6524-6536, 6553, 6603, 18984, 19160, 22468, 45027, 45977-45978, 51986, 55276.

Lettres communes de Benoît XIII, 2932.

G. Alary, Guillaume Durant, évêque de Mende, 1296-1330. Un combat pour la réforme de l’Église au XIVe siècle.

F. André, Histoire du monastère et prieuré de Sainte-Énimie, Mende, 1867, p. 35-37.

Abbé Bosse, « Trésor de l’église de Mende, 1380 », traduction, dans Documents anté­rieurs, p. 146.

M. E. Boutaric, Actes du parlement de Paris, Paris, 1920, t. III, n° 4131, 5440, 6209.

H. Boullier-de-Branche, Feuda Gabalorum, t. I et II, index.

F. Buffière, Ce tant rude Gévaudan, t. I, p. 604-608, 705-724.

L. Costecalde, « Anciennes églises du département de la Lozère antérieures au XVe siècle », Chroniques et mélanges, t. 2, 1913, p. 223, 225, 234, 252, 253, 265.

« Le chapitre de Notre-Dame de Mende », dans Bulletin de la Société des Lettres, Sciences et Arts de la Lozère, publication indépendante, 1928-1932, p. 1-80.

A. Demurger, Vie et mort de l’ordre du Temple, Paris, 1985.

DHGE, t. XIV, col. 1171-1172.

DBF, t. XII, col. 661-662.

C. Eubel, t. I, p. 341.

C. Fasolt, Council and Hierarchy. The Political Thought of William Durant the Younger, Cambridge, 1991.

A. Foulquier, Notes biographiques sur le clergé desservant des paroisses… de Barjac, Javols et Saugues, t. I, 1re partie, p. 335, 2e partie, p. 890-894.

—, Notes historiques sur les paroisses des Cévennes, t. I, p. 289.

G. Plique, « Étude sur le chapitre cathédral de Mende de 1123 à 1516 », dans Chroni­ques et mélanges, p. 90, 109, 213.

C. Porée, Le consulat et l’administration municipale de Mende.

—, « Les statuts de la communauté des seigneurs pariers de La Garde-Guérin (1238-1313) », dans Archives gévaudanaises, t. 4, p. 79, 89, 99.

—, « Les évêques-comtes du Gévaudan. Étude sur le pouvoir temporel des évêques de Mende aux XIIe et XIIIe siècles », dans Archives gévaudanaises, t. 4, p. 348, 469.

B. Prunières, « L’ancienne baronnie de Peyre », dans Bulletin de la Société des Lettres, Sciences et Arts de la Lozère, 1866.

F. Remize, « Allenc. Sa baronnie, sa paroisse, sa communauté », dans Archives gévaudanaises, t. 5, p. 125.

E. Roschach, Catalogue des musées archéologiques de la ville de Toulouse, Toulouse, 1882.

 
diocèse de Mende

 

 

Compte rendu de la réunion de l'équipe des Fasti du 27 janvier 2006

 

Informations générales

Hélène Millet ouvre la journée d'étude avec plusieurs informations:

Elle présente d'abord les excuses d'Anne-Lise Rey-Courtel, empêchée de venir présenter son exposé sur les biographies des 54 cardinaux du temps de Clément VII . Les travaux sont déjà assez avancés pour pouvoir répondre aux demandes de recherche sur les 25 cardinaux du Midi ( les 2 Aigrefeuille, Ameilh, Atgier, les 2 Aycelin de Montaigut, Blauzac, les 2 Chanac, les 2 Cros, les 2 Flandin, Grimoard, Lautrec, Maignac, Malesset, Monteruc, Murol, du Puy, Raymond de Barrière, Saint-Martial, Saint-Saturnin, Sortenac, Vergne) ainsi que sur Fétigny, Girard, la Grange, Luxembourg, Montrelais, Noellet, Rossi da Giffone, Saluces, Talaru, Thurey et Vergy (Pour contacter Anne-Lise Rey-Courtel: anne.lise.rey.courtel@wanadoo.fr,mail).

Il faut avoir une claire conscience du nouveau jeu des financements de la recherche . Le GDR Salvé a été classé 1 er ex-aequo par la commission 32 du CNRS. Ce GDR, qui accueille l'équipe des Fasti, créée il y a 12 ans, est donc en passe d'être renouvelé pour quatre ans. Mais d'ici 2010 le temps des GDR aura vécu.

La création de l'Agence Nationale de la Recherche modifie le jeu de la recherche de crédits : elle ne rémunère plus des équipes mais s'engage temporairement sur des programmes. En février 2005, l'ANR ne proposait aucun financement en direction des Sciences de l'Homme et de la Société. En juillet 2005, des dotations de 16 000 à 60 000 euros ont été réservées aux dossiers soumis avant septembre.

Il faut distinguer plusieurs types d'appels à projets :

  • projet blanc (avant le 20 mars 2006) = aucune thématique requise. Un maître mot : l'innovation.
  • projets présentés par de jeunes chercheurs (ie < 39 ans).
  • projets thématiques SHS : conflits, guerre et violence ; apprentissage, formation et société ; corpus et outils de la recherche en sciences humaines.

Les crédits peuvent servir à la rémunération de personnel temporaire sur CDD. Pour plus d'informations, rendez-vous à l'adresse suivante : http://www.gip-anr.fr/templates/appel-a-projet.php?NodId=17.

D'autres opportunités de financement peuvent intéresser les chercheurs réunis autour des Fasti : ce sont les agences de crédits locales . Ainsi Christine Barralis a obtenu un financement de 35 000 euros en soumettant un projet de recherche aux Partenariats Institutions-Citoyens pour la Recherche et l'Innovation (PICRI), financés par la région Ile-de-France. Il s'agit pour les chercheurs de conduire leur travaux en partenariat avec le monde associatif (CB a proposé une formation à la paléographie, au travail en archives, la préparation d'une exposition sur la cathédrale de Meaux et son quartier). Pour plus d'informations : http://www.iledefrance.fr/data/info/98928.pdf

Une nouvelle version du Petit Guide est disponible sur demande à Madame Martin (martin@cnrs-orleans.fr, mail). Attention : de nouvelles consignes sont à respecter pour la saisie des données dans le champ « parents », et quelques modifications ont été introduites pour la présentation des références. Ces ajustements sont destinés à préparer les bases diocésaines à leur entrée dans la « base Fasti » : celle-ci sera bientôt disponible en ligne aux auteurs à qui sera délivré un code d'accès. A partir de ce nouveau s ite web à usage privé , il sera possible de créer une base diocésaine, sans passer par l'intermédiaire d'ACCESS. Le système créé par Stéphane Raux permet de visualiser immédiatement les notices selon leur format d'édition, ce qui devrait considérablement faciliter le travail de saisie. Chaque auteur des fascicules édités participe en ce moment à la révision des notices prosopographiques. Une fois cumulées, les données de ces bases seront remises à Brepols pour leur mise en ligne sur le site, public mais payant, Brepolis . La livraison est prévue pour la fin 2006.

Le séminaire l'Eglise et les Eglises (présentation du séminaire : http://www.histoire.ens.fr/sem/medievale.html ) a invité les Fasti, en la personne de Christine Barralis (LAMOP), le 2 décembre 2005 pour une réflexion sur le thème : Que veut dire l'expression « ecclesia meldensis » à la fin du Moyen Age ?

La journée du 26 novembre 2005, Devenir évêque , organisée par Véronique Julerot a connu un grand succès. On trouvera sur le site du Lamop la bibliographie de référence et les résumés des communications. La prochaine réunion se tiendra le 21 octobre 2006 et aura pour thème : La consécration épiscopale .

Il n'aura pas échappé à certains curieux que, sur le tableau de la Vierge au manteau , conservé au Musée Crozatier du Puy-en-Velay, l'aumusse du chanoine est unicorne. Voilà une spécificité vestimentaire du chapitre du Puy, attestée en outre par des pierres tombales.

Nouvelles publications présentées :

  • Lecture et lecteurs en Bourgogne du Moyen Age à l'époque contemporaine , V. Tabbagh dir., Annales de Bourgogne (77), 2005.
  • Formation intellectuelle et culture du clergé dans les territoires angevins (milieu du XIIIème-fin du XVème siècle), J.-M. Matz et M.-M. de Cevins dir., Rome, 2005 (Collectionde l'Ecole française de Rome 349).
  • A Igreja e o clero Portugues no Contexto Europeu (The Church and the Portuguese Clergy in the European Context) , Lisbonne, 2005.
  • Un article de J. Pycke ; “L'examen d'un groupe social local devenu international: la prosopographie du chapitre cathédral de Tournai de 1080 à 1340”, p.207-232.

Un catalogue prosopographique pour la cathédrale de Braga déposé en G687 (donc référence actuellement inaccessible), où l'on trouve des méridionaux français du XIVème siècle.

Catherine Vincent annonce que le prochain Colloque International de la CIHEC (Commission d'Histoire Ecclésiastique Comparée), aura lieu à Paris en 2007 sur le thème de la liturgie.

A noter : la prochaine école d'été organisée par le CERCOR, à destination des doctorants et autres chercheurs en histoire religieuse, aura lieu à Saint-Etienne du 21 au 25 août 2006 sur le thème de la réforme, avec une initiation au droit canon, à la codicologie, l'iconographie, la liturgie etc. Le prix en est de 130 euros, voyage non compris. Programme et bulletin d'inscription seront diffusés séparément. Eventuellement les réclamer à Mme Hélène Morin (helene.morin@univ-st-etienne.fr).

 

Fabrice Ryckebusch, Cathédrales bénédictines dans le midi de la France.

Dans le cadre de sa thèse, F. R. explore les indices de la politique réformatrice de Jean XXII : en compagnie de M. Fournié et d'A. Arcin, il avait déjà présenté une relecture des motivations présidant à la création de la province ecclésiastique de Toulouse ( RHE (98) 2003, p.29-60). Le choix d'ériger des cathédrales bénédictines participerait à cette volonté réformatrice dans le prolongement des réformes introduites chez les OSB par le concile de Vienne et ouvrirait la voir à la Benedictina de son successeur. Certains éléments, en effet, en sont mis en place dès le pontificat de Jean XXII.

F. R. a étudié un dossier documentaire intéressant les sièges bénédictins méridionaux de Montauban, Saint-Papoul, Condom, Sarlat, Castres, Tulle, Saint-Flour, Vabres, Alet et Saint-Pons de Thomières. En plus d'une prosopographie des moines de ces cathédrales, il exploite les bulles de fondation, un registre de secrétariat de l'évêché de Vabres, divers statuts capitulaires - parmi lesquels ceux de Condom rédigés en 1343 - un procès-verbal de l'élection épiscopale à Sarlat par les chapitres de la cathédrale et de la collégiale Notre-Dame de Capdrot.

Une première question se pose : quelles raisons ont pu dicter le choix de la transformation d'abbayes bénédictines en cathédrale ? Le choix de Jean XXII n'a porté:

  • ni sur des abbés exceptionnels : le sort réservé aux abbés de Castres, Sarlat et Saint-Flour en témoigne ;
  • ni sur des villes importantes : Alet est un second choix après « l'erreur « de Jean XXII à propos de Limoux ; une logique de centralité aurait consacré Castelnaudary aux dépens de Saint-Papoul ;
  • ni exclusivement sur des abbayes nullo medio qui relèveraient directement de l'autorité pontificale ;

on ne peut même pas soutenir que Jean XXII, en annexant quelques prieurés clunisiens, a voulu ruiner l'autorité de Cluny.

Dans l'état actuel des recherches, il semble que l'élément décisif dans ce choix des abbayes bénédictines découle du souci de disposer d'établissements déjà dotés ce qui permet d'amoindrir la richesse des diocèses anciens tout en leur conservant des revenus suffisants ;

1. L'installation des cathédrales bénédictines. L'uniformisation des statuts.

Castres et Saint-Flour sont les deux premières cathédrales bénédictines pourvues d'un évêque : respectivement Déodat de Séverac, un théologien, et Raymond de Mostuéjouls, un juriste. Ces deux personnages ont joué un rôle considérable dans l'installation des cathédrales bénédictines méridionales notamment en diffusant un modèle de statuts qui était probablement celui voulu par Jean XXII.

 

Eléments chronologiques :

Curieusement, Déodat de Sévérac et Raymond de Mostuéjouls à peine consacrés évêques se voient demander, le 6 juillet 1319, d'élaborer des statuts pour leurs Eglises, après avoir pris l'avis des prêtres de leur diocèse et des moines de leurs abbayes. Ces statuts son inconnus aujourd'hui mais on sait qu'ils ont été soumis à l'approbation pontificale. Il est possible sinon probable que ces statuts sont ceux que l'on retrouve sous une forme standardisée dans quelques unes des cathédrales bénédictines méridionales, peu de temps après leur érection. Les premiers promulgués semblent avoir été ceux de Raymond de Mostuéjouls à Saint-Papoul en janvier 1320.

Cette codification de statuts progresse d'une cathédrale méridionale à l'autre. En juin 1320 pour la Saint Clair, lors d'un chapitre général de la cathédrale de Tulle, Raymond de Mostuéjouls et Guillaume de Cardaillac, évêque de Montauban, sont appelés à seconder l'évêque et le chapitre pour la rédaction de statuts. La même procédure (commissions) qu'à Saint-Papoul y est adoptée et le résultat sensiblement le même. Les statuts de Tulle (publiés par Baluze) sont très proches de ceux de Saint-Papoul et de ceux de Vabres (5 juillet 1320) : seuls changent des points de détails (le nombre de moines et celui des individus envoyés aux études). A Montauban, des statuts sont adoptés en 1322, sous l'épiscopat de Cardaillac. Pour Saint-Pons, on ne dispose plus du texte, mais Urbain V fait allusion à des statuts « imposés » par Raymond de Mostuéjouls…

Pour les statuts de Condom - qui n'ont pas encore été vus par F.R. - il est possible que l'évêque de Galard ait adopté un autre modèle tant les relations de cette cathédrale avec les autres paraissent rares. Cela ne doit pas empêcher de mettre en avant le souci d'uniformisation des statuts et de mise en relation des différentes cathédrales bénédictines par Jean XXII, confiant pour ce faire un rôle éminent à quelques personnages que l'on voit circuler de cathédrale bénédictine en cathédrale bénédictine à des dates trop rapprochées pour que cela soit purement fortuit.

Contenu global de ces statuts

La comparaison des statuts fait ressortir quelques variantes d'ordre local mais contiennent quelques éléments récurrents :

  • Le prieur mage : un nouveau prieur mage est élu dix jours maximum après le décès de son prédécesseur. Insistance particulière sur les pouvoirs de correction qu'il peut exercer sur les moines sans avoir recours à l'évêque, du moins tant que les fautes relèvent de la discipline de la Règle. Dans les premières années de fonctionnement des cathédrales bénédictines, on assiste à une véritable réflexion sur le rôle du prieur-mage dont on trouve d'ailleurs des échos dans les décisions de la Rote. Il devient l'homme fort face à l'évêque, qui n'est pas toujours bénédictin. Il revendique la totalité des droits qui appartenaient à l'abbé.
  • Le chapitre général se tient, de droit, le lendemain de la fête du saint de la cathédrale pour la réforme de tout ce qui ne fonctionne pas. C'est le moment de la reddition des comptes.
  • Les autorisations d'absence sont données à ceux qui poursuivent des études ou qui détiennent des bénéfices dépendants du chapitre.
  • Le sous-prieur est nommé par un chapitre, auquel l'évêque a voix.
  • Fixation du nombre des moines. Il reste élevé par rapport à celui des effectifs des chapitres cathédraux séculiers du Midi comme le fait remarquer Y. ESQUIEU. Pascal Montaubin lie ce phénomène à l'absence de prébendes dans ces chapitres bénédictins mais ce ne peut être qu'un commencement d'explication car les chapitres méridionaux même séculiers n'ont pas toujours des prébendes distinctes.
  • Profession monastique, serment d'obéissance entre les mains de l'évêque.
  • Liens avec les prieurés.
  • Séparation des menses : la division des menses a entraîné des luttes entre les évêques et les moines emmenés par les prieurs, Dès 1327, et pour 16 ans encore, Saint-Pons connaît des problèmes à ce propos sans qu'il soit possible, du fait de la disparition des sources, d'en connaître la raison. A Tulle, en revanche, la situation est remarquablement gérée.
  • Liens de confraternité.

 

2. Quelques points particulièrement importants pour Jean XXII.

A. Des élections épiscopales mixtes.

Jean XXII a souhaité que l'élection épiscopale, dans certains diocèses bénédictins, soit menée conjointement par le chapitre cathédral bénédictin et le chapitre collégial. Ainsi participent à l'élection, à Montauban, le chapitre de la collégiale Saint-Etienne du Tescou, à Saint-Papoul, le chapitre de Castelnaudary, à Alet, celui de Saint-Paul du Fenouillet, à Castres celui de Saint-Pierre de Burlats, à Sarlat, celui de Capdrot. Pour F. R. il ne s'agit pas de défiance envers les bénédictins. Pourquoi élargir le corps électoral ? Pour que le corps électoral soit représentatif de l'ensemble du clergé. Ce système ne prévaut pas partout : A Condom, seuls les moines de la cathédrale participent à l'élection, sans participation des chanoines de La Romieu, par exemple.

Jean XXII rappelle en 1328 le processus d'une élection mixte (chapitre cathédral et chapitre collégial), au bénéfice du chapitre de la collégiale de Castelnaudary. Il maintient ce système alors qu'il nomme lui-même les évêques ! En 1335, ce système fonctionne pour l'élection de Guillaume de Sendreux à Sarlat. Il est supprimé par Clément VI (bulle dans Doat) ce qui n'empêche pas les revendications de la collégiale du Tescou en 1360 et de Castelnaudary au XVe siècle encore (la querelle donne lieu à une argumentation très solide dont rend compte le registre de secrétariat de Pierre Soybert).

B . Insistance sur les études des moines noirs.

Alors que l'abbé de Moissac (à la fin du XIIIe sicle) veut bien envoyer des moines aux études, mais non les financer, Jean XXII et ses fidèles exécuteurs décident, par leurs statuts, qu'un moine sur dix pourra s'absenter pour des études en droit canon ou en théologie tout en percevant, en deux termes, l'équivalent de sa prébende monacale. Ce système est bien plus favorable que celui entériné qui figurera dans la Benedictina ,. Ce point important des statuts des nouvelles cathédrales s'appuie sur la constitution apostolique Ne in agro dominico attribuée au concile de Vienne sans qu'il soit possible de savoir si ce texte a bien été élaboré par le concile ou rajouté par Jean XXII au moment de la promulgation des actes du concile. Quoi qu'il en soit, Jacques Duèse, au moment du concile, siégeait dans la commission chargée de la réforme de l'Eglise. Pour F. R. ces dispositions doivent conduire à minorer l'importance de la Benedictina comme instrument de réforme des OSB par Benoît XII : celui-ci s'est inspiré d'acquis anciens ou plus récents et s'est fait assister de cardinaux bénédictins qu'il signale de manière très allusive. Parmi eux figurait le cardinal Raymond de Mostuéjouls !

Les désirs du pape ont-ils été suivis d'effets ? Peut-on retrouver 10 % de moines aux études par une prosopographie ? Les statistiques n'ont pas encore été complètement réalisées. Dans les rôles de l'Université de Toulouse en 1378, on compte cependant 44 bénédictins parmi 562 canonistes.

C. Liens entre les cathédrales.

Le système de confraternité évoqué en fin de statuts a certainement fonctionné. Il n'est pas seulement destiné à créer des communautés de prières pour les moines défunts mais est également pensé comme l'outil d'une éventuelle réforme en cas de relâchement de la discipline. Pour l'instant les décomptes de liens existant entre ces cathédrales ne sont pas suffisants pour parler de l'instauration d'un réseau de cathédrales bénédictines : sur 800 notices, 15 moines ont circulé d'une cathédrale à l'autre ; six cathédrales bénédictines gravitent dans leur recrutement autour de Saint-Guilhem. Pascal Montaubin qui intervient sur ce point préfère la notion de relations à celle de réseaux, ce dont convient F. R. au regard du faible indice de connexité mis à jour. Vincent Tabbagh demande si les confraternités fonctionnent exclusivement entre les abbayes devenues cathédrales ou s'il existe des tentatives de confraternités avec des chapitres augustins et d'autres abbayes bénédictines ? Pour F. R. les nouvelles confraternités ne se substituent pas aux anciennes ; elles viendraient plutôt se surajouter.

Dans la suite de ses recherches, F.R voudrait montrer que cette création de cathédrales OSB s'inscrit dans une volonté de réforme des bénédictins annoncée par le concile de Vienne et poursuivie par Jean XXII et ses successeurs. Elle pourrait constituer - mais c'est une hypothèse - une réponse à Pierre Dubois qui veut séculariser les abbayes bénédictines. Pour Jean XXII, bien plus que pour Benoît XII, et de façon semblable à Urbain V, l'ordre bénédictin est une préoccupation majeure : cela ressort du décompte des lettres expédiées par la chancellerie (11 % des lettres sont consacrées aux bénédictins). Sous Jean XXII, un tiers du total des nominations d'évêques concerne des bénédictins. Jean XXII a lui-même rappelé la nécessité des conciles triennaux et du concile provincial.

A l'issue de l'exposé les questions ont été nombreuses, outre celles qui ont été évoquées dans le cours du compte-rendu, il convient de noter l'intervention de Daniel Le Blévec qui rappelle la fascination de Jean XXII pour les moines : il transforme des abbayes en cathédrale et fonde deux chartreuses. Il se demande quel rôle a pu jouer l'exemple appaméen. Pour F. R. il s'agit d'un contre modèle. Hélène Millet souhaite savoir comment les abbayes sont nommées dans les sources. F. R. : dans les épaves locales, il s'agit de chapitres de moines noirs, dans l'analyse des lettres pontificales, de moines ; dans les statuts, il s'agit de chapitres de moines, capitulum ecclesie .

 

Catherine Vincent : Préparation de la rencontre scientifique «Cathédrales et pèlerinages»

C. V. prend la parole en tant que responsable de l'axe « Sanctuaires et pèlerinage » (http://www.coldev.org/sanctuaires/index.php), en vue de la préparation d'une rencontre, en partenariat avec celui des Fasti, à programmer fin 2007 ou début 2008, sur le problème des relations entre cathédrales et pèlerinages.

On ne lit rien sur la relation entre cathédrales et pèlerinages, deux pôles majeurs de la pratique chrétienne. Pourtant de nombreux indices attestent un lien pérenne entre cathédrales et pèlerinages, et une évolution de ce lien. Un constat initial à préciser, qui devrait déboucher sur de plus vastes questionnements : celle de l'attitude de l'épiscopat et des corps canoniaux face à cette pratique et à la vénération des reliques. Celle de la relation des fidèles à l'identité diocésaine, et de l'articulation de cette dernière avec le « polycentrisme » de la pratique.

Quatre directions sont proposées à la réflexion :

  • 1. Quels sont les divers types de déplacements vers l'église-mère du diocèse ? Quel est ici le sens du mot pèlerinage ?
  • 2. Qui vient-on vénérer dans les cathédrales ?
  • 3. La cathédrale et son clergé face au/aux pèlerinage(s).
  • 4. Cathédrale et autres pèlerinages de la cité ou du diocèse : rivalité, complémentarité ?

Cette invitation appelle les commentaires de Benoît Jourdan sur l'espace rhénan, de Monique Maillard sur Cambrai, de Patrick Demouy sur les promenade de reliques, de Jacques Madignier sur Autun (culte de saint Lazare), de Pierre Desportes sur Amiens, d'Yves Esquieu sur les dispositions architecturales, de Denyse Riche sur le rôle des villes, de V. Tabbagh sur la propriété des reliques qui passe aux confréries.

NB : Un formulaire de réponse aux questions ci-dessus a déjà été envoyé. Merci à ceux qui l'ont rempli et retourné. Il n'est pas trop tard pour le faire, avec brièveté, car il s'agit d'un sondage destiné à évaluer globalement la situation : si vous ne savez rien sur la question, c'est aussi utile de le dire.

 

Jean Vincent Jourd'Heuil, Présentation de la notice institutionnelle de Langres

J-V. J. présente une notice très avancée sur le chapitre de Langres. Il dispose de sources tout à la fois nombreuses (délibérations capitulaires, comptes, cartulaires, obituaires, testaments et codicilles) et rares (tel le BM Langres ms. 54, partitions et matricule du chapitre depuis 1384).

Christophe Wissenberg a conçu une carte du diocèse et de ses subdivisions en archidiaconés (6) et doyennés (17). Ce diocèse compte 577 paroisses dont 156 à la collation de l'évêque et 62 à celle du chapitre, d'après le pouillé dit de 1373. La cité épiscopale compte trois paroisses, quatre prieurés forains et un couvent dominicain à partir de 1232. Dans le diocèse, on compte quatre collégiales séculières en 1200 et dix huit en 1500, parmi lesquelles la chapelle ducale de Dijon, fondée en 1172 par le duc de Bourgogne : Philippe le Bon porte en 1431 le nombre de prébendes de 21 à 24 et fonde 4 canonicats musicaux. Cette collégiale constitue la paroisse personnelle de la famille ducale et le siège de la Toison d'Or dès 1431. Elle reçoit une hostie miraculeuse d'Eugène IV en 1433 et devient Sainte-Chapelle.

La cathédrale actuelle est bâtie dans la première moitié du XII e s. L'évêché, baronnie subdivisée en treize prévôtés au XIII e siècle, est l'une des premières seigneuries ecclésiastique du royaume : elle reçoit alors l'hommage des comtes de Champagne et de Tonnerre, du duc de Bourgogne et de plus de 120 vassaux. L'évêque, pair de France, frappant monnaie du X e au XIV e s., et remettant le sceptre lors de la cérémonie du sacre royal, prend régulièrement le titre de duc de Langres (peut-être même dès le XIIIe siècle). Les revenus épiscopaux, taxés à 6000 lb, situent le siège de Langres au quatrième rang après les archevêques de Rouen, Auch et Narbonne. En 1203 Philippe Auguste autorise les chanoines à élire l'évêque sans sa licence et leur accorde le droit de régale. Le bailli de Sens est souvent sollicité pour régler les litiges entre les deux seigneurs de la cité : l'évêque et le chapitre. En 1317, le roi établit un capitaine dans la cité.

La première mention d'un official à la cour de Langres remonte à 1206. En 1387, Clément VII supprime sur la requête de l'évêque la juridiction de l'archidiacre de Langres contre une pension annuelle de 400 fl. Cet acte entérine la disparition de la dernière officialité concurrente de celle de l'évêque, les archidiacres semblant tous disposer d'une officialité dès le milieu du XIII e s. En 1415, les six archidiacres perçoivent un tiers des amendes perçues par l'official de Langres, sur les sujets de leur archidiaconé, ainsi que le tiers de la valeur du sceau des absolutions.

Les chanoines revendiquent une autorité sans partage sur l'église-mère du diocèse. Le chapitre, seigneur de trente cinq villages, du quartier cathédral emmuré et percé de dix portes, et du faubourg de Sous-Murs, est aussi co-seigneur de onze autres villages, décimateur exclusif de quatorze autres... Le chapitre entend échapper dès le XIII e siècle à la juridiction épiscopale. Ce n'est cependant qu'en 1371 que l'évêque Guillaume de Poitiers accorde le droit de haute et basse justice, civile et criminelle, par le chapitre sur ses membres lors de dies judiciales . L'année capitulaire s'ouvre par le chapitre général du 1er mai, auquel s'ajoutent les chapitres généraux de la Madeleine (22 juillet) et de la Saint Mammès (17 août). D'après le statut de 1257, le chapitre compte cinquante et une prébendes, deux attribuées au doyen, deux autres aux "prébendiers" (prêtres chargés d'assister les chanoines dans l'office divin, leur nombre passe de 6 à 8 au XIVe s.), et quarante sept, chacune attribuée à un chanoine. On tient d'une plainte au Parlement de Paris, en 1415, la valeur d'une prébende à 200 l. t. (distributions comprises). En 1440 le concile de Bâle accorde au chapitre la possibilité d'attribuer une prébende sacerdotale aux enfants de choeur et une seconde à la mense des prébendiers. Le nombre des chanoines passe ainsi de quarante huit à quarante six avec une partition maintenue à cinquante et une prébendes. En 1257, huit prébendes sont sacerdotales, douze diaconales, douze sous-diaconales, et quinze sans contrainte d'ordre. A compter de 1274 les chanoines titulaires d'une prébende sacerdotale seront privés de la totalité de leur prébende s'ils résident moins de six mois, et devront résigner tout bénéfice exigeant une autre résidence. En 1438, la clause de la résidence de six mois est supprimée, mais s'ajoute l'obligation d'assister quotidiennement aux matines, à la messe et aux vêpres sous peine de perdre les distributions attachées à ces heures. Les cures et les bénéfices à la collation du chapitre sont tantôt conférés individuellement par les chanoines, à tour de rôle, tantôt conférés par le chapitre entier.

Le chapitre cathédral compte neuf dignitaires. Le doyen, cité depuis 903, a double distribution et double prébende. Il est taxé à 70 lb. Une bulle de 1263 confirme le droit d'élection du doyen par le chapitre et interdit la collation apostolique. Il nomme les prébendiers du chapitre. Le trésorier, apparu au XI e siècle, seigneur de deux villages du Langrois, est taxé à 240 lb. Les six archidiacres, selon la hiérarchie connue dès 1241 : archidiacre du Langrois ou grand archidiacre, archidiacres du Dijonnais, du Tonnerrois, du Lassois, du Barrois et du Bassigny, sont taxés de 80 à 15 lb. Le chantre dirige les chants aux offices et détient la nomination des maîtres des écoles publiques du diocèse. Les chanoines exercent quatre types d'offices. Le chambrier, chanoine élu par ses pairs pour un an reconductible, est à la tête de la chambre capitulaire. Il est chargé des comptes capitulaires, règle les contentieux financiers du chapitre, tient le rôle de juge ordinaire des chapelains, prêtres habitués, choriaux et officiers de l'Eglise de Langres. Les obédienciers sont quatre chanoines chargés de l'administration temporelle des biens capitulaires dans quatre circonscriptions proches de Langres. Ils ont des fonctions d'administration et de justice. L'office de sacristain consiste à veiller aux vases sacrés, missels et livres liturgiques. La création de l'office de théologal, voulue par la 31 eme session du concile de Bâle (1438), apparaît à Langres en 1443 : il assure des leçons de théologie une à deux fois par semaine et doit prêcher à la cathédrale surtout pendant l'Avent et le Carême. Trois autres officiers sont parfois choisis parmi les chanoines : le cellérier, le chancelier, le psallette (1486). Le chapitre semble jouir de fait de la collation aux prébendes (hors collation apostolique). Les conditions d'admission, connues par les serments prêtés par les chanoines lors de leur réception, paraissent évoluer dans un sens restrictif, de 1398 à 1433.

Les autres desservants de la cathédrale sont les prébendiers et les chapelains. Les prébendiers, de six à huit, sont adjoints aux chanoines prêtres pour les seconder dans le service divin. Ils jouissent des fruits de deux, puis trois prébendes, sont nommés par le doyen et possèdent une stalle au choeur. Les chapelains sont près d'une centaine au milieu du XV e siècle, attachés au service de trente-sept chapelles de la cathédrale.

 

27 et 28 janvier 2006 : Jean-Baptiste Lebigue, Stage sur les manuscrits liturgiques

L'assistance, conduite à vive mais attentive allure par Jean-Baptiste Lebigue , a alors entamé un passionnant voyage dans l'étrange univers du livre liturgique ! L'après-midi a été consacré à l'étude des propriétés particulières de chacun des livres liturgiques de la messe : sacramentaire, évangéliaire, épistolier, graduel et missel. Chacun des quatre premiers livres reprend les pièces liturgiques propres à chaque type des acteurs de la messe (respectivement le célébrant, le diacre, le sous-diacre, le chantre) tandis que le missel contient l'ensemble de ces pièces. Une mise au point sur temporal et sanctoral a précédé une présentation sur la préséance entre les offices. Le tout agrémenté d'exercices pratiques !

Le lendemain 28 janvier, le stage se poursuit dans les murs de l'Ecole des Chartes, autour de l'office des heures, une pratique liturgique imposée à tous les membres du clergé, dont le fondement est la récitation hebdomadaire des cent cinquante psaumes, répartis entre les différents jours de la semaine, et entre différents moments de chaque journée. Nous sommes passés du rappel des principales pièces de l'office à l'étude des manuscrits qui les rassemblent : psautiers, antiphonaires, hymnaires, livres de lectures (lectionnaires, homiliaires, passionnaires), collectaires et bréviaires.

Enfin, Jean-Baptiste Lebigue nous a donné des clefs pour l'identification d'autres manuscrits liturgiques, qui ne peuvent être classés parmi les livres de la messe ou de l'office : des livres relatifs à l'organisation générale du culte : l'ordinaire, le coutumier et les livres d'usages, le cérémoniaire, les nécrologes et obituaires. Des manuscrits dédiés à des aspects particuliers de la liturgie : le martyrologe, les processionaux, les livres de cérémonie et ordines rituales . Enfin des livres réservés à des acteurs particuliers de la liturgie : le livre de l'hebdomadier, et surtout le pontifical.

Cette exploration méthodique et didactique dans la complexité (évolutions des usages et des types de manuscrits, structure et particularismes) d'un univers lié à la pratique spirituelle a eu un très grand succès auprès de ses auditeurs. Elle restera un moment clef dans la formation continue des membres des Fasti, éléments chevronnés et débutants, qui pourront, lorsque l'occasion le requerra, se reporter aux fascicules récapitulatifs préparés par Jean-Baptiste Lebigue , et aux tout aussi précieux fascicules d'exercices corrigés (analyse de cinquante deux documents conservés dans les BM de France). Ces fascicules devraient prochainement être consultables sur le site de l'IRHT.

 

24 février 2006 : Les Fasti Ecclesiae Portugaliae en salle Perroy : présentation du SIEP

Cette journée des Fasti a trouvé un prolongement dans la matinée du 23 février, avec l'invitation en salle Perroy par Hélène Millet d'Ana Maria Rodrigues , Pedro Henriques et Sandra Cristina Lopes venus présenter une réalisation de l'équipe des Fasti Ecclesiae Portugaliae , le Système d'Information pour l'Etude Prosopographique (SIEP).

Hélène Millet commence par présenter l'équipe et les dimensions du projet : l'Eglise portugaise dont on commence à parler à partir de 1071 comporte neuf diocèses. Le projet mis en place en 2002 pouvait donc se permettre des exigences autrement plus fines que celles des Fasti Ecclesiae Gallicanae . Les travaux prosopographiques des Fasti portugais intéressent la période 1071 - 1500 : ils ont été projetés en deux phases, autour d'un terminus ad quem programmé pour fin 2006, autour de la fin du règne de Denis I er de Portugal (+ 1325), terminus a quo pour la prochaine campagne de recherches. Les fonds documentaires locaux sont infiniment plus riches que ceux conservés en France. A Braga les fonds sont prodigieux, mais il n'y a pas d'équivalent de nos inventaires sommaires pour ces archives. Ainsi, derrière l'homonymie des deux équipes de Fasti , la philosophie des projets diffère sensiblement.

Le Système d'Information pour l'Etude Prosopographique se décline en

Le SIEP est une application en HTML dynamique (Php + MySQL). Les boursiers qui vont recueillir les données en archives disposent sur leur portable du module SAL. Au terme de chaque campagne de dépouillement, ils transfèrent, sous forme de fichier texte via une connexion internet, les données recueillies au Système Central qui les ingère. Pour chaque diocèse, un responsable s'occupe alors de normaliser les informations et de recouper toutes les fiches concernant un même individu. Plus d'informations peuvent être trouvées à l'adresse suivante : http://www.fasti.ucp.pt/

Les chefs de projet nous ont fait découvrir le fonctionnement de cette base, la composition des fiches individuelles : ordres sacrés, dispenses, expectatives, concessions de bénéfices, collations de bénéfices (investiture), fonctions, formation universitaire, ouvrages, parentèles, dépendants, offices, biens, dernières volontés.

La discussion s'est ensuite poursuivie par un échange fructueux autour notamment du travail de Stéphane Raux, développeur de la base cumulative des Fasti et de l'opération Charles VI .

  • quatre processus : cueillette des données, normalisation, analyse, divulgation ;
  • deux composantes :
    • SAL : Système d'Aquisition Local ;
    • SC : Système Central de traitement et d'extraction des connaissances ;
  • deux bases de données :
    • BDD, Base de Données des Documents, comportant pour chaque document (un manuscrit, une sentence, un testament, une nomination à un canonicat etc.) une brève analyse ;
    • une Base de Données Prosopographique contenant la liste des membres du clergé cathédral et une table de liaison faisant le lien avec chaque document intéressant chacun de ces individus.

Compte rendu de la réunion de l'équipe des Fasti du 3 juillet 2000

 

Informations générales

La réunion du 3 juillet dernier se tenait exceptionnellement aux Archives Nationales à Paris où nous avons été accueillis par Bruno Galland qui a rappelé les liens étroits qui ont uni, dès l’origine, les Archives Nationales et Départementales de France à l’équipe des Fasti. Hélène Millet a ajouté, dans ses mots de remerciement, que l’enquête menée auprès des Archives Départementales lors du démarrage de l’entreprise des Fasti avait obtenu 70 % de réponses et que l’aboutissement le plus achevé de cette collaboration était le travail d’Henri Hours sur le diocèse de Besançon.

Le groupe de recherche Gerson organise les 28-29 septembre 2001 un colloque international à Orléans sur le thème des sources religieuses, en forme de bilan des travaux effectués par le groupe depuis sa création. L’équipe des Fasti y aura 1 heure et demie de parole pour présenter ses recherches. Ce colloque sera accompagné d’une école d’été à Saint-Etienne plus particulièrement destinée aux doctorants, sur le même thème, à la fin du mois d’août 2001.

En ce qui concerne les Fasti, le CD-Rom destiné à rassembler tous les volumes avance à grands pas. La base de données Access qui cumule toutes les informations contenues dans les volumes édités à ce jour, offre les notices de 4221 individus dont 128 appartiennent à plusieurs diocèses. Dans la perspective de ce cumul des données, il faudra désormais préciser, dans le champ "offices", dans quel diocèse l’office a été exercé. Même chose pour les références bibliographiques : il faut préciser dans quelles archives départementales sont conservées les sources ou dans quelle bibliothèque municipale.

Les abréviations subissent aussi quelques modifications :

  • pour les fichiers d’Avignon, supprimer l’abréviation gr qui renvoyait aux lettres communes de Grégoire XI. Noter désormais LC GXI comme pour les autres lettres pontificales.
    Supprimer l’abréviation u qui renvoyait aux suppliques d’Urbain V et noter Sup 32, 4356, 32 étant le numéro du volume et 4356, le numéro d’enregistrement par l’équipe d’Avignon.
  • pour les autres suppliques, noter Sup 87 f°56, 87 étant le numéro du volume et 56 le numéro du folio.

Enfin, Vat est à remplacer par ASV (Archivio Segreto Vaticano) pour ne pas être confondu avec la Bibliothèque Vaticane.

La consultation du CD-Rom permettra l’accès aux notices écrites en clair, à la notice d’un individu mais aussi à une population triée en fonction d’un ou de plusieurs critères de choix. La maison Brepols estime que le CD-Rom pourra voir le jour quand 8 volumes auront été réalisés ce qui porte le délai à 6 ou 8 mois.

Notice institutionnelle du diocèse d’Orléans, par Charles Vulliez

Avec 275 paroisses, le diocèse d’Orléans est modeste en superficie. Il comprenait cinq archidiaconés à l’époque médiévale dont la liste la plus ancienne date de 1021 : Pithiviers, Sully, Sologne, Beaugency, Beauce. Sa situation est néanmoins intéressante car il fut souvent touché par les collations pontificales et royales si bien que la circulation des personnes y était intense. Cela était encore accentué par le fait que la ville d’Orléans abritait une université depuis le deuxième tiers du XIIIème siècle.

Les sources sur le diocèse d’Orléans ont souffert de graves destructions à l’époque moderne et encore à l’époque contemporaine. La majorité des archives qui subsistent ont survécu grâce aux copies et aux éditions du XIXème siècle. A signaler néanmoins un registre de réception des chanoines et de conclusions capitulaires couvrant les années 1444-1479. Etant donné l’état actuel des sources, une grande partie du chapitre cathédral d’Orléans peut être reconstituée pour le XIIIème siècle, ce qui sera beaucoup plus difficile pour la période 1330-1440.

Les prébendes du chapitre tombaient donc souvent sous le coup de la régale temporelle et spirituelle et beaucoup des membres de l’entourage royal furent chanoines d’Orléans. Il semble que la non résidence ait été un problème majeur au XIVème siècle si bien que les chapelains puis les chanoines dits " mamertins ", non capitulants, furent créés pour suppléer les défaillants. Le nombre des prébendes fut fluctuant pour atteindre celui de 56,5 prébendes au XVème siècle. Malgré la proximité de l’université de droit civil, il ne reste que 300 manuscrits de la bibliothèque du chapitre, conservés à la Bibliothèque municipale d’Orléans.

 

La bibliothèque d’un chanoine humaniste, par Anne-Marie Chagny-Sève et Geneviève Hasenohr

Roger Benoiton fut chanoine de Clermont au XVème siècle. Berrichon d’origine, il fit des études de droit à Orléans et arriva à Clermont vers 1435, grâce à l’évêque d’alors, Martin Gouge, qui en fit son secrétaire. Il cumula d’autres prébendes, à Bourges, à Chartres mais c’est à Clermont qu’il s’installa véritablement puisque sa famille habitait la ville, qu’il était aussi chanoine de Notre-Dame du Port, qu’il acquit patiemment un solide patrimoine en Auvergne et qu’il remplit diverses fonctions au chapitre cathédral dont il s’acquitta avec méticulosité. Car Roger Benoiton était un esprit remarquable, ce qui lui valut d’être notaire et secrétaire du roi de 1440 à 1461 environ et ce qui explique la richesse de sa bibliothèque dont on a conservé l’inventaire dans un gros registre rédigé par lui et destiné à faciliter la gestion de ses biens, de toute nature.

Les quatre folios qui contiennent cet inventaire représentent une source exceptionnelle. Ils nous apprennent que Roger possédait 270 volumes ce qui apparente sa bibliothèque à celle d’un prince comme Charles d’Orléans, alors que le nombre moyen de livres possédé par un chanoine au XVème siècle oscille entre 5 et 30. Le classement des livres par discipline montre que Roger avait une prédilection pour le droit canon et pour la théologie mais qu’il s’intéressait aussi à tous les autres grands champs intellectuels de l’époque. Cette curiosité se doublait d’un goût prononcé pour le livre lui-même. Il possédait une trentaine d’incunables et, caractère remarquable, il s’agit souvent des éditions les plus précoces ce qui laisse supposer qu’il était en contact étroit avec le milieu des imprimeurs parisiens mais aussi provinciaux et étrangers dont les réseaux de diffusion fonctionnaient très bien pour approvisionner ainsi une bibliothèque clermontoise. Son intérêt pour les poètes classiques, les auteurs italiens contemporains et les ouvrages de pastorale permet de le situer parmi les humanistes, au meilleur sens du terme.

Notice institutionnelle du diocèse de Mende, par Philippe Maurice

Le diocèse de Mende, dans le pays de Gévaudan, est un petit diocèse de 197 paroisses environ. C’est l’évêque de Mende, comme comte du Gévaudan qui est le plus grand propriétaire foncier, en pariage avec le roi de France depuis 1307. La cathédrale est dédiée à Notre-Dame et à saint Privat, premier évêque du lieu. Le chapitre cathédral, lui aussi très possessionné dans la région, suit la règle de saint Augustin depuis 1123, avec pratique de la vie commune jusqu’en 1222. C’est un petit chapitre de 15 prébendes où la collégialité est souvent de règle pour l’exercice des dignités et l’unanimité pour l’élection de l’évêque quand le pape ou le roi ne s’emmêlent pas. La cathédrale abrite aussi une communauté de clercs et de prêtres appelés choriers, fort nombreux comme souvent dans cette partie de la France, qui a une existence autonome malgré sa soumission au chapitre. Cette communauté possédait une bibliothèque qui complète celle du chapitre (de 140 volumes en 1380) mais aussi celle du collège de Tous Les Saints et celle de la chapelle Saint-Vincent qui avait 60 livres en 1483, conservées dans le cloître, dans le clocher et aussi dans la cathédrale.

Si la reconstitution du quartier canonial s’avère difficile du fait de la destruction de la cathédrale au XVIème siècle et de l’absence de fouilles archéologiques sérieuses, le diocèse de Mende nous apprendra beaucoup au sujet de la conservation des reliques, ouvrant la voie à de semblables études pour d’autres diocèses. Ces études pourront porter sur les donateurs des reliques et des reliquaires (dont Urbain V à Mende), sur le rapport entre les reliques conservées et le degré de sollenité des fêtes dans le calendrier liturgique du diocèse.

Notice institutionnelle de Montauban, par Emmanuel Moureau

Le diocèse de Montauban doit sa création tardive au pape Jean XXII en 1318. C’est l’abbaye Saint-Théodard qui devient alors le chapitre cathédral. L’organisation de ce chapitre est connue en détail pour le XVème siècle grâce à une source exceptionnelle constituée par une enquête réalisée en juin 1447 dans le but de réformer le chapitre. Menant une vie régulière jusqu’en 1524, le chapitre s’organise en 5 grands groupes : les administrateurs et responsables que sont l’évêque, le prieur-mage et le prieur caustral, les officiers au nombre de 5 (camérier, infirmier, sacriste, chantre, aumônier), les prieurs bénéficiers issus d’établissements ecclésiastiques voisins (Saint-Martial, Albefeuille, Saint-Pierre de Campredon, Montalzat et Saint-Jacques de Montauban), les moines claustraux qui étaient 20 à la fin du XIVème siècle puis 10 et enfin, les donats, oblats et convers. Il y avait une enceinte canoniale autour de la cathédrale Saint-Théodard jusqu’en 1561, date où celle-ci fut rasée et chaque chanoine y avait une maison dès 1320. Ce quartier a été fouillé en 1909 mais il n’en reste que peu de vestiges.

Présentation des fonds utiles aux Fasti, par Bruno Galland

Les Archives Nationales ont été constituées à la Révolution par deux grands fonds : les archives centrales de l’Etat et des organismes nationaux et les fonds concernant la ville et la région de Paris si bien que l’on y trouve, pour les établissements ecclésiastiques parisiens, des sources équivalentes à celles qui sont classées dans les séries G et H au sein des Archives Départementales. Cette masse fut classée par nature d’informations et chaque série ainsi constituée (documents législatifs, domaniaux, judiciaires, administratifs, etc ...) reçut une lettre de l’alphabet pour les liasses et une double lettre pour les registres. Beaucoup de fonds homogènes furent ainsi dispersés et c’est particulièrement vrai pour les chartriers d’églises et d’abbayes.

 

Sont utiles pour les travaux concernant les Fasti les séries J, JJ, L et LL. La série J, appelée aussi " trésor des chartes ", renferme toutes les archives des rois de France dont certaines, d’intérêt national, sont classées par régions. D’autres sous-séries, toujours en J, sont appelées " mélanges " et contiennent beaucoup de pièces sur des problèmes bénéficiaux : élections d’évêques, fondation, collation, régale, etc ... Les registres JJ sont les registres de chancellerie où beaucoup de chanoines peuvent apparaître à différents titres.

La série L concerne les " monuments ecclésiastiques ". Plusieurs cartons sont regroupés sous le titre d’archevêchés et évêchés, classés par ordre alphabétique et contiennent surtout des notes d’érudits et des copies qui peuvent compléter l’étude d’un chapitre, après le dépouillement des archives locales. La série LL contient, quant à elle, quelques pièces issues de certains chapitres comme des cartulaires mais souvent copiées à l’époque moderne.

Avant toute recherche, il faut consulter deux volumes : l’Etat général des Fonds des Archives Nationales et l’Etat des inventaires, disponibles dans la salle des inventaires du CARAN et progressivement sur le site des Archives sur Internet.

Ce compte rendu a été rédigé par Anne Hubert.

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Contenu du volume :

  • 477 pages.
  • 881 notices prosopographiques.
  • 23 biographies d'évêques.

Ce volume comprend en outre une carte du diocèse, ainsi qu'une note sur le quartier des cathédrales, une présentation par Claire Maître de la très ancienne et très riche bibliothèque du chapître d'Autun et une étude par Brigitte Maurice-Chabard des rénovations et aménagements liturgiques dont a été l'objet la cathédrale Saint-Lazare à la fin du Moyen-Age.

 

Diocèse d'Autun : note liminaire, par Hélène Millet

La parution du douzième volume de la collection Fasti Ecclesiae Gallicanae clôt une époque et en ouvre une autre. L'équipe qui a pris ma succession pour diriger le programme a en effet superbement assuré le relais puisque le Diocèse d'Autun paraît moins d'un an après son entrée en fonctions et démontre ainsi pleinement son efficacité. Le travail de recherche effectué par Jacques Madignier témoigne en revanche des longs efforts qu'il faut fournir avant de pouvoir prétendre publier.

Le DEA que ce professeur dans l'enseignement secondaire a présenté à l'Université de Bourgogne en 1995 portait encore les traces de ses premiers travaux sur la mort, entrepris dans le sillage de Georges Duby, et finalement abandonnés pour le plus grand bénéfice de la recherche canoniale. Sur les conseils de Vincent Tabbagh, Jacques Madignier est passé du nécrologe autunois au chapitre et aux chanoines qui l'avaient composé, prenant alors pour cadre chronologique de sa thèse une longue période de quatre siècles s'achevant à la fin du XIVe siècle.

Comme chacun sait, le métier d'enseignant exige de gros investissements en énergie de la part de ceux qui l'exercent; la persévérance dont a fait preuve Jacques Madignier est donc en elle-même un tour de force, dont il se plaît à dire qu'il fut favorisé par son entrée dans le groupe des Fasti. Mais il est juste aussi de saluer la passion dont il est habité et dont nous avons été les témoins lors de divers exposés présentés aux réunions bisannuelles du groupe. Nous avons un souvenir particulièrement vif de cette séance sur la gestion de leurs vignes par les chanoines d'Autun, qui s'est achevée par une dégustation de vin du Clos des chanoines. Heureuse Bourgogne !

À l'automne 2007 enfin, Jacques Madignier est devenu docteur en histoire à l'issue d'une belle soutenance. Fort de ce succès, il s'est immédiatement lancé dans la préparation du volume d'Autun. Cela supposait en premier lieu de prolonger les recherches dans les archives du XVe siècle ainsi que l'exige le contrat chronologique de la collection. Jacques Madignier s'est acquitté de cette tâche tout en constituant sa base de données et en s'assurant de collaborations pour la rédaction des chapitres préliminaires. Les beaux vestiges du prestigieux passé d'Autun nous sont parvenus en nombre et ont retenu l'attention des chercheurs. Grâce aux contributions de Claire Maître pour la bibliothèque capitulaire, de Brigitte Maurice-Chabard pour les aménagements de la cathédrale Saint-Lazare, nous pouvons restituer les chanoines dans leur contexte patrimonial.

Parmi les membres des Fasti, Jacques Madignier a aussi bénéficié d'aides variées, que ce soit pour la collecte des informations, pour l'interprétation des sources ou pour la mise en forme des résultats. Il m'a prié d'être son interprète pour que soient publiquement remerciés ceux grâce auxquels le volume d'informations s'est accru de renseignements récoltés hors des archives autunoises, et particulièrement Janine Mathieu et Laurent Vallière pour les archives pontificales, ainsi que Pierre Desportes, Pascal Montaubin et Amandine Le Roux. Grâce à Yves Esquieu, il a pu rendre leur cohérence aux nombreuses observations archéologiques que son inlassable curiosité pour les bâtiments et les lieux l'avait poussées à rassembler et il a trouvé en Hugues Labarthe l'expert en géographie historique par qui ses cartes et ses schémas, déjà fort aboutis, sont devenus des modèles pour les futurs volumes de la collection.

Pour l'achèvement du livre, Jacques Madignier a pu compter sur les services de la nouvelle équipe mise en place pour relayer les retraitées. La fabrication de la première partie a été terminée par Giliane Thibault, secrétaire du CERHIO-Angers (UMR 6258), qui prend ainsi la succession d'Irmine Martin à qui les Fasti doivent la mise en page de tous les précédents volumes de la collection. Le maître d'oeuvre des chapitres préliminaires est désormais Jean-Michel Matz, rompu à l'art de repérer les bévues aussi bien scientifiques que rédactionnelles. Quant aux données prosopographiques, elles sont contrôlées par Vincent Tabbagh à toutes les phases de leur élaboration, tant au niveau de leur saisie que pour la qualité de leur édition. Après avoir éprouvé les vertus de patience de son directeur de thèse, Jacques Madignier a ainsi pu se frotter à son aimable rigueur et faire son profit des remarques que lui inspirent son expérience et son érudition, avec une inlassable générosité.

Avec ce douzième volume, les Fasti font leur première percée dans la province ecclésiastique de Lyon. La mosaïque destinée à couvrir toute la France commence à se dessiner. La base de données compte actuellement plus de 13 500 notices et l'arrivée de jeunes chercheurs fait espérer que les vides vont peu à peu être comblés. Sylvette Guilbert entre dans la phase des finitions pour le diocèse de Châlons-en-Champagne. Quant à la base cumulative, elle requiert encore trop d'ajustements et de relectures pour que soit précisément annoncée son ouverture au public. J'aurais aimé quitter la direction du programme avec la satisfaction d'avoir franchi ce nouveau cap. Le diocèse d'Autun aura permis à mes successeurs de prouver qu'ils sauront faire mieux et plus vite tout ce que j'avais rêvé d'accomplir. Ce sont eux qui prendront la plume pour rédiger la «note liminaire» du prochain volume à paraître.

Paris, le 3 juillet 2010, Hélène Millet, ancien directeur du programme.

 
 

Extraits du volume concernant le diocèse d'Autun

Jean I Rolin, évêque d'Autun

Johannes Rolini, n°628

(20 août 1436-†1er juillet 1483)

1 - Il était né en 1408 de Nicolas Rolin, alors avocat au Parlement et futur chancelier de Bourgogne et de sa seconde femme, Marie des Landes, fille d'un bourgeois de Paris. Il appartenait à la grande bourgeoisie de service dont le duc de Bourgogne avait fait la fortune. Son frère Guillaume, seigneur de Beauchamp, épousa Marie de Levis-Cousan. On lui connaît cinq enfants naturels, dont Pierre, protonotaire apostolique, Sébastien qui fut seigneur de Chaseul, Brion et Laisy, et Jeanne qu'il eut tous trois de Jeanne de Gouy, une demoiselle, et qu'il fit légitimer en 1464 par le duc de Bourgogne. Jean, le fils qu'il eut d'une religieuse d'Avignon, Raymonde de Roussy, fut légitimé par le roi en 1485 et devint à son tour évêque d'Autun (629). Un autre fils, Blaise, naquit d'Alexie Renier.

2 - L'administration ducale, influencée par l'italianisme à la mode auprès du duc, lui offrit la possibilité de se rendre à l'Université de Bologne. En 1428, il était inscrit sur la liste des docteurs en droit civil. De retour en France, il fréquenta l'Université de Paris où il devint bachelier et licencié en décret. Il quitta Paris pour Louvain où on découvre avec étonnement qu'il acquit de nouveau le grade de licencié en lois. C'est peut-être là qu'il prit aussi le grade de docteur en décret.

3 - Sa carrière bénéficiale commença alors qu'il était encore très jeune. Il avait à peine une dizaine d'années lorsque son père convoita déjà pour lui une prébende de l'église Saint-Quiriace de Provins. Par deux bulles fulminées le 19 juillet 1421, mais datées du ler février 1418 à Constance, Martin V lui conféra un bénéfice venant à vaquer à la nomination soit de Saint-Étienne soit de Saint-Bénigne de Dijon, alors qu'il était curé d'Étaules. C'est aussi sur l'intervention de son père qu'il devint dès 1422 chanoine de Besançon, dès 1426, chanoine de Saint-Géry de Cambrai et chanoine d'Autun. En 1427 il accéda à l'archidiaconat d'Autun à la place de Ferry de Grancey. Il n'avait alors que vingt ans. En 1430, il obtint une prébende à Langres. C'est encore grâce à son père qu'il reçut avant 1431 le titre de protonotaire apostolique. En 1431 il fut élu au siège de Chalon-sur- Saône et dans les mois qui suivirent il devint prieur de Saint-Marcel de Chalon et archidiacre de Valenciennes au diocèse de Cambrai.

4 - Il fut nommé sur le siège d'Autun le 20 août 1436 par le pape Eugène IV sur intervention du duc Philippe le Bon. La lettre de congratulation que ce dernier envoya le 25 septembre 1437 à Nicolas Rolin ne laisse aucun doute sur le rôle joué par l'influence ducale. Son entrée solennelle eut lieu le 21 janvier 1438. Il dut réclamer le pallium que le pape avait omis de lui remettre et pour justifier de ce privilège, il dut produire copies et extraits d'actes. Le pallium lui fut remis par Nicolas V en 1448.

5 - Sa présence à Autun fut finalement assez soutenue, malgré ses séjours réguliers à Beaune, Dijon, Avignon et Paris où il vécut les dernières années de sa vie. À Autun même il résidait dans une maison du cloître, mais il fréquentait plus régulièrement les domaines de Thoisy et Lucenay et les demeures épiscopales dans lesquelles il fit réaliser des nombreux travaux d'aménagement. Son souci d'une gestion modernisée du temporel épiscopal conduisit à la rédaction de terriers et à la remise en état des cartulaires. Suivant les recommandations du concile de Bâle, il encadra avec beaucoup de régularité les pratiques du clergé et des fidèles. Il semble avoir tenu assez régulièrement, de 1448 à 1483, les deux synodes annuels et il fit rédiger de nouveaux statuts synodaux (les premiers avant 1449, les seconds en 1468). Il encouragea l'organisation de méparts, c'est-à-dire de communautés organisées de prêtres d'une paroisse très unportante à Marcigny, à Paray-le-Monial en 1451, à Arnay-le-Duc en 1472. En 1459, il consentit à l'union des léproseries et hôpitaux du lieu avec le mépart de Flavigny qui avait été fondé en 1456 par Quentin Ménard, archevêque de Besançon, natif du lieu. En revanche ses visites pastorales furent peu nombreuses; les seules qu'il consentit furent des visites d'ordination de clercs qui symbolisaient davantage son autorité sur le clergé.Ses orientations politiques étaient bien plutôt relayées par le reseau de ses proches et par les archidiacres issus de son lignage. Les rapports avec les chanoines du chapitre cathédral furent relativement cordiaux. Il arbitra en leur faveur l'affaire des reliques de Lazare que la collégiale d'Avallon prétendait posséder; il se rendit même en visite à Avallon pour tenter de les récupérer. De la même façon, il défendit les intérêts du chapitre cathédral menacé de perdre le patronage de l'église Notre-Dame par l'érection dans cette église d'un collège séculier à la demande de Nicolas Rolin son père; dans ce cas précis, il n'hésita pas à dénoncer les agissements de son frère Guillaume à qui avait été confiée la collégiale ... et à qui avait été légué l'hôtel familial sis dans la ville épiscopale. Toutefois cela n'empêcha pas les chanoines, lassés des inconduites et des malversations du prélat, de le rappeler à l'ordre. Il institua dans sa cathédrale la fête de tous les saints évêques d'Autun à célébrer une fois par an, le dimanche suivant la fête de saint Denis. À la collégiale de Beaune, il fonda un office solennel de saint Lazare et celui de saint Vincent le 22 janvier. Il sut particulièrement bien s'entourer, notamment avec Ferry de Clugny (292), futur évêque de Tournai et cardinal.

6 - Jean Rolin parvint sur le siège de Chalon puis d'Autun sans véritable passage dans l'administration princière. Le fait d'appartenir à une puissante famille le dispensait peut-être d'une telle expérience. En 1437, il participa au concile de Bâle en compagnie de l'évêque de Chalon. Il faut attendre son retour de Bâle pour le voir qualifié de conseiller du duc de Bourgogne. Finalement il fréquenta peu la cour ducale et ne participa guère aux ambassades, si ce n'est à celle de 1459 qui le conduisit à Mantoue auprès du pape pour représenter Philippe le Bon dans la préparation d'une éventuelle croisade contre les Turcs. Il était un ardent défenseur de la politique ducale à tel point que la disparition de Charles le Téméraire le conduisit à préférer un temps Rome. Contrairement aux évêques promus par le roi, il était très attaché à la conception centralisée de l'Église. Son accession au cardinalat ne fit que renforcer cette tendance. En février 1444, Jean Rolin dut assurer la régale du siège de Lyon. À cet effet, il envoya une délégation de quatre vicaires qui cessa, moins de deux ans plus tard, à l'élection du nouvel archevêque Charles de Bourbon. À la fin de sa vie, par réalisme politique, il se rapprocha du roi.

7 - C'est sans doute sur la demande de Philippe le Bon que le nouveau pape Nicolas V promut, le 20 décembre 1448, Jean Rolin cardinal prêtre de San Stefano in Coelo Monte. À partir de là, s'ouvrirent pour lui de nouvelles perspectives pour une carrière bénéficiale. Dès 1449, il était fait prieur de Saint-Martin de Cambrai; en 1451, prieur d'Anzy-le-Duc (diocèse d'Autun); de 1456 à 1471, abbé de Baleme (diocèse de Saint- Claude); de 1461 à 1468, il assura le patronage de l'Hôtel-Dieu de Beaune; en 1462, il devint abbé de Saint-Martin (diocèse d'Autun); en 1469, abbé de Flavigny (diocèse d'Autun), abbé d'Oigny (diocèse de Langres); en 1474, chanoine de Beaune (diocèse d'Autun). Il fut également abbé commendataire de l'abbaye cistercienne de Bellevaux (diocèse de Besançon).

8 - Poursuivant la politique de mécénat inaugurée par son père, Jean Rolin fit étalage d'une très grande générosité alliée à un faste ignoré jusque-là à Autun. Il transforma totalement la cathédrale Saint-Lazare frappée par la foudre en 1469. Les absides romanes endommagées furent reconstruites en style gothique; sur la tour carrée du transept fut édifiée une longue pointe de pierre. L'intérieur fut remanié avec la construction d'un jubé et d'une tribune d'orgue. Il dota aussi la cathédrale d'un somptueux ensemble de livres liturgiques enluminés qui fut conservé dans le trésor du chapitre. Son mécénat ne s'arrêta pas à l'église-mère d'Autun et s'étendit à toutes les églises qu'il plaça sous sa protection. À Saint-Symphorien où il était prieur, il fit déposer les reliques du saint et de ses parents dans une nouvelle châsse; à Saint-Martin, il fit transférer le tombeau de Brunehaut de la crypte au bas-côté de la nef; pour la collégiale Notre-Dame de Beaune, il commanda une vaste tapisserie relative à la vie de la Vierge qui ne fut livrée qu'en 1500 par le chanoine Hugues Le Coq (481). Partout il multiplia les fondations de chapelles: à Saint-Lazare, il fonda en 1453 la chapelle dédiée à saint Vincent dans le collatéral ouest, la chapelle Sainte-Geneviève dans le collatéral est; à Saint-Andoche de Saulieu, il édifia la chapelle qui fait aujourd'hui office de sacristie. Pour financer ce large mécénat, il fit appel à ses biens propres, mais surtout à la fiscalité épiscopale qui multiplia les subsides, les dons gratuits et les prélèvements casuels sur le clergé. Jean Rolin fut aussi un grand amateur de livres, enthousiasmé par l'Humanisme et l'imprimerie. Lors de son installation à Paris, il apporta avec lui une partie des livres qu'il avait rassemblés dans sa demeure d'Autun. Il fut un généreux donateur de livres dont furent gratifiées de nombreuses institutions religieuses, au premier rang desquelles le chapitre cathédral d'Autun. Il se montra aussi très généreux envers deux établissements parisiens, l'abbaye Sainte- Geneviève et le couvent des Carmes de la place Maubert.

9 - Le cardinal évêque décéda d'une longue maladie. Officiellement il s'éteignit à Cravant près d'Auxerre le 1er juillet 1483. Plus vraisemblablement, il mourut à Paris. Dans ses ultimes volontés, il choisit à Autun trois lieux de sépulture: la collégiale Notre-Dame, l'abbaye Saint- Martin et la cathédrale Saint-Lazare. Son corps, ramené à Autun, fut enseveli à Saint-Lazare, à gauche du maître-autel. Un tombeau de coeur fut placé dans la chapelle Sainte-Apolline du jubé qu'il avait fait édifier. Il avait fondé un anniversaire à la collégiale de Vergy dans son diocèse. Son obit à Sainte-Geneviève de Paris était célébré le 6 mai. Il avait fait également une fondation aux Célestins de Paris pour qu'un de ses frères prie pour lui à perpétuité. Membre de la grande confrérie aux prêtres et aux bourgeois de Paris, il avait fondé dans la capitale, pour ses parents, un obit solennel à Saint-Germain-l'Auxerrois.

10 - Son portrait figure sur la Nativité peinte à la fin du XVe siècle par Jean Hey. Il y est représenté, agenouillé, tête nue, dans la pourpre cardinalice, les épaules recouvertes d'hermine.

11 - Sceau: grand sceau elliptique. Sous une décoration architectonique figurant trois niches, trois saints; à droite et à gauche, saint Nazaire et saint Celse; au centre, à cause du titre de cardinal, saint Étienne vêtu de la dalmatique et la tête surmontée des deux bosses de son martyr. Au dessus la Vierge tenant l'Enfant Jésus accostée de deux anges à genoux. En bas dans une petite niche, un évêque en costume pontifical accosté de chaque côté de l'écu des Rolin surmonté du chapeau.

LÉGENDE: JOHANNIS ROLINI CARDINALIS ET EPI(SCOPI) EDUEN(SIS)

Armoiries: elles figurent à droite du même tableau. Écu coiffé du chapeau de cardinal, écartelé aux 1 et 4 d'azur à trois clefs d'or posées en pal, aux 2 et 3 d'argent à la bande azur chargée en chef d'une pie d'argent becquée et membrée de gueules. Sa devise: Deum time.

B8546

AD Côte d'Or, B 11195 et 11196 (légitimation de ses enfants), G 147.

AD Saône-et-Loire, G 544/1 ; 2 G 52, 54, 59; 5 G 68, 1452, 1477, 1478 (fondation de messes et anniversaires).

Obituaires de la province de Sens, t. I, p. 500, 729, 848.

Ph. GAGNARE, Histoire de l'Église d'Autun, Autun, 1776, n° 76, p. 167 et ss.

Gallia christiana, t. IV, col. 419-420.

K. EUBEL, Hierarchia catholica Medii AEvi, t. II, p. 11 et 80.

Abbé BOULLEMIER, J. d'ARBAUMONT, « Nicolas Rolin, chancelier de Bourgogne. Notice historique sur sa famille », Revue nobiliaire, t. 3, 1865,53 p.

A. DELANNE, « Un des fils de Nicolas Rolin, chanoine de Langres », Congrès de l'association bourguignonne des sociétés savantes, Beaune, t. 9, 1932,p. 51-52.

J. RÉGNIER, Les évêques d'Autun, Autun, 1988, p. 129-136.

H. DE FONTENAY, Essai sur les sceaux et armoiries des évêques d'Autun, Angers, 1867, p. 10-11.

A. DE CHARMASSE, « Notes sur l'inventaire des livres liturgiques donnés à l'église Notre-Dame d'Autun par Nicolas Rolin, chancelier de Bourgogne», Mémoires de la Société éduenne, t. 33, 1909, p. 286.

Regards sur les manuscrits d'Autun (VIe-XVIIIe), publication de l'IRHT et de la ville d'Autun, 1995,p.129-145.

S. CASSAGNES-BROUQUET,« Le cardinal Rolin, un mécénat fastueux », Hommes d'Église et pouvoirs à l'époque bourguignonne (XIVe- XVe siècles), Publication du Centre européen d'études bourguignonnes, n° 38, 1998, p. 169-185.

B. MAURlCE-CHABARDL, la splendeur des Rolin. Un mécénat privé à la cour de Bourgogne, Paris, 1999.

I. GUYOT-BACHY,« L'inventaire des livres de Jean Rolin trouvés en son hôtel parisien en 1483 », La Splendeur des Rolin. Un mécénat privé à la cour de Bourgogne, Paris, 1999, p. 249-250.

V. TABBAGH, « Les évêques du royaume de France en 1438 », Gens d'Église, gens de pouvoir (France XIIIe-XVe siècles), Dijon, 2006, p. 87- 186.

J.-P. BRELAUD, Les chanoines de la collégiale Notre-Dame de Beaune au XVe siècle, mémoire de Maîtrise d'histoire, Université de Bourgogne, 1997, t. II, p. 96, n° 23l.

D. LANNAUD, Les évêques des diocèses bourguignons à la fin du Moyen Âge, thèse de doctorat, Université de Bourgogne, 2007.

S. STELLING-MICHAUD«, La nation de Bourgogne à l'université de Bologne du XIIIe au XVe siècle », MSHDB, t. 17, 1956, p. 7-43.

F. JOUBERT,« Tel un prince en son diocèse, Jean Rolin, cardinal-évêque d'Autun », L'artiste et le clerc. Commandes artistiques des grands ecclésiastiques à la fin du Moyen Âge (XIVe-XVIe siècles) , Paris, 2006 (Culture et civilisation médiévale, 36), p. 105-182.

 

Extraits du volume concernant le diocèse d'Autun

Jean II Rolin, évêque d'Autun

Johannes II Rolini, n°629

(8 juin 1500-†4 août 1501)

1 - La tradition ecclésiastique autunoise l'a longtemps prétendu fils du frère cadet du cardinal, Antoine Rolin, seigneur d'Aymeries et chambellan de Charles le Téméraire. La réalité est tout autre. Les lettres de légitimation accordées par le roi Charles VIII en 1485 témoignent de sa filiation: il était le fruit de la liaison que le cardinal Jean Rolin entretint de longues années avec Raymonde de Roussy, religieuse à Avignon.

2 - Sans doute fréquenta-t-il l'université de Paris, car en 1481, il dirigeait le collège de Navarre à Paris. Il portait le grade de docteur in utroque jure.

3 - Dans un premier temps, il mena une vie de gentilhomme introduit à la cour de Bourgogne. En 1472, il remporta le tournoi de Valenciennes organisé par Jean de Luxembourg pour la fête de la Toison d'Or. En 1473, il était mentionné comme conseiller-clerc au Parlement de Malines Installé par Charles le Téméraire. Un peu avant 1480 sa vie bascula lorsqu'il fit le choix d'une carrière ecclésiastique. Cette nouvelle orientation s'inscrivait-elle dans une logique lignagère ou était-elle la volonté de racheter la faute de ses origines? Il est difficile de le dire même si dans son testament Jean II évoquait la faute de sa conception. Dès 1481, il benéficia de la résignation de son père pour devenir prieur de Saint- Marcel de Chalon et abbé de Saint-Martin d'Autun. En 1482, il obtenait une prébende à la collégiale de Beaune et le décanat de la collégiale de Semur-en-Brionnais. En 1484, c'est sur la recommandation du nouvel évêque Antoine de Chalon qu'il accéda au décanat d'Autun. Sa vie politique passa de la fidélité à la maison de Bourgogne au ralliement à la couronne et suivit intimement sa carrière bénéficiale. À la mort du Téméraire, il resta au service de Marguerite d'York, devint maître des requêtes du duc d'Autriche et apparut au côté de Marie de Bourgogne. En juin 1481, Maximilien et Marie le désignèrent comme leur ambassadeur à Rome avec Juste, évêque de Ceuta et Claude Carondelet, doyen de Besançon. Cela lui valut d'être nommé en 1481 protonotaire apostolique. Il continua de la même façon à participer régulièrement aux États de Bourgogne (1483, 1485, 1490, 1493). En 1484, les élus de Bourgogne le désignèrent comme ambassadeur auprès du roi ce qui lui permit un rapprochement avec la couronne: il devint alors conseiller du roi puis entra au Parlement de Paris; d'abord clerc-conseiller, il gravit rapidement les échelons en devenant président aux enquêtes puis en 1496 au plus tard président de la chambre des requêtes, ce qui lui permit d'obtenir du chapitre de Notre-Dame de Paris, quoiqu'il n'en fût pas membre, une maison du cloître. En 1494, il était à Lyon, l'un des procureurs de l'archevêque André d'Espinay.

4 - Son accession au siège d'Autun ne fut pas simple. Avant de mourir, Antoine de Chalon avait assuré Olivier de Vienne (693), chanoine de Lyon, de l'obtention du siège épiscopal et le candidat pouvait se prévaloir de l'appui du pape Alexandre VI. Toutefois les chanoines, qui n'avaient en aucun cas été consultés, saisirent les encouragements du roi de France Louis XII à ne pas respecter le marché passé et décidèrent de choisir librement leur évêque. Le 8 juin 1500, ils votèrent en faveur de leur doyen Jean Rolin, dont le roi avait suggéré le nom. En compensation Olivier de Vienne se vit offrir le décanat qu'il résigna très rapidement. Sa disparition prématurée permit un arrangement rapide. Le pape par une bulle de novembre 1500 porta provision de l'évêché d'Autun, vacant par la mort d'Olivier de Vienne en faveur de Jean II Rolin.

5 - Son mandat fut de très courte durée. En 1501, il reçut le pallium des mains de l'évêque de Chalon. Les comptes du chapitre cathédral attestent qu'il occupa la même maison du cloître durant son décanat et son épiscopat.

9 - Il mourut en août 1501, sans doute le 4. Dans ses dernières volontés, il demandait à être inhumé dans la cathédrale Saint-Lazare, dans la chapelle de la Sainte-Croix, située dans le bas-côté est, qu'il avait ensuite confiée au patronage de saint Martin. Il précisait de surcroît qu'il souhaitait des funérailles modestes, appelant à la protection de Lazare, demandant la participation de six enfants d'aube et de trente et un pauvres, requérant la prière des frères Mineurs récemment installés dans la cité éduenne. Il fondait anniversaire dans les monastères de la cité, à Saint-Martin, Saint- Symphorien et Saint-Andoche.

11 - Armoiries: d'azur à trois clefs d'or mises en pal avec la devise: Tibi soli (À toi seul).

AD Côte d'Or, B 85, fol. 5v.; B 289; B 2483, fol. 217v; B 2497, fol. 16r; B 4112, fol. 47v.

AD Saône-et-Loire, H supp. 5, abbaye Saint-Martin, testament de Jean Il Rolin. 5 G 311,5 G 312, 5 G 313.

AD Nord, B 345.

AD Rhône, 10 G 1377.

AN, LL 126, p. 435.

AN, LL 126, p. 435.

Ph. GAGNAIRE, Histoire de l'Église d'Autun, Autun, 1776, n°78.

K. EUBEL, Hierarchia catholica Medii AEvi, t. II, p. 81.

Gallia christiana,t. IV, col. 421.

J.RÉGNIER, Les évêques d'Autun, Autun, 1988, p. 139-140.

J. BILLlOUD, Les États du duché de Bourgogne jusqu'en 1498, Paris, 1911, p. 188,276-278.

E. MAUGIS, Histoire du Parlement de Paris de l'avènement des Valois à la mort d'Henri IV, Paris, 1913-1916, t. III, p. 117.

J.-P. BRELAUD, Les chanoines de la collégiale Notre-Dame de Beaune au XVe siècle, mémoire de Maîtrise d'histoire, Université de Bourgogne, 1997, t. II, p. 97, n° 232.

J.-B. DE VAIVRE, « La véritable origine de Jean II Rolin, évêque d'Autun », Mémoires de la Société éduenne, nouvelle série, t. 56, fasc. 3, 1999-2000, p.353-354.

D. LANNAUD, Les évêques des diocèses bourguignons à la fin du Moyen Âge, thèse de doctorat, Université de Bourgogne, 2007.

diocese autun

 

 

Compte rendu de la réunion de l'équipe des Fasti du 27 juin 2003

 

Informations Générales

Le tome 7 des Fasti, Diocèse d’Angers, par Jean-Michel Matz et François Comte est sous presse. Le tome 8, Diocèse de Mende par Philippe Maurice est en fin de préparation à Orléans. Le tome 9, Diocèse de Sées, attend la contribution de Jean-Pascal Foucher sur les bâtiments canoniaux pour prendre rang dans la filière.

De nouvelles procédures d’édition sont en cours d’élaboration par un informaticien de chez Brepols. Les premiers essais sont enthousiasmants, mais les finitions traînent en longueur. Les bases de données pourront bientôt être élaborées sous ACCESS sans que soient pour autant éliminées les possibilités de travailler sous Dbase ou sous 4D.

Henri Hours, qui devait nous présenter ses réflexions suite à ses travaux sur deux chapitres très dissemblables par les sources et les institutions (Besançon et Clermont), a dû renoncer à participer à notre réunion, la date des cérémonies d’inauguration des nouveaux dont il a la responsabilité à Clermont ayant été modifiée tardivement par son ministre de tutelle. Nous l’entendrons sur ce même sujet à la réunion d’hiver. Un exposé d’Hélène Millet nous a été proposé en remplacement en fin de séance.

Les doctorants désireux de mener des recherches à Rome peuvent candidater pour une bourse d’un mois auprès de l’École française de Rome ; leurs chances de succès seront encore accrues s’ils acceptent de travailler durant leur séjour environ 3 heures par jour à l’informatisation du fichier Lesellier, lequel peut aussi nourrir leurs propres recherches. Pour un séjour au second semestre 2004, dépôt des dossiers en mars (attestations à prévoir).

Plusieurs DEA ont été récemment soutenus sur des sujets qui intéressent directement l’équipe des Fasti :

  • Amandine Le Roux, Les collecteurs pontificaux dans le royaume de France (xive-xve siècles).
  • Sophie Vallery-Radot, Les participants français au concile de Constance.
  • Émilie Rosenblieh Les problèmes de juridiction ecclésiastique sous le concile de Bâle dans le diocèse de Paris.
  • Hugues Labarthe, Les choix des prélats de Gascogne face au Grand Schisme d’Occident.

Yann Dahhaoui remercie les personnes qui lui ont communiqué des renseignements sur la fête des fous.

Jean Chapelot, directeur de recherche au CNRS, souhaiterait promouvoir une rencontre sur les Saintes-Chapelles. Que les chercheurs intéressés se fassent connaître.

Le quartier canonial de Sens, par Denis Cailleaux

Cet exposé fait suite à la présentation de la notice institutionnelle sur le diocèse de Sens par Vincent Tabbagh l’hiver dernier.

Le quartier, développé sur le flanc nord d’un des premiers édifices gothiques, est entièrement clos, au nord par l’enceinte urbaine, ailleurs par une muraille interne à la ville. L’organisation du quartier subit peu de bouleversements jusqu’au xviiie siècle où il est éventré du nord au sud par la nouvelle route Paris-Lyon. Il est entouré par 5 portes, l’une correspondant à une porte de l’enceinte urbaine (la porte Saint-Antoine ou porte Gilon), les 4 autres étant des portes internes à la ville. Des portes secondaires ont été aménagées pendant la guerre de Cent ans, dont l’une permettait l’accès des gens et des soldats à la porte Saint-Antoine. À l'intérieur du quartier, ce n’est pas une seule rue qui s’étend mais un ensemble de rues et de ruelles, ainsi qu’une vaste place. Le tout représente un cinquième de la surface de la ville. Le quartier se trouve à l’intersection de deux artères majeures de la cité antique, puisque la cathédrale est située presque au centre de l’enceinte urbaine ovale édifiée au ive siècle. De ce fait, la fermeture périodique du quartier canonial oblige les Sénonais à faire des détours.

Pourtant, l’emplacement de ce quartier est quasiment vide pendant tout le Haut Moyen Âge. Les premiers édifices chrétiens se sont développés dans un faubourg à l’est de la ville (Saint-Savinien). A l’emplacement de la cathédrale devait exister un groupe épiscopal avec trois basiliques. Les fouilles ont révélé à cet endroit la présence de chrismes, de bains publics et de peignes en os. Vers 968, un incendie aurait permis une réorganisation du quartier, en attribuant aux chanoines les terrains au nord de la cathédrale et au palais épiscopal les terrains au sud. Quoi qu’il en soit, ce quartier n’est attesté de façon certaine par les sources que par un acte de 1132, une charte du roi Louis VI qui permet la création de murs et de fossés. Le quartier canonial semble donc contemporain de la reconstruction de la cathédrale.

Ce quartier abritait les bâtiments communs du chapitre dont il reste peu de vestiges aujourd’hui. La salle capitulaire communiquait avec la cathédrale par un couloir et un revestiaire, et était peut-être parallèle à la cathédrale. Elle n’est pas mentionnée avant les années 1407-1410 et est de toute façon reconstruite au xviiie siècle. La maison de l’archidiacre de Sens était située juste au nord de la salle capitulaire et possédait un auditoire. Celui-ci était bordé des prisons dites du chapitre qui ont subsisté jusqu’au xvie siècle : mais étaient-ce des prisons communes au chapitre et à l’archidiacre ? Il existait aussi dans le quartier un auditoire du bailli (puisque le chapitre disposait de son propre bailli). Le cellier du chapitre, appelé halle au pain car on distribuait les pains du chapitre à l’étage, se trouvait près du portail nord de la cathédrale. Il n’en reste rien aujourd’hui, contrairement à un grand bâtiment voisin à 2 niveaux, très modifié au cours des siècles, qui était la manécanterie au xviiie siècle et peut-être le réfectoire au Moyen Âge.

Ces bâtiments canoniaux étaient bordés de divers bâtiments de service, dont la maison de l’œuvre (c’est un local « technique » - Le maître de l’œuvre résidait ailleurs, hors du cloître), près de la grande place devant la cathédrale, qui a été tardivement remplacée par la bibliothèque du chapitre (auparavant, les livres étaient dispersés). Un puits se trouvait au centre de la place du quartier. En revanche, aucune mention n’est faite d’un cloître « architectural » du chapitre, on indique simplement des « allées du chapitre », des « galeries devers le chapitre ». Il n’y a pas trace non plus d’école capitulaire, qui devait souffrir de la concurrence d’Orléans et de Paris, ni de cimetière à l’intérieur de l’enceinte. Les chanoines sont enterrés à Saint-Sauveur-des-Vignes, un prieuré augustin dépendant de l’abbaye Saint-Jean et situé au nord de la ville, tandis qu’à partir du xiiie siècle, un prieuré puis abbaye Saint-Paul-sur-Vanne, ordre de Prémontré, accueille uniquement les dignitaires. Les chanoines maintiennent ainsi les tradi­tions romaines de rejet des morts au-delà des murailles de la ville, même si à partir de 1340 les cadavres peuvent être enterrés en ville, au grand bénéfice des mendiants, et dans la cathédrale.

Dans le même quartier se trouvent les maisons individuelles des chanoines, remplacées par des hôtels canoniaux à l’époque moderne. Elles étaient pour certaines construites en pierres dès le xiiie siècle, mais on ne connaît pas leur disposition intérieure ni leur affectation. Au xve siècle, quelques maisons semblent réservées à des dignitaires, notamment au grand archidiacre qui aurait disposé de la maison avec l’auditoire, et à l’archidiacre d’Étampes.

Le quartier du cloître abritait aussi deux chapelles. Saint-Cyr, disparue, a été bâtie par l’archevêque Richer en l’honneur de quatre chanoines malades, peut-être au xe siècle. C’est un exemple de chapelle desservie par un petit collège, une collégiale. Mentionnée seulement au xiiie siècle, elle tombe en ruine dès 1450 et est détruite vers 1735 : c’était un hangar de dimensions modestes, une simple toiture reposant sur 2 murs gouttereaux et prenant appui sur les constructions voisines. La chapelle Sainte-Anne dont la voûte carénée existe encore aujourd’hui, était desservie par 3 ou 4 chapelains dans la maison d’un chanoine et avait été fondée par le trésorier de Sens.

À ce quartier canonial, étaient liés l’hôtel-Dieu contrôlé par le chapitre au xve siècle, ainsi que le palais épiscopal sur le flanc sud de la cathédral, un ensemble complexe avec son palais synodal et la chapelle Saint-Laurent, chapelle de l’archevêque mais aussi collégiale à partir de 1367. L’abondance des chapelles dans le quartier canonial se justifie par la rareté des chapelles fondées dans la cathédrale.

Ainsi, le chapitre est le responsable de la reconstruction complète d’un sixième de la ville entre 1150 et 1210.

Les primaties et l'Eglise de France, par Fabrice Delivré

Les primaties ont d’abord pour objectif de limiter l’influence du pape dans les affaires de l’Église de France. C’est ce que l’on peut constater à travers la création des officialités primatiales. Ce tribunal ecclésiastique apparu au xve siècle reçoit les appels de l’officialité métropolitaine. Il permet donc d’établir un échelon supplémentaire avant le pape et de limiter les appels au territoire français. Ces officialités primatiales sont très discrètes : les sources sont peu nombreuses (des registres de comptes, quelques sentences ou bien des lettres de citation à comparaître devant l’official primatial), elles n’ont pas de locaux spécifiques (à Lyon, en 1489, Antoine de Chalon, évêque d’Autun, administrateur du siège de l’archevêque, siège dans le même lieu que l’officialité métropolitaine) ni forcément de personnel propre (la charge d’official de la primatie se confondant avec la charge du doyen du chapitre). Peu à peu, cette officialité primatiale s’individualise et du personnel apparaît (au milieu du xve siècle à Lyon, sous l’impulsion d’Amédée de Talaru). Ces officialités sont contestées, notamment dans leurs procédures de citation, et sont sévèrement encadrées (par exemple, dans les délais d’appel).

La création d’officialités dans les différents sièges métropolitains, comme à Sens ou à Narbonne dès le milieu du xve siècle, permet par ailleurs d’échapper à la mainmise de l’officialité de Lyon, même si le ressort de ces officialités est limité à la seule province. Au cours du xve siècle, les archevêques français se parent du titre de primat, voire du titre de « patriarche » mineur, ce qui a des retentissements sur la désignation du personnel ecclésiastique. Ainsi, une vingtaine d’élections épiscopales font intervenir des primats, comme celle de Louis d’Harcourt à Rouen au cours de laquelle le chapitre traite avec les archevêques de Lyon et de Vienne. Certaines visites épiscopales sont menées par des primats, tandis que certains évêques conduisent des procès pour obtenir une primatie.

Enfin, ces primats interviennent directement dans le monde des chanoines par l’intermédiaire des lettres de collation qu’ils remettent à certains ecclésiastiques. C’est une pratique méconnue mais réelle au xve siècle sous le régime de la Pragmatique Sanction. Ainsi, Alain Olivier est nommé chanoine de Rouen sur nomination de l’archevêque de Lyon : c’est une collation « ordinaire » en apparence (car elle n’est pas faite par l’évêque) mais il faudrait en fait créer une catégorie « collation primatiale » dans le champ concerné dans la base de données pour éviter toute ambiguïté. Ces interventions du primat peuvent être motivées par la négligence de l’évêque ou de l’archevêque local (c’est le cas dans l’exemple rouennais).

Ainsi, toutes ces pratiques correspondent à une volonté manifeste de l’Église de France de s’affirmer face à l’Église universelle de Rome, de même qu’au désir de certains évêques de se distinguer.

Discussion sur le site internet des Fasti

Que peut-on y mettre afin qu’il devienne un outil au lieu d’une vitrine ?

Les outils de travail pourraient être mis en ligne. Certains le sont déjà, comme la liste des archidiaconés. Quant à la bibliographie canoniale, plusieurs écueils sont à éviter, en particulier qu’elle paraisse faire doublon avec les bibliographies éditées dans les volumes ou qu’elle pêche par un évident manque d’exhaustivité. Certains proposent d’intégrer au site le fichier des participants au concile de Bâle, voire la base du Parlement de Paris, mais ce sont des fichiers très lourds et des problèmes de droits pourraient survenir. L’établissement éventuel d’un mot de passe pour accéder à certaines parties du site est évoqué. Enfin, il serait possible – et c’est peut-être ce qui pose le moins de difficultés pour l’instant – d’utiliser le site pour échanger les informations qui figuraient jusqu’à présent dans la « boîte » ; elle pourrait désormais être mise à jour quotidiennement et consultable sans délai.

Sous quelle forme diffuser certaines informations ?

Un forum pourrait permettre une diffusion large et des discussions animées. Mais il faudrait l’autorisation de Paris I (qui héberge déjà le site) pour le faire fonctionner. Par ailleurs, il faudrait choisir entre un forum ouvert à tous mais facile à polluer, ou un forum contrôlé mais demandant une gestion lourde. Enfin, un forum sans participants – ou rempli de trolls – serait une très mauvaise publicité pour l’équipe des Fasti…L’idée n’est donc pas retenue.

En revanche, une liste de diffusion ne nécessite pas d’hébergement particulier, tout en permettant les échanges (les listes de diffusion fonctionnent comme – je simplifie beaucoup – un service de courrier électronique dédié à un seul sujet). Il en existe déjà une sur Menestrel. Le seul problème serait de trouver un service gratuit et qui ne propose pas de publicité. Mais les connaissances de Jean-Nicolas Rondeau ou de Jean-François Cauche dans ce domaine devraient nous permettre de trouver la solution qui correspond à nos attentes.

Echange : qu'est-ce qu'un "concanonicus" ?

La question a été posée par Fabrice Ryckebusch, surpris de trouver ce terme dans le Livre rouge de Dax. Selon Charles de Miramon (Les donnés au Moyen Age), il désigne un lien spécifique entre des individus, hommes ou femmes, laïcs, qui reçoivent de la nourriture au chapitre et conservent ce qui est appelé une prébende pendant toute la durée de leur vie. C’est ce qu’il a pu observer à Huesca et à Saragosse au xiie siècle. Selon V. Tabbagh, ces co-chanoines correspondraient à une autre organisation de la communauté, empreinte de régularité, dans laquelle le nombre des prébendes et de chanoines n’est pas fixé et où il pourrait y avoir des chanoines « associés ».

Cependant, la définition la plus commune semble être celui de « confrère » ou « collègue » au sein d’un même chapitre, ce terme étant employé par un chanoine pour parler d’un autre chanoine. Cette définition à usage interne est d’une banalité totale pour les époques postérieures et au nord de la Loire.

Le régime de collation des bénéfices à l'époque du Grand Schisme d'Occident, par Hélène Millet

L’objectif de cet exposé est de dégager des principes généraux susceptibles d’aider à comprendre comment fonctionna le système des collations bénéficiales à une époque réputée pour avoir voulu retourner à un régime « ordinaire » de collation des bénéfices. A Laon comme ailleurs, ce qu’il faut entendre par « collateur ordinaire » est rarement indiqué de façon explicite par les documents. Pour le chapitre de la cathédrale, en général c’est l’évêque, mais ce peut être le chapitre ou une combinaison des deux en alternance : il faut relever avec la plus grande minutie les indications que donnent les sources à ce sujet. Avec le développement des réserves pontificales après 1265 et l’inflation du nombre des expectatives au début du XIVème siècle, le collateur « extraordinaire » qu’est le pape tend à supplanter l’ordinaire. Au début du schisme, le rôle du pape est tellement écrasant qu’il délivre des indults aux évêques, lors de leur consécration par exemple, ou à des princes laïcs pour qu’ils bénéficient de l’autorité extraordinaire pour la désignation des titulaires de certains bénéfices. Il devient alors très difficile de démêler les droits des multiples candidats à une même prébende.

Cette ligne générale de l’évolution est stoppée lors de la première soustraction d’obédience, officiellement proclamée à Paris le 28 juillet 1398. L’autorité du pape étant récusée, celle des ordinaires est alors censée retrouver son efficacité. Mais seules les sources locales permettent d’apprécier à partir de quand la nouvelle loi fut appliquée dans les diocèses du royaume et du Dauphiné. Une chose est en revanche tout à fait certaine : la nouvelle loi fut appliquée, même par des évêques qui, tel celui de Rodez, avaient voté contre la soustraction d’obédience. On sait en effet que, le 10 mars 1401, chapitre et évêque ruthénois s’accordèrent sur ce qu’était le « régime ordinaire » : ils étaient collateur à tour de rôle, sauf pour la dignité de sacriste, toujours conférée par l’évêque, lequel était tenu de choisir un clerc déjà chanoine. En 1399, l’université de Paris prit conscience que le retour au système ordinaire lésait les intérêts des siens. Au terme d’une grève mémorable, on convint d’établir un tour de rôle obligatoire non seulement pour les universitaires mais aussi pour les serviteurs de la couronne, avec l’établissement de listes centralisées de candidats aux bénéfices (cf. l’ordonnance supposée de 1408 éditée par du Boulay, Historia universitatis parisiensis, Paris, 1670, t.5, p.186-188, à dater en réalité du 20 mars 1400). On peine à percevoir la manière dont fonctionna ce système, normalement en vigueur jusqu’à la restitution d’obéissance à Benoît XIII le 28 mai 1403.

Le pape renoua immédiatement avec ses anciennes habitudes extraordinaires, et, malgré les réclamations de certains, la validité des collations intervenues durant la soustraction ne fut pas remise en cause. La difficulté est ici de savoir jusqu’à quand dura cette nouvelle période de domination pontificale. En effet, le 18 février 1407 fut scellée une ordonnance rétablissant un régime de collation ordinaire, dont l’application fut repoussée tant qu’il y eut un espoir de voir Benoît XIII s’engager dans un processus d’union avec son adversaire. Mais les évêques les plus « gallicans » durent devancer la date officielle de promulgation de cette ordonnance, à savoir le 14 mai 1408.

La période qui suivit trouva un terme facile à établir avec l’élection d’Alexandre V à Pise le 7 juillet 1409. En attendant, le régime des collations sous lequel vécut le royaume et le Dauphiné durant cette période de neutralité (improprement dénommée seconde soustraction) fut clairement défini à partir de Noël 1408 (voir les documents édités par du Boulay, p.175-186). Après avoir conféré un bénéfice au candidat de leur choix, les ordinaires devaient se reporter à une liste de postulants établie de façon centralisée par quatre commissaires aux bénéfices, lesquels devaient se conformer à des règles d’équivalence entre grades universitaires et fonctions exercées au service de la couronne. Plusieurs sources attestant le fonctionnement de ce système ont été retrouvées.

A son avènement, Alexandre V annonça qu’il laisserait aux ordinaires le soin de pourvoir librement aux bénéfices une fois sur quatre. Qu’en fut-il dans les faits et jusqu’à la déposition de son successeur, Jean XXIII, par le concile de Constance, le 29 mai 1415 ? Les sources montrent surtout un retour en force des procédures extraordinaires et la multiplication des procès en matière bénéficiale aussi bien devant le parlement de Paris qu’en Curie.

Le mystère est encore plus épais pour la période de vacance pontificale qui s’étendit jusqu’au 11 novembre 1417, date de l’élection de Martin V. Celui-ci passa un accord avec les représentants de la nation française au concile de Constance le 2 mai 1418 : pape et ordinaire devaient alterner dans la collation des bénéfices. Mais il ne faut pas oublier qu’une notable partie de la France était alors «anglaise »…

Deux conclusions à cette histoire : en l’absence d’indication précise sur l’identité du collateur d’une prébende à cette époque, s’abstenir de toute supputation. Le principe d’une alternance entre ordinaire et pape tendit ensuite à s’affirmer, avec des modalités d’application éminemment variables, établies unilatéralement ou au terme d’un concordat.

Compte rendu de la réunion de l'équipe des Fasti du 28 juin 2002

 

Informations générales

Le programme des Fasti Ecclesiae Gallicanae se poursuit désormais dans le cadre d’un nouveau GDR, intitulé SALVE (= Sources Acteurs et Lieux de la Vie religieuse à l’Epoque médiévale) et placé sous la direction d’Hélène Millet. Créé sous le code GDR 2513, il comporte sept autres programmes :

  • Sanctuaires et pèlerinages (C. Vincent)
  • PREALP (D. Rigaux)
  • L’Eglise et les fidèles du Midi (M. Fournié et D. Le Blévec)
  • Actes des évêques (M. Parisse)
  • Archives de la papauté (F. Bougard)
  • Réguliers et réseaux (A. Dubreucq)

Deux entreprises du programme « Archives de la papauté » placées sous l’égide de l’EFR nous intéressent au premier chef :

  • l’informatisation des lettres pontificales. Une étape considérable vient d’être franchie avec la publication du premier CD-Rom Ut per litteras apostolicas. Janine Mathieu est d’ores et déjà au travail pour préparer les suivants.
  • l’informatisation du fichier Lesellier. Son propriétaire, la communauté de Saint-Louis-des-Français a demandé à l’EFR d’en être le maître d’œuvre et celle-ci a passé contrat avec l’IRHT et le GDR pour la conception d’une application sous ACCESS et la saisie des données. Marie-Elisabeth Boutroue (IRHT), Laurent Vallière et Hélène Millet ont uni leurs efforts pour la mise au point de l’application ; elle sera opérationnelle à l’automne. Le chantier est donc ouvert à tous ceux qui le souhaitent. Un système de rémunération par vacation ou par bourse de l’EFR est prévu. Ne manquez pas de vous signaler si vous êtes intéressés.

A l’étranger aussi, les Fastes font recette. Nos collègues portugais ont obtenu le financement d’un programme de recherche sur trois ans. Ils l’ont exposé lors d’une session au Medieval International Congress de Leeds où ont été conviées Diana Greenway (pour les Fasti Ecclesiae Anglicanae) et Hélène Millet. Le numéro de 2003 des Quaderni di Storia religiosa portera sur Capitoli e canonici nel medioev,o avec un article pour rendre compte de l’état de la recherche en France.

Sont en cours de préparation pour une parution à l’automne les volumes sur Rodez (Matthieu Desachy) et Mende (Philippe Maurice). Ils ont donc doublé Angers pour lequel François Comte ne parvient pas à combler son retard. Sées est aussi candidat à une publication prochaine.

Les convocations aux prochaines réunions seront désormais envoyées, sauf impossibilité, par courrier électronique. Merci de signaler votre adresse à Mme Martin.

Il serait bon que de nouvelles bonnes volontés se manifestent pour aider aux divers travaux d’intérêt général : classement des livres de la bibliothèque, gestion de la « Boîte », rédaction des comptes rendus etc.

Diocèse et chapitre de Maguelone.

Daniel Le Blévec a résumé la journée d’étude qui s’est tenue le 13 décembre dernier aux archives départementales de Montpellier. Les communications ont permis une synthèse large, fondement de nombreux travaux futurs, même si bien des interrogations demeurent au sujet de cet évêché situé dans la partie orientale de l’actuel Hérault et dont l’existence fut relativement courte, puisque attesté pour la première fois en 589, il disparut de la carte en 1536, avec le transfert de son siège à Montpellier.

Les contraintes du milieu insulaire ainsi que la proximité de la ville de Montpellier ont largement marqué son histoire. L’université montpelliéraine a ainsi permis l’utilisation de personnel de bonne formation, y compris au plus haut niveau, mais il faut constater que la tutelle de l’évêque y a toujours fait l’objet d’une grande résistance. Plus localement, les liens constants entretenus avec le consulat, à partir du XIVe siècle, ont entraîné la présence de documents importants aux archives municipales, alors que le fonds de la cathédrale n’a pas encore été exploité systématiquement.

La position du diocèse en a fait un enjeu pour la royauté comme pour la papauté ainsi que l’a montré le cas de l’évêque Jean de Montlaur (1160-1190) qui paraît avoir privilégié les liens avec les Capétiens plutôt qu’avec le pape. Cette attitude lui fit d’ailleurs perdre un appui précieux dans le rude et long conflit qui l’opposa au prévôt du chapitre et aux chanoines.

Les chanoines de Maguelone constituaient un chapitre augustin, dont l’étude des Lettres Communes permet d’estimer la relative richesse, avec pas moins d’une trentaine de prieurés cures. Pour la connaissance de la vie quotidienne de la communauté, il faut souligner l’intérêt exceptionnel de statuts rédigés sous l’évêque Jean de Vissec, canoniste mort en 1334. D’une grande ampleur, ils comprennent 107 chapitres et peuvent être rapprochés de ceux de Saint-Victor de Marseille, même s’ils sont beaucoup plus détaillés. On s’interroge encore sur les motivations exactes de leur rédaction.

Un colloque sur la montagne

Michelle Fournié nous a rapidement informés du déroulement du colloque international Religion et Montagne en Europe de l’Antiquité à nos jours, qui s’est déroulé du 30 mai au 2 juin à Tarbes. Les actes de cette réunion axée sur la montagne sacrée et sa topographie ainsi que sur les rapports entre clergé et fidèles, devraient permettre de mieux cerner les éventuelles spécificités montagnardes.

Notice institutionnelle du chapitre d’Évreux

Annick Gossé-Kischinewski a fait part de l’état de ses recherches sur le diocèse d’Évreux qui comptait en 1370 473 paroisses. Des zones d’ombre subsistent, dues en grande partie à des travaux antérieurs incomplets voire erronés et à des incendies ravageurs. Tout ceci explique les difficultés actuelles (combien au juste le chapitre comptait de prébendes ? quel était le montant de la taxatio ? comment étaient les maisons canoniales ?), ainsi que la persistance de notions quasi légendaires faisant la part belle à Rollon. Mme Gossé-Kischinewski a largement déblayé le terrain mais apprécierait toute aide lui permettant d’avancer dans ses recherches.

L’Helvetia Sacra : quel regard sur les chapitres cathédraux suisses ?

Bernard Adenmatten nous a présenté l’Helvetia Sacra, entreprise née au début des années 1960 mais encore peu connue en France. L’Helvetia Sacra traite de l’ensemble des établissements ecclésiastiques helvétiques sans se limiter aux seules institutions diocésaines. L’accent y est mis sur les notices biographiques qui représentent à peu près les deux tiers des ouvrages, le principe retenu étant d’accorder à chaque individu autant de notices qu’il a rempli de fonctions. Ces notices ne concernent pas les simples bénéficiers. Cette volonté parfois discutée a permis à cette collection de se développer rapidement, malgré des contraintes telle que la nécessité de toujours user de la langue officielle des lieux concernés. Le premier volume parut en 1972, le dernier est prévu pour 2007, après l’évocation de 12 diocèses.

Contrairement à ceux des Fasti, les volumes de la collection couvrent une période extrêmement longue, puisqu’il s’agit d’aller des origines à nos jours. Ce choix s’explique par le rôle encore très important que joua l’Église dans les terres d’Empire après le Moyen Âge.

La collection se caractérise par une grande attention portée aux archives dont les fonds bénéficient de descriptions détaillées. La dispersion des archives est telle qu’on ne peut négliger les archives se trouvant à Turin, Annecy, Innsbruck ou Vienne. L’entreprise déborde donc largement du cadre de la Suisse.

Chronique de la finition d’un fascicule

Les problèmes que rencontrent les auteurs des Fasti aux derniers stades de leur travail ont été évoqués par Matthieu Desachy, à propos de son volume consacré au diocèse de Rodez. Il a insisté sur l’importance des tirages papier qui permettent les relectures et peuvent éventuellement être les bienvenus lors de difficultés informatiques. Il ne faut pas négliger non plus l’intérêt qu’il y a à parler de ses « cumulards » aux spécialistes des diocèses concernés, l’utilité de penser à faire une carte facilement lisible sans s’y pendre au dernier moment, et la nécessité de savoir s’arrêter en faisant abstraction d’éventuelles découvertes postérieures. Concernant le diocèse de Rodez en particulier, Matthieu Desachy a évoqué également la question de la graphie des patronymes, question aiguë pour le Midi. A ce sujet, il n’est pas inutile de rappeler que, quelle que soit la solution envisagée sur ce point, il est nécessaire de s’y tenir de façon cohérente et d’en avertir clairement le lecteur.

Les représentations picturales des chanoines

Faire la connaissance de visu d’un chanoine de Laon, telle a été l’expérience à laquelle nous avons été conviés par Inès Villela-Petit, grâce à son identification en tant que commanditaire d’un retable conservé au musée municipal de cette ville. Sur un panneau issu d’un triptyque qui devait surmonter initialement l’autel de la chapelle de la Madeleine est représenté le donateur, un chanoine portant une chape taillée dans un précieux brocart et une aumusse de petit gris. Il tient un bâton cantoral en forme de tau orné de pierres précieuses. Par une datation plus précise de ce retable, l’examen de ses dimensions et l’étude des registres capitulaires, Inès Villela-Petit est parvenue à identifier le chantre Pierre de Wissant, peint alors qu’il était âgé d’environ 70 ans, vers 1410.

De telles représentations de chanoines sont nombreuses, surtout au XVe siècle marqué par l’accroissement des commandes. Le chanoine, surtout à partir de la deuxième moitié du XIVe siècle, y est caractérisé par la présence de l’aumusse, généralement portée repliée sur le bras gauche. Le chantre est représenté avec son bâton cantoral dont la forme n’était pas encore fixée au XIIIe siècle. Il pouvait être alors soit fleuronné, soit fini par un pommeau ou par un tau. Par la suite, le tau l’emporta sans toutefois éliminer des formes plus recherchées. Les portraits collectifs ne sont pas toujours exempts de signes permettant d’identifier quelques chanoines, comme la représentation de clefs pour désigner un trésorier. Mais ils avaient pour objet d’évoquer l’unité du chapitre, alors que les portraits individuels étaient là comme offrande et hommage du chanoine à son église.

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Contenu du volume :

  • 194 pages.
  • 253 notices prosopographiques.
  • 22 biographies d'évêques.

Ce volume contient en outre une carte du diocèse, un plan de l'enclos canonial, six illustrations et une notice institutionnelle avec éclaircissements sur l’appartenance du chapitre à l’ordre canonial, ainsi qu'une étude sur l’enclos canonial.

Dans ce volume consacré au diocèse de Sées, où le chapitre de la cathédrale appartenait à l'ordre canonial de saint Augustin, il n'est pas question de chanoines prébendés mais de chanoines profès. On trouvera des éclaircissements sur cette singularité dans la notice institutionnelle. L'enclos, où vivait la communauté, a fait l'objet d'un article particulier. Les recherches sur les individus ont été prolongées jusqu'en 1547, année de la sécularisation.

  • Note liminaire, par Hélène Millet, directeur du programme
  • Extrait du volume : "Un éveché régulier", pages 8-11.
 

Diocèse de Sées : note liminaire, par Hélène Millet

Qui n'est pas versé dans l'histoire canoniale ne verra rien d'extraordinaire à ce que le neuvième volume des Fasti Ecclesiae Gallicanae soit consacré au diocèse de Sées. Et pourtant ! Dans la province de Rouen et dans la France du Nord tout entière, le chapitre de Sées représente une exception institutionnelle de taille. Devenus réguliers par la volonté de leur évêque en 1131, les chanoines sont restés attachés à la règle de saint Augustin jusqu'en 1547, date tardive s'il en est puisque les seuls à pouvoir leur être comparés dans la région sont les chanoines de Saint-Malo, sécularisés quant à eux en 1319.

La singularité sagienne est une énigme historique qui aurait présenté un attrait certain pour les chercheurs s'ils avaient eu à leur disposition des archives susceptibles de les renseigner. Mais, comme toutes les communautés régulières, le chapitre de Sées est resté marginal par rapport au système bénéficial, et l'inflation bureaucratique générée par celui-ci ne l'a donc pas touché. Cette règle, que l'observation des nombreux chapitres méridionaux, plus tard venus à la sécularisation que leurs homologues nordiques, a permis d'établir, s'est encore trouvée renforcée, à Sées, ville de plat pays, par les destructions dues aux guerres.

Lorsque le programme Fasti Ecclesiae Gallicanae a été lancé, on savait certes que les chercheurs attirés, pour une raison ou pour une autre, par un diocèse dont la cathédrale abritait des chanoines réguliers se heurteraient au manque de documentation susceptible de nourrir un travail prosopographique. Mais les candidats n'ont alors pourtant pas manqué pour oser relever le défi. L'un d'eux était Françoise Loddé, dont le choix s'est porté sur Sées. Et, treize ans plus tard, Sées est le premier de ces diocèses « difficiles » à voir paraître « son » volume dans la collection. Ce ne sont pourtant pas les obstacles qui ont manqué sur le chemin de la recherche et de la publication !

Les attaches provinciales de Françoise Loddé se trouvaient à Saint-Béat en Comminges. En fait, rien ne la destinait particulièrement à travailler sur Sées, si ce n'est la sympathie qu'elle avait éprouvé pour Grégoire Langlois, l'un des cinq testateurs sur lesquels avait porté la thèse de troisième cycle qu'elle avait soutenue à l'Université de Paris-X Nanterre, en 1985, sous la direction de Philippe Contamine. Quelques années plus tard, on pouvait penser que les travaux menés sur les diocèses de la province de Rouen aboutiraient plus rapidement que les autres. En optant pour Sées, Françoise voulait tout simplement apporter sa pierre à l'édifice commun.

Elle avait enseigné en lycée avant de se former à la recherche historique. Celle-ci était pour elle une manière de lutter contre la perfide maladie qui devait l'emporter, le 14 avril 2001, à l'âge de 68 ans. Pour la seconder, Françoise pouvait compter sur la gentillesse et la prévenance de son époux, au bras duquel elle se rendait aux réunions de l'équipe. J'ai ainsi très présent à l'esprit le souvenir de ce 23 janvier 1998, où, dans la salle du bâtiment O à Villejuif, Françoise nous avait présenté les maigres sources dont elle disposait. Nous nous étions tous efforcés de trouver quelques éléments de réponse aux multiples interrogations soulevées par leur exploitation. Mais que de questions étaient — et restent toujours — mal résolues !

Tout de même un peu réconfortée par cette séance, Françoise avait présenté quelques-unes de ses observations à deux colloques d'histoire normande. Elle avait aussi préparé une première mouture de la base de données prosopographiques pour une centaine d'individus. Mais, quand elle s'est éteinte, elle avait surtout achevé de visiter les sources disponibles, préparé quelques-unes des notices et réuni tous les matériaux nécessaires à la rédaction des divers éléments constitutifs d'un volume de la collection. Bien conscient du trésor que cela représentait, Jean-Pierre Loddé a alors légué aux Fasti les caisses de papiers et de documents consacrés à Sées que son épouse avait amassés.

Pierre Desportes, un ami de longue date de la famille Loddé, m'avait accompagnée pour recueillir et inventorier cet héritage. Impressionné par le soin avec lequel Françoise tenait ses notes à jour, il s'est alors offert à reprendre le flambeau, à condition de n'être pas seul à le faire. Vers qui d'autre aller ? Jean-Pascal Foucher, directeur des Archives départementales de l'Orne, avait présenté un panorama imagé de son enquête sur les bâtiments capitulai-res sagiens à notre réunion de janvier 1999, mais il n'avait pas la disponibilité nécessaire. Il accepta cependant de pousser ses recherches jusqu'à rédiger la notice sur le « quartier canonial », notice d'autant plus attendue qu'elle allait mettre en valeur comment le chapitre de Sées avait donné une traduction architecturale de son originalité institutionnelle.

Une bienveillance du hasard me fit trouver un troisième homme. Au sortir de son doctorat sur la collégiale de Saint-Hilaire de Poitiers, Laurent Vallière cherchait à employer ses nouveaux talents. Nous avons donc fait affaire et partagé le travail sur la base suivante : Pierre Desportes allait terminer la notice institutionnelle et, avec la désormais traditionnelle collaboration de Vincent Tabbagh, rédiger les biographies des évêques, tandis qu'il reviendrait à Laurent Vallière de reprendre le fichier prosopographique et de préparer les notices concernant les sources et la bibliographie.

Cela est bien connu. Il est toujours difficile de terminer une recherche entamée par autrui, même lorsqu'elle a été menée avec l'esprit de méthode qui caractérisait Françoise Loddé. Le livre était donc encore loin d'être achevé lorsque Laurent Vallière eut l'opportunité d'aller travailler à Rome pour l'informatisation du « Fichier Lesellier ». Quelle heureuse coïncidence ! Comme Joseph Lesellier était d'origine normande, il avait relevé avec un soin tout particulier les données concernant Sées. Son fichier s'est ainsi avéré une source d'informations complémentaires inestimable pour les notices prosopographiques. Grâce à cet apport, le nombre des individus recensés — surtout les clercs titulaires de dignités, engagés par conséquent dans le jeu des collations apostoliques — a pu être multiplié par deux.

Mais ces découvertes tardives ont aussi compliqué le travail de coordina­tion et de finition entre les auteurs. De retouche en retouche, ce sont parfois des paragraphes entiers qui ont dû être réécrits. Non pas que les suppléments d'information aient toujours apporté une clarté décisive ! Sur les schismes épiscopaux — dont Sées semble s'être aussi fait une spécialité — l'émergence de nouvelles sources a d'abord révélé des incohérences. Il a fallu toute la ténacité de Pierre Desportes, après une attentive relecture par Heribert Müller, pour parvenir à restituer un enchaînement satisfaisant des faits à l'époque de la rivalité entre Jean Chevalier et Jean de Pérusse.

Dernier motif au retard de la publication, l'entorse que ce volume fait subir aux règles établies pour la collection. Il a en effet paru utile de prolon­ger le répertoire jusqu'à 1547, date de la sécularisation du chapitre. Les sources exceptionnellement précises engendrées par ce changement de statut donnaient en effet des aperçus plus que bienvenus sur son état antérieur. Il nous a en outre paru peu probable que nos collègues modernistes reviennent sur cette cinquantaine d'années, eu égard aux spécificités institutionnelle et documentaire de ce diocèse. En acceptant de relire les notices biographiques des évêques du temps de la Réforme, Nicole Lemaitre a permis que soit clos dans les meilleures conditions un dossier difficile à traiter. Mais pour garder son homogénéité au programme, il a été créé deux corpus distincts ; seules les listes présentées par ordre chronologique se prolongent sans rupture au-delà de 1500.

Il m'est particulièrement agréable de souligner combien ce nouveau volume de la collection doit à l'esprit d'entraide qui prévaut dans l'équipe des Fasti . Chacun a eu à cœur de signaler la ou les références qu'il avait pu glaner sur Sées durant son propre parcours de recherche. Le souvenir que nous avions tous de la gentillesse de Françoise Loddé a sans aucun doute donné une valeur supplémentaire à ces gestes. Je suis heureuse d'en offrir le résultat à sa mémoire et à son époux.

Voici donc le diocèse de Sées nanti, quasi miraculeusement, d'un fascicule qui dépasse de beaucoup les dimensions d'une plaquette. La modestie augustinienne — analogue à celle des moines — est effectivement parvenue à cacher les noms de l'immense majorité des simples chanoines : ils ne sont qu'une vingtaine à être sortis de l'anonymat. Mais elle n'a pas empêché les dignitaires de surgir de l'ombre, et, avec la complicité de quelques sources exceptionnelles, nous pouvons entrevoir, de façon certes sporadique, un peu de la physionomie de l'ensemble capitulaire. La notice institutionnelle, plus copieuse qu'il n'est d'usage, rend compte de ces aperçus, ainsi que les notices biographiques des évêques. C'est un pan du mystère des « diocèses réguliers » de France qui est ici soulevé.

Avec ce neuvième volume, le programme de publication des Fasti va connaître une pause. Plusieurs diocèses (Auch, Autun, Avignon, Châlons-en-Champagne, Clermont, Mâcon, Meaux, Poitiers, Riez…) sont dans un état d'avancement qui permet d'espérer un aboutissement prochain, mais il serait actuellement prématuré d'annoncer lequel verra le jour le premier. Ce répit sera mis à profit pour réaliser le projet, prévu dès le début de l'entreprise, de la réunion des fichiers prosopographiques déjà publiés en une seule base de données cumulées, et de sa mise à la disposition des lecteurs. Cette nouvelle phase s'accompagnera de la mise à jour (corrections et additions) des informations. Que tous veuillent bien se sentir concernés par cette opération : rien ne nous rendra plus service que de recevoir les observations des lecteurs. Merci à ceux qui nous ont déjà fait bénéficier de leurs critiques ou de leur savoir, et merci d'avance à tous ceux qui le feront ( mail, hmillet@cnrs-orleans.fr).

Orléans, le 3 décembre 2004, Hélène Millet, directeur du programme.

 

Extrait du volume concernant le diocèse de Sées

Un évéché régulier (pages 8-11)

La singularité de l'évêque de Sées tient au fait que depuis 1131 il se trouve à la tête d'un chapitre régulier. Il importe de bien mesurer la portée de la réforme intervenue. Ce ne sont pas seulement les chanoines qui ont été « régularisés » mais tout le personnel dirigeant du diocèse, à commencer par le pontife lui-même. Jean de Neuville revêtit personnellement l'habit régulier avant de le remettre aux clercs désireux de vivre selon la règle de saint Augustin. Le chapitre est certes dirigé par son prieur mais c'est incontestablement l'évêque qui tient la place du père abbé, présent derrière chaque paragraphe de la règle. Les réformateurs n'ont pas osé faire inscrire dans les textes de 1131 l'obligation pour l'évêque d'être lui-même un régulier. Le système sagien ne peut pourtant fonctionner correctement que si le prélat placé à sa tête possède l'expérience de la vie régulière. Le problème est que, dès le lendemain de la disparition de Jean de Neuville, réguliers et séculiers alternèrent sur le siège épiscopal. Quant aux archidiacres, auxquels incombait la lourde tâche de faire passer le souffle réformateur jusque dans les coins les plus reculés du diocèse, la réforme leur a imposé sans hésitation la vie commune.

L'événement en lui-même a été éclairé par un ensemble de publications récentes qui l'ont replacé dans son contexte tant politique que religieux, un contexte longtemps resté obscur. La principale de ces publications est assurément l'ouvrage collectif publié en 2000 sous la direction de Mathieu Arnoux, Des clercs au service de la réforme, Études et documents sur les chanoines réguliers de la province de Rouen , véritable étude d'ensemble sur le mouvement canonial en Normandie, que nous avons largement mis à contribution. La régularisation du chapitre de Sées en 1131 par son évêque apparaît comme le fruit de l'action conjuguée de la monarchie anglo-normande et de la puissance romaine. Seul leur double soutien permit au promoteur de la réforme de venir à bout des inévitables résistances rencontrées par celle-ci. L'intervention directe du roi Henri Ier Beauclerc a vraisemblablement précédé celle de la papauté. Durant les premières années du XIIe siècle, Robert de Bellême, profitant de la lutte entre Henri et son frère Robert Courteheuse, s'était encore plus mal conduit à l'égard de l'Église de Sées que ses devanciers un siècle plus tôt. Il avait mis la main sur l'évêché et ses possessions et contraint en 1104 l'évêque Serlon à se réfugier auprès du roi d'Angleterre. Les recherches de Gérard Louise sur la seigneurie de Bellême ont montré que dès 1106, après la reprise sur son frère du duché de Normandie, un des principaux objectifs du souverain anglo-normand avait été la réduction des velléités d'autonomie des sires de Bellême. L'action du roi, patiente et progressive, connaît une accélération après la prise du château de Bellême en 1113 et la destruction de cette seigneurie ; elle se traduit en 1124 par l'installation sur le siège épiscopal de Sées de l'archidiacre Jean de Neuville, un fidèle du duc en même temps qu'un clerc gagné aux idées réformatrices. C'est qu'en effet le spectacle du gâchis entretenu par les sires de Bellême avait provoqué l'amalgame sur place des uns et des autres. Nommer un évêque réformateur était une chose, le soutenir dans son action réformatrice et briser les oppositions suscitées par celle-ci en était une autre. Pour décider Henri Beauclerc à faire ce pas supplémentaire, il fallut l'intervention du pape : Honorius II lui fit comprendre que le soutien à la régularisation du chapitre de Sées était le prix à payer pour l'établissement de bonnes relations avec l'autorité romaine. L'installation à Sées d'une communauté de chanoines réguliers était de surcroît en elle-même une action pouvant parfaitement s'insérer dans « l'entreprise plus vaste, menée par le souverain, de restauration d'un ordre public et ecclésiastique régulier sur la frontière méridionale du duché ».

La politique pontificale est claire : il s'agit pour elle de faire enfin pénétrer la réforme grégorienne dans l'ensemble de l'Église et de la société du duché normand, un duché où les archevêques de Rouen ne sont pas parvenus à imposer d'en haut la réforme et où de nombreuses communautés de clercs séculiers, générées par un mouvement canonial spontané et multiforme, se sont révélées sur le terrain les meilleures propagatrices de celle-ci. La réforme du chapitre de Sées a constitué l'un des premiers succès de la réforme grégorienne dans l'État anglo-normand. Elle doit s'interpréter comme « la réinstauration de l'autorité pontificale sur un évêché conquis de haute lutte par le camp réformateur » et, semble t-il, destiné à servir à ce dernier de place forte à l'instar des sièges voisins de Chartres et du Mans. En effet, il existait alors au sein de l'épiscopat de l'Ouest une volonté commune de promouvoir la règle de saint Augustin dans les chapitres cathédraux. Sans parler de la tentative menée à Paris en 1127 ou 1128 par les chanoines de Saint-Victor à la demande de l'évêque Étienne de Senlis ou de celle, tout aussi vaine, faite à une date incertaine par Yves de Chartres (1090-1115) dans son propre diocèse, tentatives qui nous feraient sortir de la province de Rouen, on peut évoquer les inutiles efforts faits à Lisieux dans le même sens et au même moment par l'évêque Jean (1107-1141), oncle de Jean de Neuville. Dans les diocèses voisins, cette volonté se traduisit seulement par des donations en faveur des réguliers : en 1162, le chapitre cathédral de Bayeux céda la jouis­sance perpétuelle d'une de ses prébendes au prieuré augustin du Plessis-Grimoult à la fondation duquel il avait pris un peu plus tôt une part imporante, et à peu près au même moment l'évêque Achard d'Avranches avec l'accord de son chapitre attribua aux Prémontrés de la Lucerne une année du revenu des prébendes capitulaires vacantes. Enfin dans la lointaine Bretagne, l'évêque Jean de Châtillon, un ancien abbé de chanoines réguliers, réussit à soumettre à la discipline augustinienne le chapitre qu'il institua en 1152 à Saint-Malo, après avoir transféré en ce lieu le siège de son évêché.

Désignation des évêques : élection ou nomination, réguliers ou séculiers

L'établissement d'un centre réformateur à Sées, le plus éprouvé des sièges normands entre 990 et 1120, était un projet ambitieux. Il ne tarda pas à se heurter à de sérieux obstacles. En 1144, la succession de Jean de Neuville fut réglée par l'élection capitulaire mais celle-ci tourna au profit de Gérard qui faisait certes partie du chapitre mais à titre d'ancien chanoine séculier. Avant de confirmer son élection, le pape exigea de l'élu qu'il fasse person­nellement profession dans l'ordre de Saint Augustin et prête serment de maintenir de bonne foi cet ordre dans son Église. Par la suite les difficultés s'aggravèrent car, après la crise de la succession d'Henri Ier, les souverains anglo-normands oublièrent les bonnes résolutions un moment prises et revinrent sans tarder à leurs habitudes invétérées de désigner eux-mêmes les évêques. Henri II Plantagenêt imposa deux évêques successifs, Froger (1157-1186) et Lisiard (1188-1201), qui ne sortaient pas des rangs du chapitre, le premier notamment contre la candidature d'Achard, abbé de Saint-Victor ; les papes ratifièrent le choix royal sans plus poser de condition. Néanmoins les réformateurs tinrent bon et préservèrent la régularité du chapitre. En 1203, ils sortirent finalement vainqueurs de l'épreuve de force liée à la succession de Lisiard et imposèrent à Jean-sans-Terre la reconnaissance de Sylvestre, le candidat du chapitre, dont l'élection avait été confirmée par Innocent III en dépit de la violente opposition du roi. Le passage de la Normandie sous le contrôle direct des Capétiens régla peu après le problème de façon définitive.

Une nouvelle menace commence alors à se faire jour, le rapide déclin de l'élan réformateur. En 1220, le pape Honorius III jugea bon de secouer les chanoines sagiens en leur donnant comme évêque l'abbé général des Prémontrés, Gervais, un homme remarquable qu'il avait eu l'occasion de voir à l'œuvre. L'effet fut positif mais seulement pour un temps. Après la disparition du successeur de Gervais, les chanoines portèrent successivement à leur tête trois clercs séculiers de formation juridique, bien incapables de ranimer la flamme de la régularité. Puis réguliers et séculiers alternent, ce qui montre bien que l'élection capitulaire pouvait tourner en faveur de l'une ou l'autre catégorie, observation tout aussi valable pour les nominations. L'élection proprement dite se fait par recours au système des grands électeurs. En 1258 comme en 1278 et 1295, les chanoines désignent quelques-uns d'entre eux auxquels ils remettent l'élection du futur abbé. Les papes respectent le choix du chapitre. C'est notamment le cas en 1295 alors que l'élection de Philippe Le Boulanger, un régulier pourtant, a suscité des oppositions au sein du chapitre, pouvant facilement justifier une intervention romaine. Le principe de l'élection capitulaire réussit ainsi à se maintenir jusqu'au milieu du XIVe siècle, soit un siècle plus longtemps qu'ailleurs.

Le dominicain Guillaume de Rancé, nommé par le pape très vraisemblablement à la demande du souverain, ouvre en 1363 la série des hommes du roi. Passée cette date, la relative indépendance du chapitre en matière électorale ne va plus de soi. Avec la guerre désormais permanente, le choix de l'évêque dans une province menacée est plus que jamais une affaire politique. Face au Grand Schisme, les évêques et le chapitre suivent la politique royale, loyauté qui se retrouve également face aux envahisseurs et occupants anglais. L'évêque de Sées, Jean III (1408-1422), est le seul prélat normand à ne pas fuir sa cité devant l'arrivée des troupes d'Henri V. Son successeur, Robert de Rouvres, est un fidèle de Charles VII auprès de qui il réside. La situation devient très compliquée lorsqu'en 1433 ce même Robert est transféré par le pape à l'évêché de Maguelonne. En 1435, deux personnages se présentent simultanément au concile de Bâle comme évêque de Sées : d'une part Jean Chevalier, lié aux Anglais et élu du chapitre, de l'autre Jean de Pérusse, partisan de Charles VII et nommé par le pape. La mort du premier met fin dès 1438 à ce conflit que le concile n'avait pas été capable de régler. Un schisme plus durable éclate à la fin du siècle lorsque Louis XI prétend en 1480 imposer comme évêque Gilles de Laval, malgré une première résignation en 1478 de l'évêque Robert Cornegrue en faveur d'Étienne Goupillon. Ce dernier proteste hautement tant à Paris qu'à Rome, repoussant toutes les propositions de transfert qui lui sont faites. En 1485, l'évêché est un moment placé sous séquestre. Le conflit perdure finalement pendant treize ans, ne s'arrêtant qu'avec la disparition d'Étienne Goupillon en 1493. Durant la majeure partie de ce temps, Gilles de Laval administre effectivement le diocèse, ce dont il s'acquitte de manière irréprochable. Dans toute cette déplorable affaire, la voix du chapitre ne s'est guère fait entendre, bien qu'il ait été plutôt favorable à Goupillon, au moins au début. Précisons également que les deux compétiteurs étaient l'un et l'autre des séculiers. Le concordat de 1516 confirme définitivement le droit du roi à choisir les évêques de son royaume.

 
diocèse sées

 

 

Compte rendu de la réunion de l'équipe des Fasti du 11 janvier 2002

 

Informations générales :

La relève de l'ancien GDR GERSON est assurée, avec la création de SALVE (Sources, acteurs et lieux de la vie religieuse à l’époque médiévale) GDR 2513.

Les journées du colloque d'Orléans en septembre dernier sur "Histoire et christianisme" ont été un succès. Le débat-forum du samedi 29 septembre, destiné au grand public, sera publié grâce aux transcriptions qu'en fait actuellement Laurent Vallière et les six ou sept exposés du vendredi 28 concernant l'entreprise des Fasti feront l'objet d'un article dans la Revue d'Histoire de l'Église de France.

Nous avons eu la joie de voir le volume consacré au diocèse d'Agen, écrit par Fabrice Ryckebusch, sortir pour le colloque d'Orléans. Sachez qu'il est disponible pour les membres des Fasti, avec une remise de 40 % sur le prix d'achat, ce qui fixe celui-ci à 25 euros. Si vous êtes intéressé, veuillez libeller votre chèque à l'ordre d'Hélène Millet.

Le diocèse d’Angers attend que François Comte comble son retard.

Le volume sur Rodez avance très vite et celui sur Mende sera prêt dans le courant de l’été. Quant à Tours, diocèse sur lequel Philippe Maurice a passé un an grâce à une bourse de la Région Centre, il compte un répertoire de 800 noms.

Jean-Pierre Loddé a légué aux Fasti tout le fonds de documentation rassemblé par sa défunte épouse pour le volume sur Sées. A Paris, dans la salle de prosopographie, se trouve en photocopie tout le registre du Parlement contenant les testaments enregistré au parlement de Paris sous le règne de Charles VI étudiés par Fr. Loddé dans sa thèse de doctorat, ainsi que les deux volumes de la collection Moreau de la BNF, qui en sont des copies du XVIIIe siècle et les dossiers de renseignements biographiques constitués sur plusieurs individus. A Orléans se trouve tout ce qui concerne le diocèse Sées et Laurent Vallière s’emploie actuellement à rédiger les notices liminaires après avoir achevé la saisie des enregistrements. Un appel est lancé à chacun pour apporter les compléments d’information nécessaires à la finition.

Lors d'un colloque à Milan sur l'histoire des diocèses, Hélène Millet a pu présenter le travail de l'équipe des Fasti. Bernard Andenmatten, responsable du dernier volume paru dans la collection de l'Helvetia Sacra (sur les diocèses de Tarentaise et de Sion) viendra la présenter à l'été.

Ana Maria Rodriguez a obtenu un financement pour la réalisation de Fasti portugais.

La "boîte" était encore à la disposition de chacun. Elle s'est enrichie du dépouillement onomastique (par chanoine) d'un article d'E. Anheim sur la cour de Clément VI. F. Ryckebsuch a bien voulu faire de même pour l'article d'H. Gilles sur les auditeurs en cour de Rote.

P. Jugie a signalé l'édition, munie d'un index très fourni, de l'inventaire qu'il avait naguère dressé du fonds des collégiales parisiennes (AN, L 600-617). Il est disponible en salle de lecture au CARAN (fermé pour l'instant). Hélène Millet a enfin demandé de signaler au maximum les adresses électroniques dont chacun peut disposer.

Bénéfices et simonie, le point de vue du droit canonique, par C. Leveleux

Malgré son titre, cet exposé concernait peu les bénéfices mais bien l'histoire de la conception de la simonie, immense question très complexe. La manière qu'ont eu les canonistes de l'appréhender a beaucoup évolué aux XIIe et XIIIe siècles et ce changement de perception est à l'origine du débat sur la question du bénéfice. Chez les théologiens comme chez les juristes, il a fallu concilier la maîtrise qu'avait l'Église du sacré, par définition séparé du monde, et son engagement de plus en plus marqué dans les affaires temporelles. Les simoniaques, à l'image du serviteur d'Elisée, guérisseur de Naâman dans l'Ancien Testament ou des marchands du Temple et de Simon le Magicien dans le Nouveau, sont ceux qui veulent brouiller les limites entre le sacré et le profane, lier ce qui est temporel à ce qui est spirituel. Il faut donc établir des distinctions mais ce projet évolue dans la période qui s'ouvre avec le Décret de Gratien (vers 1140). Pour ce dernier, la simonie – dont il ne donne aucune définition – n'est traitée que comme un péché, une question d'ordre dogmatique. Gratien insiste sur l'intention de la personne simoniaque et renvoie à un traitement pénitentiel de ce qu'il assimile à une hérésie. Dans les Décrétales de Grégoire IX, la simonie est considérée désormais comme un crime pouvant faire l’objet d’une procédure pénale. Elle présuppose un contrat entre deux personnes. On assiste donc dans le courant du XIIIe siècle à une objectivation et une judiciarisation de la question. Hostiensis (mort en 1271) dans sa Summa Aurea insiste sur le fait que pour le juge d'Église, la définition de Gratien n'est pas suffisante, qu'il faut une extériorisation de l'intention, un pacte simoniaque qui la caractérise. Cela amena à relativiser le traitement de la question, en distinguant différentes situations où sacré et profane pouvaient se mêler ou non, et à intégrer dans le champ de la licité des pratiques auparavant condamnées. Tout en criminalisant les abus les plus manifestes, la pensée canonistes institutionnalisait la gestion de la simonie « ordinaire » et légitimait largement l’opportunisme dont l’église ont fait preuve dans l’utilisation des bénéfices.

Les bibliothèques des chanoines et des chapitres d'Aix, Arles et Marseille, par C. Giordano

De différentes études qui ont été menées en France, il ressort que les bibliothèques des chanoines sont généralement modestes et que le nombre de volumes possédés excède rarement la dizaine. Les bibliothèques des cathédrales étaient là pour pallier les carences de celles des chanoines ; de plus, les chanoines étaient les principaux utilisateurs des bibliothèques capitulaires, leur contenu avait donc une influence sur la culture, la formation intellectuelle de ces hommes.

Pour la cathédrale d’Arles nous avons un inventaire du trésor de 1336 mentionnant 11 volumes ; pour Aix, en plus de diverses mentions dans des registres capitulaires et dans des livres de comptes, nous avons des inventaires du trésor de 1380, 1404, et 1407. L’étude de ce dernier, nous apprend que la cathédrale possédait près de 200 manuscrits et qu’ils étaient entreposés dans différents lieux. La plupart était dans la sacristie, mais il y en avait également dans l’armoire eucharistique, dans la salle capitulaire et dans le chœur (dont une dizaine y était enchaînée). Cette bibliothèque qui s’est enrichie en partie grâce à des legs de chanoines et d’archevêques ou par le sauvetage de livres provenant d’autres églises aixoises, était constituée à 75 % de livres liturgiques. En ce qui concerne la cathédrale de Marseille, les inventaires du trésor sont plus tardifs (le plus ancien, de 1600, mentionne 14 livres liturgiques dont 2 en parchemin) ; nous avons également pour cette cathédrale une quittance de 1472 mentionnant près de 80 ouvrages.

Les bibliothèques des chanoines de ces chapitres sont essentiellement connues grâce à des testaments et des inventaires après décès. A l’exception de celui d’un chanoine marseillais (qui était également sacristain et professeur de droit canon et de théologie) qui mentionne 60 livres, les testaments mentionnant des bibliothèques citent au maximum 3 ouvrages, tandis que les inventaires après décès en comptent en moyenne 26. Le contenu de ces bibliothèques est peu varié. Les livres que l’on retrouve le plus souvent sont les livres liturgiques ou de droit. L’une des bibliothèques les plus variées est sans doute celle d’un prévôt d’Arles : l’inventaire après décès dressé en 1472 mentionne une quarantaine d’ouvrages dont des livres de fable, un roman et, rangée dans un studio de sa demeure, une collection d’une dizaine de livres liés à sa fonction de prévôt (dont des livres des statuts de la cathédrale).

Cartographier un quartier canonial, par Y. Esquieu

Dès que l'on a mention d'un quartier canonial dans les sources, il faut tenter de le localiser, situer ses différents éléments sur un plan, le plus précisément possible. Il faut préférer l'établissement d'un plan à une époque donnée à un plan synthétique, concentrant les données de différentes époques, mais qui n'exista jamais comme tel, quitte à ne donner qu'un plan du XVIIe siècle, par exemple.

Attention à bien distinguer la clôture, théoriquement obligatoire, quelquefois mentionnée dans les textes mais qui n'existe pas toujours, qui signifie le grand cloître ou le quartier canonial, et le petit cloître qui est un cloître architectural, à galeries. Quand le quartier est situé à la limite de l'ancienne cité, contre le rempart, sa délimitation est simple, au moins d'un côté. On peut seulement n'avoir qu'un front continu de maisons. Il faut bien distinguer aussi les maisons canoniales qui appartiennent au chapitre (même si les chanoines peuvent en "vendre" l'usufruit) des maisons de chanoines, simplement habitées par eux, quelquefois de génération en génération. Quand la communauté est régulière, il n'y a pas de maisons individuelles sauf pour les dignitaires. Attention à la commensalité qui veut qu'un chanoine héberge d'autres clercs si bien qu'il y a forcément moins de maisons que de clercs du chœur.

On peut ensuite placer sur le plan, dans la mesure de nos connaissances, le palais de l'évêque, le réfectoire, le dortoir (pour les communautés régulières), la salle du chapitre, les selliers, la grange, le four, l'hôpital et/ou l'aumône et le ou les cimetières.

Comment procéder ?

Utiliser :

  • Le cadastre actuel, sauf si tout a été démoli depuis le Moyen âge, qui donne le tracé des rues et des parcelles, à la différence d'un plan de ville ordinaire.
  • Le cadastre napoléonien, qui date quelquefois des années 1830-1840.
  • Aux Archives Départementales, la vente des biens nationaux (séries Q ou L) et les devis estimatifs, très précis pour les dimensions et les confronts.
  • Les cadastres modernes, les registres capitulaires, les visites épiscopales sur les bâtiments communs, les plans anciens (on peut s'y fier pour la forme générale du quartier, pas pour le nombre des maisons), la documentation judiciaire sur les réparations des maisons de chanoines, les descriptions anciennes et les voyages pittoresques d'avant la Révolution Industrielle.
  • Les renseignements disponibles à la Direction générale des affaires culturelles, qui chapeaute plusieurs services : Service régional d'archéologie, Service de l'inventaire général, Centre de documentation du patrimoine, Conservation des monuments historiques.

Jean de Cardalhac, un ou deux personnages ?, par F. Ryckebusch, M. Fournié et E. Bouyé

Dans la notice rédigée par Matthieu Desachy à propos de ce personnage, administrateur du siège de Rodez de 1371 à 1379, plusieurs obscurités restaient à lever à cause desquelles une vaste enquête a été lancée par Michèle Fournié. Plusieurs généalogies de sa famille ont été dressées, à partir des archives du Lot et Garonne, du Lot (qui contiennent le testament de Bertrand, le père de Jean et le procès mené par Ermengarde sa mère à propos de la succession à partir de 1336), du Tarn et Garonne (tableau généalogique des feudistes et acte de 1348 par Hugues, le frère aîné de Jean qui lui délivre un leg). A noter pour les incertitudes concernant Jean, qu'un deuxième Jean de Cardalhac est attesté comme chevalier de Saint-Jean de Jérusalem en 1369. Ensuite, Jean ne fut jamais évêque de Rodez, encore moins prieur de Saint-Caprais d'Agen (Eubel) mais bien administrateur et patriarche d’Alexandrie. Ce n'est pas lui qui a consacré la chapelle axiale de la cathédrale de Narbonne en 1381, il était donc bien à Toulouse à cette date.

Autre querelle aussi sur la paternité de ses sermons. S. Puyo a transcrit ceux conservés à la BNF sur le Grand Schisme et sur les obsèques de Bertrand, son frère, évêque de Montauban. Mais Mgr Mollat a rejeté l'authenticité d'un volume de sermons de la Bibliothèque Municipale de Toulouse, est-ce à revoir ? Il semble bien que Jean ait été un agent de la royauté dans le Midi dans les années 1378-1390. En 1385, il préside avec Jean de Berry, contre lequel les Toulousains se sont révoltés les années précédentes, la cérémonie d'ostension des reliques de Jacques le Majeur, ce qui doit être compris comme l'apaisement après la tempête.

Enfin, les armoiries traditionnellement attribuées à Jean, représentées sur une clef de voûte des Cordeliers de Toulouse, ne sont pas les siennes (elles comportent le chapeau cardinalice alors que Jean n'a jamais été cardinal), mais celles du cardinal de Montfavet.

Biographies de cardinaux, par P. Jugie, P. Montaubin, E. Bouyé, A.-L. Rey-Courtel.

Ces biographies nécessitent un travail de coordination d'un volume à l'autre afin de ne pas se répéter. 62 cardinaux ont déjà été répertoriés dans les volumes parus. Le problème vient du fait que les biographies de cardinaux contenues dans divers ouvrages, sauf dans un dictionnaire des cardinaux qui n'existe pas, concentrent beaucoup d'erreurs copiées à l'envie, qu'il est déjà très long à corriger une par une. Une proposition est faite : un volume exclusivement consacré aux cardinaux ayant eu un bénéfice en France à un moment donné de leur carrière, dans la mesure où les cardinaux ont que rarement eu un rôle important au sein des chapitres où ils étaient chanoines. Ce volume contiendrait les informations données par les sources locales sur leur carrière bénéficiale ce que les ouvrages généraux sur eux négligent forcément. Une affaire à suivre et à étudier de près.

Pour tout renseignement à communiquer sur ces personnages, contacter

  • pour le XIIIe siècle, Pascal Montaubin : montaubi@caramail.com ( mail)
  • pour le XIVe siècle, P. Jugie : Pierrejugie@aol.com ( mail)
  • pour le XVe siècle, E. Bouyé : bouye@tiscalinet.it ( mail)

Compte rendu de la réunion de l'équipe des Fasti du 7 janvier 2011

 

Informations diverses:

Le volume « Autun » des FEG, par Jacques Madignier, est paru depuis la fin de l’année 2010 (78 euros, 477 p.). La présentation de ce volume est disponible.

N. Gorochov a soutenu son HDR sur les universitaires parisiens du XIIIe siècle.

Quatre thèses de doctorat intéressant le groupe ont été soutenues en 2010 :

  • J.-V. Jourd’heuil, La mort et la sépulture des évêques des provinces de Lyon, Reims, Rouen et Sens du XIe au XVe siècle, dir. V. Tabbagh, Université de Bourgogne.
  • A. Le Roux, Servir le pape. Le recrutement des collecteurs pontificaux dans le royaume de France et en Provence de la papauté d’Avignon à l’aube de la Renaissance (1316-1521), dir. C. Vincent, Université Paris-X.
  • E. Rosenblieh, Juridiction conciliaire et juridiction pontificale au temps du concile de Bâle(1431-1449); recours, procédures et suppliques, dir. Cl. Gauvard, Université Paris-I.
  • P. Jugie, Le Sacré Collège et les cardinaux de la mort de Benoît XII à la mort de Grégoire XI (1342-1378), dir. Cl. Gauvard, Université Paris-I.

Livres et articles parus :

  • Da historia eclesiastica a historia religiosa, 2009 (Lusitania Sacra, 21).
  • M. do Rosario Barbosa Morluao (dir.), Testamenti ecclesiae Portugaliae (1071-1325) , Lisbonne, 2010.
  • A. Maria S.A. Rodrigues et alii, Os capitulares Bracarenses (1245-1374) : noticias biograficas , Lisbonne, 2005.
  • J.-R. Armogathe et P. Montaubin (dir.), Histoire générale du Christianisme , PUF, 2010, 2 t.
  • M.-M. de Cevins et J.-M. Matz (dir.), Structures et dynamiques religieuses dans les sociétés de l’Occident latin (1179-1449) , Rennes, 2010 (contributions de Ch. Barralis, E. Bouyé, F. Délivré, A. Le Roux, A. Massoni, J.-M. Matz, Th. Pécout et V. Tabbagh).
  • C. Vincent et J. Pycke (dir.), Cathédrale et pèlerinage aux époques médiévale et moderne , Louvain-la-Neuve, 2010 (contributions de J.-M. Matz et V. Tabbagh).
  • M. Maillard-Luypaert, « Pour le salut de mon âme et l’honneur de mon église. Le testament de Grégoire Nicole, chanoine et official de Cambrai (1466, 1469) », dans Revue du Nord, t. 92, 2010, p. 7-51.
  • Eadem, « Du Hainaut à la Champagne en passant par le Brabant : les avatars de l’Ecclesia semper reformanda (première moitié du XVe siècle) » , dans Publications du Centre Europeen d’Etudes Bourguignonnes, 50, Rencontres d’Avignon (17 au 20 septembre 2009) : " L’Eglise et la vie religieuse, des pays bourguignons à l’ancien royaume d’Arles (XIVe-XVe siècle)" , 2010.
  • V. Tabbagh, « La présence sacerdotale dans le Val de Saône et le bailliage d’Auxois à la fin du XVe siècle » , dans Ibidem, p. 213-226.

Sous l’impulsion de Mgr Doré, archevêque émérite de Strasbourg, les éditions strasbourgeoises «La nuée bleue» viennent de rééditer une monographie de la cathédrale de Strasbourg et d’en éditer une autre de la cathédrale Reims. L’histoire du clergé y tient une place importante. Chaque volume, patroné par l’ordinaire du lieu, réunit les contributions du clergé, d’universitaires, d’archivistes-paléographes et d’historiens de l’art (B. Jordan est l’un des auteurs pour Strasbourg, P. Demouy a dirigé le volume de Reims). D’autres volumes sont annoncés (Quimper, Chartres, Bourges, Rouen).

Pour plus d'informations, le site des éditions "La nuée bleue": http://www.nueebleue.com/

Plusieurs colloques sont annoncés :

  • 18-19 mars 2011, Evêques et cardinaux princiers et curiaux, XIVe-début du XVIe s., Université de Lille-III / Grand-Séminaire de Tournai (contact : M. Maillard-Luypaert). Pour en savoir plus: le site de présentation du colloque
  • 24-25 mars 2011, Réalités provinciales en histoire religieuse. Autour de la Lorraine (XIIe-XVIIIe s.), Université de Metz (contact : Ch. Barralis).
  • 12-14 mai 2011, Munich, Les chapitres cathédraux en Allemagne et en Italie au Moyen Âge.
  • 8-10 juin 2011, Bourges, colloque Eglise et Etat en l’honneur d’H. Millet.
  • Fin 2011, Les bibliothèques canoniales, Université de Rouen.
  • 12-14 décembre 2011, collège des Bernardins, colloque sur la cathédrale de Paris (programme diffusé sur le site du diocèse).
  • Juin 2013, Aix-en-Provence, Les comptabilités princières, de Genève à Aix, de la deuxième moitié du XIIIe s. au début du XIVe s. (contact : Th. Pécout).

Pour les réunions prochaines, trois thèmes de réflexion sont proposés :

  • les cathédrales régulières
  • les activités charitables des chapitres
  • les utilisations possibles des notices FEG et leur valorisation

Fabrice Délivré évoque le GDRE relatif à la prosopographie et à l’héritage des clercs dans la culture européenne. Une réunion a eu lieu à Lisbonne, rassemblant portugais, français, italiens et hongrois. Les travaux prosopographiques varient en fonction des pays. Ils sont terminés en Angleterre (équipe dissoute), embrassent des périodes différentes (mi-XIIe s. – 1325 au Portugal, la suite des recherches commence à peine) ou des corpus différents (prosopographie du clergé diocésain en Hongrie). Les relations sont fragiles avec l’Italie, le Royaume-Uni et l’Allemagne. Il faudrait avoir des approches thématiques pour élargir les problématiques. Une réunion du GDRE est envisagée du 17 au 19 novembre 2011 à Angers sur la mobilité des clercs.

Hugues Labarthe (ANR Corelpa) constitue un atlas européen des établissements religieux et cartographie les bénéfices des clercs.

Avranches, évolution urbaine d’une cité épiscopale du XIe au XVIIIe siècle, par David Nicolas-Méry (conservateur du Musée d’Avranches):

D. Nicolas-Mery étudie l’architecture civile de la baie du Mont-Saint-Michel du XIIe au XVe siècle dans le cadre d’une thèse dirigée par E. Lorans. Cet espace n’avait pas encore été prospecté. Le temporel de l’abbaye du Mont avec ses dix prieurés y est plus représenté que celui de l’évêque. L’étude morphologique se fonde sur la lecture des plans modernes. Il subsiste trois maisons médiévales dans la cité, outre quinze celliers-caves. La cathédrale a été arasée en 1802 et fouillée dans les années 1970. La cité est partagée en deux pôles : la cathédrale dans la ville haute, l’église St-Gervais sur l’ancien forum qui correspond à la partie basse. Il n’y a pas de quartier canonial médiéval. En 1269, avec l’autorisation du roi qui est seigneur de la ville, l’évêque accorde le droit de constuire sept maisons canoniales contre le rempart. Douze chanoines sont alors cités alors qu’il devait en avoir une vingtaine.

Présentation du Dictionnaire biographique en ligne des chanteurs des XVe et XVIe siècles, par David Fiala:

D. Fiala a soutenu une thèse de musicologie sur la musique à la cour de Bourgogne à la fin du XVe siècle (Université de Tours). Il dirige une prosopographie des chantres de la Renaissance (3 600 fiches informatisées). Le terme de « musicien » est anachronique. Les chanteurs d’église sont des clercs, qu’il faut différencier des instrumentistes. Dans les sources, « chantre » est un mot difficile à cerner. Distincts du chœur des enfants, les chanoines musiciens lisent la notation musicale pour la polyphonie et pas seulement pour le plain chant. Une grande partie de la polyphonie est improvisée. Ils forment une communauté homogène qui circule d’une cité à l’autre. Ils sont de quatre à douze (Cambrai) par chapitre et se rencontrent sous une grande variété d’appellation. On peut se demander ce que signifie un canonicat dans leur carrière. Jean II est le premier roi à avoir une véritable chapelle musicale, une demi-siècle après le roi anglais. Ensuite, chaque cour adopte ce système. Les organistes sont par ailleurs mal connus.

Une discussion suit pour cerner avec plus de prudence le mot « chantre » et celui de « chapelain » notamment lorsque cela concerne le service du pape. V. Tabbagh remarque que beaucoup de ces chanoines musiciens ont des enfants illégitimes au XVe siècle, phénomène de plus en plus accepté à cette époque.

Les collecteurs apostoliques, par Amandine Le Roux

A. Le Roux expose les grands traits de sa thèse concernant les personnes chargées de la collecte des redevances dues à la papauté. 384 collecteurs disposent d’une notice qui a puisé notamment aux Archives du Vatican. De nombreux chanoines sont mis en cause dans des procès. Il fallait comprendre une méthode de gouvernement, de Jean XXII à 1521. Les sources parlent de collector, nuncius, receptor ou encore commissarius. La Chambre apostolique choisit un de ces quatre mots pour une mission spécifique. AL a étudié les procédures de nomination (bulles) et les qualités demandées. Jusqu’à Eugène IV, la France et la Provence sont les principaux contributeurs de la papauté. Son approche prosopographique a permis de dresser une typologie de cinq profils. Un exemplaire de la thèse est déposé à la bibliothèque des Fasti.

Notice institutionnelle de Saint-Brieuc, par M. Glaz

Faute de temps, M. Glaz (master, Université de Brest) présente une partie de la notice institutionnelle de Saint-Brieuc. Jusqu’il y a peu, on pensait que le diocèse avait été fondé au IXe s. mais il semble que la première mention d’un évêque ne remonte pas au-delà de 1024/34. Le siège échappe donc au « modèle breton » du saint celtique venu fonder un monastère devenu ensuite siège d’un évêché. St-Brieuc est un démembrement d’Alet avec 116 paroisses mais aussi 15 enclaves de Dol. Deux archidiaconés sont connus au XIIe siècle mais de doyennés ni d’archiprêtrés. Il n’y pas de quartier canonial dans la cité. Les comtes d’Avaugour exercent la régale du XIIIe au milieu du XIVe siècle. L’évêché est taxé à 2 400 fl. Douze prébendes sont connues au chapitre en 1233 puis quatorze en 1330. Une liste de 1470 indique 17 chanoines.

Compte rendu rédigé par Jean-Vincent Jourd’heuil