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Contenu du volume :

  • 458 pages.
  • 1164 notices prosopographiques.
  • 29 biographies d'évêques.

Ce volume contient en outre une carte du diocèse, ainsi qu'un chapitre sur les livres de la cathédrale, un autre sur les stalles et une notice accompagnée d'un plan pour l'implantation canoniale dans la ville.

  • Avant-propos, par Hélène Millet, directeur du programme.
  • Extrait du volume : "les archidiacres du Vexin Français", page 59.
 

Diocèse de Rouen : avant-propos, par Hélène Millet

Dix-huit mois après la sortie du premier volume consacré au diocèse d’Amiens, voici celui sur le diocèse de Rouen, préparé par Vincent Tabbagh. Ce délai paraîtra peut-être long au regard de l’objectif affiché d’entrée de jeu d’embrasser toute l’étendue de la France actuelle. Mais il semblera plutôt court à qui voudra bien considérer que l’auteur a dû remanier son fichier pour tenir compte des critiques et des améliorations proposées, suite à la première publication. Aussi a-t-il droit à toute la reconnaissance des personnes réunies autour du projet Fasti, et tout particulièrement à la mienne, pour son inaltérable patience et son sens du bien commun.

Par rapport au volume sur Amiens qui a donc pleinement joué — comme nous le souhaitions — un rôle de prototype, celui sur Rouen se distingue d’abord par l’augmentation de la taille et du nombre des rubriques des notices biographiques du répertoire informatisé, celles portant notamment sur la carrière bénéficiale locale. En offrant plus d’espace aux données, nous avons surtout voulu leur donner le moyen d’être plus précises. Les modifications de présentation qui en découlent ne devraient pas avoir affecté la lisibilité des notices. Nous nous sommes aussi efforcés de mieux aider le lecteur dans le dédale des abréviations concernant les références — ajoutant à la mystérieuse mention SD un numéro qui permettra de se rapporter au régeste établi à la section de Diplomatique et des Sources documentaires de l’IRHT qui nous a servi de source1 — et nous espérons avoir amélioré la présentation et la confection des indices.

Comme nous l’espérions également, certains lecteurs ont joint leurs efforts aux nôtres pour compléter les informations dont nous disposions. Le fichier sur Amiens demande ainsi déjà à être mis à jour à partir des nombreux renseignements que fournissent les comptes rendus rédigés par Heribert Müller et Christian Kleinert. Pour Rouen, l’esprit de collaboration et la grande disponibilité de nos collègues allemands nous a permis d’inverser la vapeur : les lecteurs trouveront dans ce volume leurs additions et corrections intégrées dans ses notices par Vincent Tabbagh lui-même. En outre, l’heureuse rencontre de David Spear dans un congrès a également permis de bénéficier des acquis de ses recherches, menées outre Atlantique. Ces remarquables coopérations méritent d’être saluées comme des exemples à suivre ; nous espérons continuer longtemps dans cette voie et accueillir encore bien d’autres collaborations.

Pour la confection de chaque volume, il y a donc à la fois toute une équipe et un maître d’œuvre. Cette façon de travailler explique pourquoi certaines notices de l’introduction ne sont pas signées tandis que l’autres le sont. Lorsque l’apport des spécialistes est prépondérant, il nous a paru juste de signaler ainsi leur contri­bution ; dans d’autres cas, il faut tenir pour responsable le maître d’œuvre, sachant qu’il s’est appuyé non seulement sur ses propres connaissances mais encore sur une somme impressionnante de renseignements patiemment collectés et généreusement communiqués par d’autres que lui. Le volume sur Rouen a ainsi bénéficié de la collaboration de Pierre Bony pour les sceaux, Édouard Bouyé pour l’héraldique, Pascal Montaubin et David Spear pour les individus vivant au XIIIe siècle, Heribert Müller et Christian Kleinert pour ceux du XVe siècle, tandis que Kristiane Lemé, Nathalie Manoury et Jacques Le Maho apportaient un concours plus facilement localisable.

Mais il faut aussi rappeler combien précieux sont les apports des différents fichiers établis par les équipes du CNRS ayant accepté de s’associer au program­me Fasti. Anne-Marie Hayez et Janine Mathieu dispensent largement les trésors patiemment accumulés en Avignon et Élisabeth Lalou ceux du Corpus philippicum désormais consultable à l’IRHT de Paris. En ce même lieu, Jean-François Genest oriente les visiteurs de la section de codicologie. À l’UMR « Culture, politique et société en Europe IXe-XVIe siècles », ce sont Carla Bozzolo et Jean-Philippe Genet qui sont mis à contribution pour le fichier des humanistes à Villejuif et la base de données des universitaires à Paris. Surtout, c’est à l’IRHT d’Orléans que nous trouvons une aide et un soutien de tous les instants auprès de l’ensemble du personnel, Anne-Marie Legras accueillant les lecteurs à la section de Diplomatique et des sources documentaires où nous est ouvert le fichier jadis géré par Odile Grandmottet.

Les différentes pièces de l’ouvrage étant ainsi rassemblées, il revient au maître d’œuvre d’en faire un livre, en les plaçant, un peu à la manière d’un puzzle, dans les cases précédemment définies par le programme. Mais la trame ainsi préétablie ne dit pas à quoi doit ressembler l’ouvrage car chaque diocèse a sa physionomie propre et des spécificités dues à l’histoire ou à l’implantation. Elles apparaissent dans les différentes parties de l’introduction, la notice institutionnelle en particu­lier, ainsi que dans les notices consacrées aux évêques. Pour ces dernières, en l’absence de contrainte rédactionnelle, l’auteur peut librement faire apparaître une problématique qui est la sienne, s’attarder sur un individu, exploiter des sources moins obligées… L’austère outil de référence qui a pour principal objectif de recenser des individus et de les couler dans un moule descriptif limité et uniforme s’offre avec elles quelques pages plus engagées pour esquisser l’originalité d’une existence et d’un diocèse.

La partie centrale de chaque volume demeure toutefois le catalogue de notices biographiques, — rangées dans l’ordre alphabétique des prénoms puis des noms — réalisé à partir d’une base de données informatisée. L’automatisation des opérations a parfois généré des coquilles que nous n’avons pas toujours su débusquer. Le volume d’informations que peut stocker chaque enregistrement étant forcément limité et leur mise en forme standardisée, il en résulte moins une véritable notice biographique qu’une fiche de renseignements. Leur finalité n’est pas de retracer une vie mais de fournir des éléments précis d’identification, à partir desquels se dessine un profil de carrière.

La base de données rouennaise diffère de celle consacrée à Amiens en ce qu’elle comporte quatre nouveaux champs, trois étant destinés à recueillir davan­tage de précisions sur la carrière capitulaire, le quatrième étant dévolu aux rensei­gnements sur l’inhumation. Ces additions n’affectent en rien la structure générale de la base et, par voie de conséquence, celle des notices. Dans l’économie généra­le du projet, il est en effet capital que les différentes bases de données soient cumulables. Dès à présent, nous travaillons à l’élaboration d’un programme permettant la gestion et l’interrogation d’une seule grande base portant sur l’ensemble de la population des notables des diocèses de France de 1200 à 1500. Mais nous n’attendrons pas l’achèvement des 130 bases diocésaines pour réaliser un Cd-rom, support qui permettra de faire bénéficier le lecteur des progressives mises à jour de l’information.

En attendant, nous avons dû établir un protocole pour la saisie des données concernant les individus appelés à figurer dans plusieurs bases diocésaines. Ils portent dans chacune un numéro matricule différent. C’est ainsi que Jean de La Rochetaillée est repérable à la fois sous les codes AM576 (base d’Amiens) et RO4352 (base rouennaise). Le volume sur Rouen étant paru en second, on y trouvera la référence AM576, et non l’inverse. Lorsque deux notices se trouveront en contradiction, la dernière en date devra être tenue pour meilleure ; les éléments déjà fournis dans la première seront repris dans la seconde, dans la mesure de la place disponible, et sauf s’il s’avère plus important de donner une information nouvelle.

Malgré notre bonne volonté, il restera certainement encore dans ce volume beaucoup d’incorrections. En prosopographie, la recherche de la perfection peut devenir synonyme d’ajournement indéfini de la publication. C’est pourquoi, encouragés en cela par Louis Holtz vers qui va toute notre gratitude, nous avons pris le risque de l’édition progressive et partielle des résultats déjà acquis. La satisfaction d’avoir sous les yeux un résultat tangible de nos efforts s’est avéré un stimulus non négligeable. Mais ceux d’entre nos lecteurs qui ont eu la gentillesse de nous dire ou d’écrire que, tels qu’ils sont, les Fasti sont déjà fort utiles, ont assurément trouvé le meilleur moyen de nous inciter à poursuivre.

Paris, le 16 octobre 1997, Hélène Millet, directeur du programme.

 

Extrait du volume concernant le diocèse de Rouen

Les archidiacres du Vexin Français (page 59)

ExtraitRouen

(...)

 

 
diocèse de Rouen

 

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Contenu du volume :

  • 308 pages.
  • 787 notices prosopographiques.
  • 22 biographies d'évêques.

Ce volume contient en outre une carte du diocèse, et un catalogue de 202 clercs exclus du corpus. Dans ce volume, à défaut de notice particulière, on trouvera un catalogue détaillé des individus que, pour diverses raisons, les lecteurs pourraient s'attendre à retrouver dans cette population et qui en ont été sciemment exclus. Ainsi apparaissent d'autant plus clairement les principes du recensement.

« C'est en exploitant des sources dispersées qu'il a réussi à mettre en oeuvre une belle étude qui, malgré les difficultés, remplit les exigences du plan de travail et répond aux attentes des chercheurs, avides de données prosopographiques fondées. » (C. Van den Bergen-Pantens in Scriptorium, 2001 (1), p. 66*-67*, 157)

  • Note liminaire, par Hélène Millet, directeur du programme
  • Extrait du volume : "les exclus de Besançon", page 235.

 

 

Diocèse de Besançon : note liminaire, par Hélène Millet

Avec le « Diocèse de Besançon », la collection des Fasti Ecclesiæ Gallicanæ s’enrichit d’un volume qui est, à la fois, conçu sur le même modèle que les précédents et différent à bien des égards.

Ce constat est d’abord rassurant. Il signifie que les règles de traitement et de rédaction de l’information qui ont progressivement été testées et formulées au sein du groupe de recherche sont suffisamment souples pour ne pas avoir à être modifiées à chaque variation institutionnelle ou documentaire d’un peu d’importance. Avec le chapitre de Besançon, nous pénétrons en effet dans un monde canonial régi par la cooptation, où, d’ordinaire, il est question de réception dans la communauté et non de collation. Un monde, en outre, où la possibilité de passer d’une prébende à une autre (jugée mieux située ou plus lucrative) a généré des stratégies de mobilité bénéficiale inconnues dans les diocèses avec lesquels a débuté la collection. Bien qu’initialement non prévue pour répondre à une telle situation, la structure des informations n’a pas eu à être révisée, si bien qu’il n’a pas non plus été nécessaire de modifier la présentation des notices issues de la base de données.

Le lecteur ne sera donc pas désorienté. Toutes les conventions qui, nous l’espérons, lui sont désormais devenues familières sont restées en usage. Ce qui est un incontestable avantage pour l’utilisateur n’est cependant pas forcé­ment ressenti comme tel au moment de la collecte des données. Pour le chercheur, il serait tellement plus simple de suivre le mouvement naturel de ses sources ! Mais, outre la facilité de consultation, c’est aussi la rationalité de l’ensemble de l’entreprise qui requiert la fixité des principes présidant à la construction des bases de données. La parution d’un volume n’enrichit pas seulement les connaissances à l’échelon du diocèse ; elle marque aussi une notable progression au niveau de la France entière, et même un peu au delà. Quiconque a déjà eu recours aux tables diocésaines que contient chaque livre sait combien poreuses sont les frontières entre les provinces ecclésiastiques et a fortiori entre les évêchés. Notre collection a beau ne comporter que quatre numéros, on commence à voir se dessiner les contours d’une population canoniale dont on pressent chaque jour un peu mieux l’importance à l’éche­lon du royaume de France, des principautés limitrophes, et même, surtout en matière culturelle, de la chrétienté occidentale.

C’est pourquoi, le chantier du CDRom cumulatif est d’ores et déjà à l’étude. Sa réalisation suppose bien évidemment une bonne harmonisation des efforts et la compatibilité de travaux individuels, entrepris simultanément depuis presque une dizaine d’années. Elle suppose aussi que soient retravail­lées les notices des individus présents dans plusieurs diocèses, afin qu’elles ne se présentent pas comme une suite de membra disjecta. Tout cela revient à exiger des auteurs beaucoup de dévouement ainsi qu’une discipline qui n’est certes pas sans mérite mais pour laquelle ils doivent être remerciés.

A ceux de nos lecteurs qui nous aimeraient moins succincts, je répondrai seulement que nous comprenons parfaitement leurs attentes, mais que, même en doublant la dimension des notices, nous ne parviendrions pas à satisfaire tous les désirs. Le rythme de parution des volumes s’en trouverait considéra­blement allongé, ce qui ne serait pas sans répercussion sur la dynamique de l’ensemble du projet. Tels qu’ils sont, les Fasti Ecclesiæ Gallicanæ représen­tent déjà un défi puisque le programme est irréalisable à l’échelle d’une vie humaine : il faut compter 65 ans de labeur ininterrompu si deux volumes paraissent chaque année… On ne peut alourdir davantage le cahier des charges sans risquer de faire s’envoler les bonnes volontés. Rappelons que chaque collaborateur est d’abord un bénévole qui n’est poussé par aucune obligation professionnelle. Henri Hours, l’auteur du présent volume, a la responsabilité d’un dépôt d’archives départementales. Lorsqu’il proposa de prendre en charge le diocèse de Besançon, à titre de loisir, il était en poste à Lons-le-Saunier ; puis il a été muté à Clermont-Ferrand. Heureusement, il avait alors quasiment achevé le dépouillement des registres de délibérations capitulaires. Difficiles à lire, ils ont fourni une matière jusque-là restée parfaitement inédite. Ce livre est d’abord riche de leur contenu. Le copieux appendice des “ exclus ” qui clôt le volume répond d’ailleurs au désir de ne pas laisser échapper une partie des informations qu’ont livrées ces registres, alors que, manifestement, les individus concernés étaient toujours restés aux portes de l’institution canoniale bisontine.

Cette importante annexe constitue une originalité et, tout comme les petites notices introductives qui ont jusqu’ici illustré, dans les autres volumes de la collection, certains aspects de la vie ou de la culture canoniale, elle apporte un complément d’informations utile et distrayant. En la consultant, le lecteur comprendra mieux la difficulté du travail de recensement qui est à la base de chacun des volumes. Ce que nous voulons d’abord réaliser, c’est en effet : circonscrire la population des notables diocésains, dire qui était chanoine de tel chapitre et qui ne l’était pas, repérer quels étaient les assis­tants de l’évêque. Pour cela, nous devons évidemment identifier les individus. Ainsi, les notices que nous dressons pour eux n’ont pas d’autre ambition que de donner des éléments d’identification. Mais lorsque nous les connaissons davantage, nous ne gardons pas ce savoir pour nous. En revanche, nous ne prétendons nullement avoir épuisé le sujet et remercions par avance les lecteurs qui nous font part d’informations supplémentaires.

Pour nous donner une meilleure chance d’atteindre nos objectifs, nous avons exclu de notre champ d’action les collégiales, quelle que soit leur importance. Elles n’apparaissent donc que fort peu dans nos livres, au détour d’une notice ou, un peu plus systématiquement, dans le cadre du diocèse étudié. Au niveau des sources, le partage est aisé à effectuer. Au niveau des individus, il est évident que les populations se chevauchent largement. Comme, de surcroît, la méthode est la même qui permettrait de les repérer, plusieurs chercheurs travaillant sur les collégiales ont rejoint notre équipe, où ils forment désormais un petit groupe déterminé à faire avancer le sujet. Audaces fortuna juvat !

Orléans, le 28 octobre 1999, Hélène Millet, directeur du programme.

 

Extrait du volume concernant le diocèse de Besançon

Les exclus de Besançon (page 235)

Personnages cités comme chanoines, mais que l'on a cru devoir écarter pour les raisons expliquées [personnages tirés des dépouillements des registres de délibération capitulaires, mais qui sont sans doute restés aux portes de l'institution capitulaire bisontine, cf p. VIII].

  • Bénéficiaires d'expectatives dont on n'a pas la preuve qu'ils aient effectivement été pourvus d'une prébende.
  • Chanoines reçus et installés par le chapitre sans que l'on ait la preuve qu'il ont par la suite obtenu une prébende.
  • Personnes qui ont été mentionnées comme chanoines de Besançon par divers érudits et paraissent devoir ne pas être retenues.

... de PRATO

chanoine prébendé de Saint-Vit 1442r 07 04- ....

G 179, f° 132 ; aucune mention ultérieure : réception sans suite.

 

Amicus POURSAT

chanoine .... 1437 ....

c. Diocèse Besançon Vercel

g. Testament 1437

Connu seulement par G 531 f° 310, (inventaire du XVIIIe s.), et n'est pas mentionné dans les délibérations capitulaires.

Andreas ANGLICI

chanoine 1432r 10 20- ....

archidiacre Salins 1432r 10 20- ....

G 178, f° 255 ; aucune trace d'attribution d'une prébende ; un autre est nommé archidiacre de Salins en décembre 1433.

Andreas POUTHIER

réception sans prébende 1496 03 29 ; est restée sans suite.

b. Diacre.

c. Diocèse Cambrai.

G 189, f° 69.

Annetus CARPETI

présente une grâce expectative 1430 ; est restée sans suite.

f. Maître.

G 178, f° 206 v°.

(...)

 
diocese besancon

 

 

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Contenu du volume :

  • 272 pages.
  • 890 notices prosopographiques.
  • 26 biographies d'évêques.

Ce volume contient en outre une carte du diocèse, ainsi qu'un chapitre sur les livres de la cathédrale et une notice accompagnée d’un plan pour les stalles et pour le quartier canonial.

  • Présentation de la collection, par Hélène Millet, directeur du programme
  • Présentation du volume.

 

présentation de la collection des Fasti Ecclesiae Gallicanae, par Hélène Millet

Le présent volume ouvre une collection qui devrait, à son terme, compter 130 fascicules. Autant de fascicules que la France — considérée dans ses limites actuelles — recouvrait de diocèses après les créations de Jean XXII en 1316-1318. Dans chaque volume, le lecteur trouvera des tables chronologi­ques pour les évêques, leurs principaux auxiliaires et les dignitaires du chapitre cathédral ainsi que des notices biographiques pour eux-mêmes et tous les chanoines prébendés de la cathédrale de 1200 à 1500. Les notices consacrées aux évêques sont rédigées de façon traditionnelle ; les autres sont le résultat de l’édition automatique d’un fichier prosopographique informatisé. Cet ensemble est précédé par une copieuse introduction destinée à éclairer les cadres de la vie diocésaine et à faciliter la compréhension des renseigne­ments donnés dans les notices.

Sans le concours d’une équipe de chercheurs nombreux et motivés, il ne pouvait être question de lancer pareil programme. Un soutien financier du CNRS et le généreux accueil de l’IRHT lui ont permis de se réunir et de travailler depuis 1990. D’abord constituée en Groupement de recherche (GDR) tout entier occupé à travailler à la collection, elle est devenue partie d’un GDR plus vaste, voué à l’étude des sources religieuses, placé sous l’égide de Gerson et dirigé par André Vauchez. Actuellement forte d’une soixantaine de collaborateurs bénévoles, elle a mis en chantier les volumes de plus de trente diocèses.

Tandis que les Mauristes français élaboraient la Gallia christiana, John Le Neve dotait l’Angleterre de Fasti Ecclesiae Anglicanae. Par son titre et par ses ambitions, notre programme se rapproche davantage de l’entreprise anglaise que de la Française. Comme elle, il a laissé de côté les établisse­ments monastiques et il se contente de donner succinctement quelques informations biographiques ; mais il entend surtout l’imiter dans sa politique de révisions périodiques, que rend désormais plus facile le recours à l’informatique. Si nous n’avions pas été soutenus par l’espoir que nos listes et nos notices seraient un jour corrigées et améliorées, sans doute n’aurions-nous jamais osé les publier, car nous avons une conscience aiguë du caractère lacunaire de nos sources et de leurs difficultés d’interprétation. Mais nous avions aussi la conviction qu’il fallait lancer la recherche pour qu’elle puisse progresser.

Faire paraître au plus vite un premier fascicule nous a paru une tâche prioritaire. Beaucoup mieux que de longs discours, un exemple permet en effet d’expliciter les règles à suivre, aussi bien en matière de recherche que de présentation des résultats. Amiens nous a donc servi de banc d’essai. Durant les quatre années où nous avons travaillé à nos listes et à nos notices, nous nous sommes attachés, Pierre Desportes et moi-même, à définir une méthode. Au fur et à mesure, nous en avons discuté les points les plus délicats en comité de direction et en assemblée plénière. Certains tâtonne­ments ont, sans aucun doute, été préjudiciables à la cohérence du fichier. Mais nous sommes maintenant parvenus à définir un moule dans lequel tous les diocèses parviendront à se couler, sans que les ajustements parfois néces­saires ne viennent mettre en péril l’économie générale du projet.

Car les fascicules des Fasti Ecclesiae Gallicanae, tout en s’efforçant de tenir compte du « génie » propre de chaque diocèse, sont d’abord conçus comme les éléments d’un ensemble et destinés à jouer le rôle d’outil de travail auprès de la communauté des historiens. Ils se veulent opérationnels non seulement à l’échelle du diocèse mais encore de la France entière puisque, durant les trois siècles couverts par l’entreprise, les notables ecclésiastiques séculiers ont eu tendance à former une société relativement homogène qui se jouait des limites diocésaines. A terme, c’est une tranche sociale cohérente que restituera la collection et que matérialisera un Cd-rom où seront cumulées, corrigées et complétées les informations contenues dans chaque volume.

Cette façon de travailler conduira les lecteurs — tel est du moins notre souhait — à coopérer à l’œuvre entreprise en nous signalant les erreurs qu’ils pourront repérer ainsi que les renseignements supplémentaires dont ils dispo­sent. La collaboration sera d’autant plus nécessaire que, pour certains diocèses particulièrement pauvres en sources locales, il conviendra d’élargir la documentation. De ce va-et-vient avec les lecteurs, nous attendons qu’il nous permette de combler peu à peu une lacune importante de l’historiographie française.

Orléans, le 1er avril 1996, Hélène Millet, directeur du programme.

Présentation du volume d'Amiens

La publication, en mai 1996, du premier volume de la collection Fasti Ecclesiae Gallicanae créée par la maison d'édition Brepols a marqué une étape, particulièrement importante, dans la progression des travaux de ce programme. Grâce à ce prototype, les objectifs à atteindre sont désormais clairs, non seulement pour les collaborateurs, mais encore pour la communauté internationale des médiévistes à qui s'adresse cet outil de travail : un recensement du personnel ecclésiastique diocésain (évêques, auxiliaires de l'évêque, dignitaires et membres du chapitre cathédral) de la France (dans ses limites actuelles) entre 1200 et 1500, accompagné de notices prosopographiques pour chacun des individus ainsi recensés.

Le prototype de la collection : le diocèse d’Amiens

Le premier volume de la collection porte sur le diocèse d'Amiens. Il a été réalisé par P. Desportes et H. Millet, avec l'aide de 8 collaborateurs, à partir d'une base de données comportant 1114 enregistrements et concernant 916 individus, la différence entre ces deux chiffres résultant de l'obligation d'effectuer pour un seul individu autant d'enregistrements qu'il a de titres à entrer dans la base.

Ce volume de 260 pages comporte cinq parties :

  • une introduction de 38 pages (avec une carte du diocèse et deux plans) comportant une notice institutionnelle, une étude sur les livres du trésor de la cathédrale, le résumé d'une thèse sur les stalles de la cathédrale, une esquisse sur le quartier du cloître, un répertoire des sources utilisées, et la bibliographie.
  • 12 tables chronologiques pour les évêques et les dignitaires du chapitre (8 pages).
  • des notices biographiques détaillées (34 pages) pour les 26 évêques qui se sont succédé de 1169 à 1501.
  • 916 notices prosopographiques issues de la base de données, rangées par ordre alphabétique des prénoms (132 pages)
  • 3 instruments pour repérer les individus (35 pages):
    • un index des différentes formes de leurs noms
    • un index des diocèses cités en matière bénéficiale
    • un index de leurs numéros d'identification
Carte diocèse d'Amiens

 

 

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Contenu du volume :

  • 253 pages.
  • 475 notices prosopographiques.
  • 25 biographies d'évêques.

Dans le volume consacré à Rodez, on trouvera une carte du diocèse, une notice sur les bibliothèques canoniales et les livres conservés à la cathédrale, une notice sur les stalles et une étude sur le quartier canonial comportant un plan fondé sur le livre d’estimes de 1449. « (...) ce volume apporte une précieuse contribution à la prosopographie rouergate du second Moyen Âge. » (Jean-Loup Lemaitre dans Revue d'histoire de l'église de France, tome 89, n° 223, juillet-décembre 2003, p. 439-442).

  • Note liminaire, par Hélène Millet, directeur du programme
  • Extrait du volume : "Les vicaires, auxiliaires de l'évêque", pages 60-61.
 

Diocèse de Rodez : note liminaire, par Hélène Millet

Depuis le 1er janvier 2002, les Fasti Ecclesiae Gallicanae ont franchi une nouvelle étape administrative. Connus du CNRS comme un programme du Groupement de recherche GERSON (GDR 1132), les Fasti pouvaient redouter les effets néfastes de la dissolution de ce GDR, atteint par la limite d’âge légale, après huit années de bons et loyaux services. Mais nos autorités de tutelle – la Commission 32 de la Recherche scientifique et la Direction du département des Sciences humaines et sociales – ont reconnu les bienfaits d’un organisme spécifique aux travaux d’histoire religieuse et ont autorisé la formation d’un nouveau GDR. Dénommée SALVÉ (Sources, Acteurs et Lieux de la Vie religieuse à l’époque médiévale), cette fédération de projets impliquant la collaboration de douze établissements d’enseignement supérieur ou de recherche est à la fois placée sous le signe de la continuité et riche de potentialités. Sur ses sept programmes, deux ont été lancés à l’occasion de sa création, et cinq proviennent de GERSON, non sans avoir subi des transformations, au moins pour trois d’entre eux.

Les Fasti Ecclesiae Gallicanae sont l’un des deux projets qui continuent sur leur lancée. En pleine phase de production, notre programme a plus besoin de suivi que de rénovation ! Les cadres dans lesquels s’effectuent les recherches, les objectifs à atteindre et les modalités de la collaboration entre chercheurs sont désormais bien établis. L’attente du public porte sur la parution de nouveaux volumes. En revanche, les procédures informatiques sur lesquelles reposent la fabrication des bases de données et la production des livres de la collection ont besoin d’être révisées. Pour ce faire, comme tant d’autres équipes de recherche en Sciences humaines, nous souffrons cruellement du manque d’informaticiens attachés à nos organismes, auprès de qui travailler dans la longue durée. Autant il est facile de trouver un financement pour l’achat d’une machine, autant la course d’obstacles est épuisante pour mettre en place une application, y intégrer les nécessaires mises à jour et débloquer les « plantages » ! Or voici maintenant six ans que la chaîne de traitements auxquels sont soumises nos bases de données a été mise au point. Et six ans, c’est un siècle dans le monde de l’informatique ! Les logiciels qui nous étaient familiers ont vieilli plus vite que nous. Un sérieux lifting s’impose… que les collaborateurs espèrent et redoutent à la fois. Nous espérons qu’il rendra moins acrobatique la phase finale d’édition. Le lecteur quant à lui ne devrait même pas avoir conscience du changement : l’informatique est à la fois ancillaire et tyrannique.

Les adeptes d’Internet ont dû remarquer que notre site s’était assoupi. Pourtant, un dialogue a commencé à s’amorcer entre les lecteurs et les colla­borateurs par ce canal. Mais l’IRHT qui nous héberge gracieusement a, tout comme nous, essuyé quantité de difficultés ; sans accès au site, nous étions dans l’impossibilité de le mettre à jour. Il devrait rouvrir prochainement, après refonte, mais au prix d’un changement d’adresse.

Matthieu Desachy a commencé à travailler sur les chanoines de Rodez lorsqu’il était élève à l’École des chartes. Pour sa thèse, il avait déjà fabriqué une base de données, sans même avoir pu disposer d’un tirage sur papier présentant ses notices de manière satisfaisante : les procédures d’édition dont nous nous plaignons aujourd’hui n’existaient pas encore. Il a utilisé les années qui le séparent de ces temps héroïques à continuer d’explorer un fonds d’archives capitulaires quasi inépuisable. Si certains ont à déplorer les pertes et les destructions, lui a dû gérer l’abondance. Ses notices comportent donc des détails sur l’accès au chapitre qu’on serait bien en peine de fournir pour d’autres diocèses, notamment, en bien des cas, la date de prise de possession de la prébende. Il a également souvent pu préciser la stalle assignée à chacun, et il aurait pu établir des tableaux de présence au chœur à partir des pointes…

Après Agen, Rodez contribue donc à tirer les Fasti vers le Midi. Et comme Matthieu Desachy est un fervent praticien de la langue d’oc, il s’est attaché à nous livrer les noms de ses chanoines avec les originalités de la graphie locale. Lorsque le moment sera venu de verser au pot commun du CD-Rom la base de données ruthénoise, il conviendra de faire se retrouver les Cardaillac avec les Cardalhac et les Plainechassagne avec les Planecassanhe. Voici encore un chantier à faire progresser. En attendant, les numéros d’identification assignés à chacun suffiront à lever toute ambiguïté.

Orléans, le 7 novembre 2002, Hélène Millet, directeur du programme.

Erratum:

Sur le rabat de couverture du volume d’Agen, deux coquilles se sont glissées:

  • L’une est facile à corriger : la structure des notices épiscopales comporte deux numéros 8.
  • L’autre est une erreur de code (heureusement non utilisé dans le cours du volume sur Agen) : Besançon est abrégé en BS et non pas en BE. La même erreur se retrouve à la page 129.
 

Extrait du volume concernant le diocèse de Rodez

Les vicaires, auxiliaires de l'évêque (pages 60-61)

Vicaires

Vicaires

Vicaires administrateurs

Vicaires administrateurs


(...)

 

 

 
Diocèse Rodez

 

 

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Contenu du volume :

  • 417 pages

 

 

La parution du quinzième volume de la collection Fasti Ecclesiae Gallicanae intervient un peu plus d’un an après celle du volume consacré à Châlons-en-Champagne. Il faut s’en réjouir, même si nous ne progressons qu’à pas mesurés, compte tenu du nombre de diocèses à couvrir par notre entreprise collective – et sans compter, pour l’instant, les nombreux diocèses qui n’ont toujours pas trouvé de responsable scientifique.

Jacques Madignier n’est pas un nouveau venu dans notre équipe. Élève de Vincent Tabbagh, docteur en histoire avec une thèse sur le chapitre cathédral d’Autun, il a déjà publié en 2010 le volume de la collection consacré à ce même diocèse – le premier dont notre équipe de direction actuelle, collégiale, m’a confié la responsabilité scientifique. Dans l’élaboration du présent volume, il a fait preuve des mêmes qualités de précision et de rigueur, appréciées autant par Laurent Vallière, responsable de la partie « base de données » que par moi-même. Il a pleinement conscience de la dimension collective du travail mené, et la longue liste des remerciements que contient son avant-propos en est une très belle preuve.

Avec ce quinzième volume, comme il l’explique dans cet avant-propos, les Fasti font leur deuxième percée dans les diocèses bourguignons de la province ecclésiastique de Lyon. Sous la plume du même auteur, elle révèle une expérience canoniale originale, très différente de la situation autunoise, avec une communauté de chanoines réduite à un peu plus d’une vingtaine de membres, d’où le nombre relativement limité des individus identifiés dans les sources – près de 450 chanoines et dignitaires seulement en trois siècles. Ce chapitre cathédral est marqué par un recrutement avant tout local, féodal ou citadin selon les cas, mais dans un milieu peu enclin à s’ouvrir aux influences extérieures. Certains évêques s’inscrivent en contrepoint, mais le diocèse de Chalon donne à la collection l’exemple d’un chapitre fort modeste et vient ainsi enrichir la palette des communautés étudiées et des ressorts diocésains envisagés. Les volumes qui sont en préparation – Auxerre pour la prochaine livraison – viendront encore la diversifier, pour le plus grand avantage de la communauté scientifique. Dans sa conception d’ensemble, ce volume se situe dans une grande continuité par rapport aux précédents et le lecteur désormais familiarisé retrouvera les notices, les tables et les indices habituels.

 

Les Fasti sont une collection, mais ils continuent d’abord à être une équipe de chercheurs, avec une direction collégiale assurée par Christine Barralis, Fabrice Delivré, Pascal Montaubin, Thierry Pécout, Laurent Vallière et moi-même. Riche d’une cinquantaine de collaborateurs régulièrement présents à nos réunions, tous vont connaître à partir de 2016 une nouveauté. Sous le poids de contraintes financières, mais aussi parce que la recherche et ceux qui la mènent savent modifier des usages, évoluer et s’adapter, de deux rencontres annuelles, l’équipe va passer à une journée par an, mais dont la nature évolue. Elle est appelée à prendre la forme d’une journée d’étude thématique destinée à la publication, sur des supports divers. C’est une belle opportunité pour accroître la visibilité des productions de l’équipe. La première, sur les chapitres cathédraux et la mort, a eu lieu le 18 mars 2016.

Comme la vie au quotidien, à commencer par celle des communautés canoniales auxquelles se consacrent les Fasti depuis maintenant un quart de siècle, l’existence d’une équipe de recherche est aussi marquée par de bien tristes évènements. Après la disparition de Pierre Desportes – auquel on doit le volume sur Reims et une partie de celui d’Amiens – qui avait tant donné pour la préparation du volume sur Chartres, diocèse malheureusement en panne pour le moment, l’équipe a été frappée par le décès de Benoît Brouns, qui s’occupait depuis longtemps du diocèse de Narbonne. Dans les années passées, deux demi-journées de nos rencontres avaient été consacrées à cet archidiocèse, preuve de la fécondité des recherches actuellement menées sur lui. En mémoire de sa rigueur scientifique, de sa modestie et de sa profonde humilité, nous avons décidé de mener à bien la publication posthume du volume consacré à Narbonne. Hélène Millet a bien voulu, de son propre élan, assurer la constitution d’une équipe et la coordonner en vue d’aboutir à cette production. La base des données prosopographiques et la notice institutionnelle étaient finalisées avant sa disparition. Elles lui doivent tout. Le reste du volume sera donc collectif, en son honneur. Il montrera, son heure venue, la capacité toujours manifestée par les Fasti de faire prévaloir la vigueur des intérêts collectifs.

Angers, le 31 mars 2016
Jean-Michel Matz

 

 
chalon
 

 

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Contenu du volume :

  • 606 pages

 

 

Pour l’équipe des Fasti Ecclesiae Gallicanae, l’année 2016 restera très certainement comme un excellent millésime puisque la parution à l’automne de ce seizième volume de la collection sur Auxerre intervient quelques mois seulement après celui consacré au diocèse de Chalon-sur-Saône, sorti juste avant l’été. Il faut remonter à 1998 pour retrouver une année aussi faste, avec la publication à peu de distance des deux volumes sur les sièges archiépis­copaux de Rouen et de Reims. Nous devons ce nouvel opus à Vincent Tabbagh, un des piliers du groupe des Fasti depuis sa création il y a maintenant un bon quart de siècle, qui avait justement assuré cette année-là la publication du volume sur Rouen, avant de donner celui sur Sens en 2009 – métropole voisine d’Auxerre de laquelle ce siège était suffragant. C’est dire s’il est rompu à l’exercice, qu’il relève à chaque fois avec brio.

Auxerre vient enrichir notre collection avec le cas d’un diocèse en apparence plutôt modeste – environ deux cents paroisses seulement – qui présente en particulier un net contraste entre l’envergure du pouvoir de l’évêque et un chapitre très en retrait. Le prélat, qui se revendiquait major dominus in spiritualibus et temporalibus in comitatu et diocesi Autissiodorensi, avait en effet une puissance féodale considérable – il affirmait d’ailleurs détenir son temporel de Dieu seul ! Les Gesta episcoporum d’Auxerre ont encore amplifié le rayonnement de ces prélats et entretenu leur mémoire pour l’éternité. Les revenus du siège épiscopal le plaçaient alors dans la tranche supérieure des évêchés du royaume de France. Si l’on ajoute encore à ces données la richesse des sources les concernant et le fait que le diocèse d’Auxerre détient à l’échelle du royaume, avec trente-quatre individus, le record du nombre de prélats en ayant assumé la charge entre le xiiie et le xve siècle, le lecteur comprendra mieux l’ampleur inhabituelle prise par les notices biographiques qui leur sont consacrées, d’autant que prennent place parmi eux plusieurs personnages éminents.

À l’opposé, le faible prestige et les revenus limités des prébendes du chapitre cathédral auxerrois rendent compte quant à eux du recrutement sans grand relief de la grande majorité de ses membres. Avec cinquante-neuf prébendes, dont plusieurs étaient attachées à des dignités ou des personnats, la communauté était pourtant particulièrement fournie, ce qui explique que la base de données constituée par Vincent Tabbagh dépasse les neuf cents individus, même si l’auteur peut déplorer que l’effectif total n’a pu être reconstitué, du fait de sources lacunaires pour le début de la période couverte, ce qui est très souvent le cas, mais plus encore pour le xve siècle. La structure et la chronologie des fonds conservés sont en effet très variables d’une cathédrale à l’autre et l’on a déjà maintes fois souligné cette grande variété des situations documentaires locales. Ainsi, à la différence d’autres volumes des Fasti, l’absence de sources n’a pas permis de nourrir des développements sur les bibliothèques ou le trésor constitués par les évêques et les chanoines au fil des siècles, ou des études sur les dispositifs liturgiques ou les décors déployés dans ces églises.

La réalisation d’un volume des Fasti Ecclesiae Gallicanae n’est pourtant pas seulement tributaire de l’état quantitatif et qualitatif des sources médiévales aujourd’hui disponibles. Elle tient également à la vigueur ou non de l’ancienne érudition locale à la plus ou moins grande vitalité de la recherche scientifique contemporaine. Dans le cas présent, Vincent Tabbagh a bénéficié d’un contexte très favorable grâce aux travaux du Centre d’Études Médiévales d’Auxerre. Christian Sapin – en collaboration avec Sylvain Aumard et Fabrice Henrion – donne ainsi une notice particulièrement détaillée du quartier cathédral. Sylvain Aumard et Patrice Wahlen présentent ensuite la chapelle Notre-Dame-des-Vertus, installée dans le portail sud de la façade occidentale de la cathédrale Saint-Étienne, qui fut à la fois le lieu d’un pèlerinage et un centre d’inhumation jusqu’à l’époque moderne. Le volume d’Auxerre est donc riche d’éléments sur l’environnement monumental de ces hommes d’Église.

Depuis l’origine de la collection, les notes liminaires ont permis à leurs auteurs successifs de présenter avec plus ou moins de prolixité les évolutions de notre équipe, de préciser les changements intervenus dans les modalités de fabrication des volumes et d’annoncer les diocèses en voie de progression ou d’achèvement. Nous serons brefs sur la vie de l’équipe, que de nouveaux chercheurs continuent à rejoindre au gré de recherches entreprises dans des cadres variés, pendant que d’autres membres sont amenés pour des raisons diverses à prendre un peu de distance avec elle. Elle reste donc bien vivante. La nouvelle formule adoptée par la réunion désormais annuelle du groupe de recherche en est d’ailleurs la preuve : la prochaine journée d’étude des Fasti est ainsi programmée le 24 mars 2017, avec pour thème la place des chapitres cathédraux dans l’assistance aux derniers siècles du Moyen Âge, un thème qui est très loin d’avoir révélé toute sa substance. Quant aux échéances à venir en matière de publication, l’expérience nous a appris la prudence. Certains diocèses annoncés un moment comme imminents attendent en effet toujours leur achèvement de longues années plus tard. Dans le même temps, des travaux universitaires mis en chantier par de jeunes chercheurs ou des thèses récemment soutenues laissent augurer rapidement de nouvelles perspectives dont il faut se réjouir. Il ne fait pas de doute que l’avenir est assuré, même s’il est aujourd’hui impossible d’en donner le calendrier.

 

À Angers, le 15 juin 2016
 Jean-Michel MATZ

 

 
Auxerre

 

 

 

Compte rendu de la réunion de l'équipe des Fasti du 7 janvier 2005

 

Informations générales

Travaux d’ensemble

Le tome IX des Fasti concernant le diocèse de Sées est paru fin mars. C’est un volume de 193 pages. Le croisement entre les volumes des Fasti commence à être significatif :

Fabrication d’une base de données

L’année 2005 sera consacrée à la configuration d’une base de données. Son support reste à étudier (CD-Rom, base en ligne ?) Cette base de données facilitera l’harmonisation des différents volumes des Fasti en donnant des consignes de mises à jour, de corrections…

Question à l’équipe des Fasti

Quelle sera la participation des Fasti au séminaire de J. Verger et H. Millet, désormais pris en charge, alternativement, par les programmes du GDR Salvé sur la thématique « L’Église et les églises en Occident à la fin du Moyen Âge » ?

V. Tabbagh évoque les rapports entre l’église-mère et le reste du diocèse. D’autres sujets sont proposés concernant les synodes, les transports de reliques, les fêtes, les serments de fidélité.

Nouvelles

La perspective d’une réunion d’hiver à Avignon est annulée, l’EFR n’ayant pas donné suite à l’offre d’une manifestation commune à l’occasion de la publication du 2d CD Ut per litteras apostolicas et du CD de la base données cumulées des Fasti.

Une rencontre est organisée à Montpellier le 4 février sur le diocèse de Mende par le programme « L’Église et les fidèles du Midi » du GDR, avec la participation de Philippe Maurice et Hélène Millet.

Un colloque aura lieu à Albi les 31 mars-1er avril, sur les cités épiscopales.

Devant les difficultés d’organisation du stage de liturgie animé par Jean-Baptiste Lebigue, primiti­vement prévu à Orléans le 2 juillet prochain, il a été décidé de le repousser à l’hiver prochain, à Paris.

Christine Barralis a soutenu sa thèse : Le siège épiscopal de Meaux du XIIIe au XVIe siècle.

Distribution du programme du colloque Mabillon qui aura lieu à Poitiers le 21 janvier 2005.

La bibliothèque des Fasti, située en salle G 687 à la Sorbonne est facilement accessible depuis que Willy Morice y travaille en permanence. S’assurer néanmoins par prudence de son ouverture par téléphone : 01 40 46 31 73. Il est possible d’emprunter les livres.

Publications

I. Les entrées épiscopales dans la cité de l'évêque en France, fin XVe siècle, par Véronique Julerot

Dans la continuité de sa thèse sur les élections épiscopales en France à la fin du XVe siècle, V. J. étudie l’entrée épiscopale, primum ingressus, ultime étape pour l’évêque dans le processus de prise de possession de son siège. Ce n’est, en effet, qu’après l’élection et sa confirmation – ou la provision apostolique –, le sacre, le serment de fidélité prêté au roi, que l’évêque peut entrer dans sa cité et prendre possession solennelle de son église.

Contrairement à l’élection et au sacre, l’entrée n’obéit pas à des règles de droit canon, et contrairement au serment de fidélité, les ouvrages de droit ne la mentionnent pas. On retrouve cependant ce rituel dans d’autres sources dès le 13e siècle (cf. Guillaume Le Maire à Angers). On sait que l’entrée épiscopale existe depuis l’Antiquité tardive (M. McCormick), mais il n’est pas question de confondre le rituel du 15e siècle avec l’adventus antique, même si certains liens peuvent être décelés. Contrairement aux entrées royales qui ont bénéficié de travaux considérables (depuis B. Guenée, F. Lehoux, Les entrées royales françaises… 1968), l’intérêt pour les entrées épiscopales est plus diffus (articles du xixe siècle ou plus récents mais fondamentaux comme ceux de P. Demouy sur Reims, J. Théry sur Thérouanne, et notices des Fasti).

Les sources:

Les chroniques sont d’un maigre secours : le Petit Thalamus ne décrit que trois entrées pour sept évêques à Montpellier et le Bourgeois de Paris, sans doute chanoine de la cathédrale, donne beaucoup plus de détails sur les entrées royales que sur les entrées épiscopales. V. J. s’appuie principalement sur deux catégories de sources à conjuguer, partielles et partiales : des actes de la pratique : registres capitulaires et communaux ; et des sources judiciaires : conflits de juridiction, procès opposant deux candidats à un évêché.

V. J. nous présente dans un premier temps le squelette d’une entrée, puis tente une archéologie de ces entrées par une analyse structurale.

Le squelette d’une entrée:

Une entrée implique quelques préludes. L’élu, ou le pourvu reconnu, et le chapitre conviennent d’une date et préviennent les autres participants. Vient alors la préparation des lieux : le chœur de la cathédrale, la ville. Il n’y a pas de traces conservées d’organisation de spectacle. La veille de l’entrée, le prélat est reçu par une procession (conseil municipal, clergé) à l’extérieur de la ville et conduit jusqu’à un établissement régulier, le plus souvent bénédictin, sis extra muros : Saint-Ouen à Rouen, Saint-Victor à Paris, Saint-Sulpice à Bourges. Selon les textes, il mange et dort, ou prie pendant la nuit. Vient ensuite la cérémonie. Revêtu des habits pontificaux, l’évêque s’incline devant les reliques du monastère, offre quelque drap précieux, et prête serment de respecter les privilèges de l’établissement. Un cortège, constitué de tous les corps constitués de la cité, vient chercher l’évêque. À Paris, l’évêque sort de Saint-Victor accompagné des officiers municipaux pour rejoindre Sainte-Geneviève. La procession emmène le prélat par la porte Bordelle – ou « Saint-Marcel » – à Paris, celle du Grand-Pont à Rouen, celle de Saint-Sulpice à Bourges. À Rouen et Paris, les moines accompagnent le futur évêque jusqu’à la cathédrale tandis qu’à Bourges ils restent à l’extérieur des murs. L’évêque se rend à la cathédrale soit transporté par les vassaux qui lui ont fait hommage (Paris, Bourges), soit à pied (Rouen, où l’évêque est en outre déchaussé dans une église paroissiale avant de gagner la cathédrale). La procession qui accompagne l’évêque rencontre alors celle des chanoines. Des gestes liturgiques sont échangés. L’évêque prête serment de respecter les droits de l’Église. Alors seulement la porte de la cathédrale peut s’ouvrir. À Paris l’évêque sonne une clochette ; il est écrit que c’est en signe de possession. Tous vont à l’autel : don de draps d’or, répons, intronisation, installation dans la chaire. Messe. La cérémonie se clôt par un déjeuner, prandium solemnium (au sens de solennel ou traditionnel ?). Voilà présentée l’ossature d’un cérémonial, qui, dans les faits, se décline selon des spécificités propres à chaque diocèse.

Cette présentation d’ensemble est l’occasion pour V. J. de s’interroger, à propos de ce cérémonial sur les notions de temps, espace et acteurs. Le temps : En raison de la fréquence du choix du dimanche, V. J. s’interroge sur des liens avec le sacre de l’évêque (Cf. art. Pierre Batifol « La liturgie du sacre », 1927) : habits pontificaux, entrée sur deux jours, deux pôles : monastères/cathédrale. L’espace : le passage de la porte est toujours mentionné dans le récit. S’il n’a pas fait son entrée, les chanoines ne permettent à l’évêque de Paris d’entrer dans la ville que sous certaines conditions, et par certaines portes. Par la distinction entre l’extérieur et l’intérieur de la ville, la mémoire de l’adventus antique (Kantorowicz) saute ici aux yeux. La procession de l’entrée suit un trajet entre deux pôles religieux (monastère et cathédrale), avec des étapes à caractère religieux (églises, cimetière), et traverse deux portes, celle de la ville et celle de la cathédrale. À chacune d’elles, des acteurs différents livrent la personne de l’évêque. Ainsi, il s’agit plus d’une succession de réceptions plutôt que d’une unique entrée. Les acteurs : la foule (à l’entrée de Georges d’Amboise à Rouen, distribution d’indulgences). Les vassaux qui rendent hommage : le portage est un service dû pour un fief précis (pas de vassaux à Reims ou Rouen). Le rôle des moines met en exergue le clergé surtout masculin et surtout bénédictin. Pourquoi ? Exercice du droit de gîte (Simon de Cramaud à Reims), lieu de passage que constituent les terres du monastère (cf. P. Demouy), lieu où sont conservées les reliques des évêques fondateurs, où sont enterrés les premiers évêques. (À la mort de l’archevêque à Rouen les chanoines le rapportent aux moines : « vous nous l’avez baillé vivant ; nous vous le rendons mort »). Les chanoines quant à eux représentent l’Église locale à eux seuls (cf. Fasti Desportes pour les serments).

Le pouvoir de l’impétrant est soigneusement délimité par les serments exigés de sa personne, ce jour-là, par les moines et chanoines. Mais tous les présents sont autant de témoins du rite de possession de l’évêque. L’entrée est donc un rite performatif, où l’autorité de l’évêque est mise en place. Les chanoines peuvent être forcés à recevoir un évêque, tel Louis de Beaumont à Paris en 1472 – ils doivent alors patiemment supporter son entrée, puis son épiscopat. C’est un rite-mémoire, un mémorial à plusieurs strates. Il découle de l’adventus christianisé. De l’époque mérovingienne, il retient le rôle fondamental des moines. Des temps carolingiens, lorsque le chapitre gagne en indépendance, la place des chanoines et lorsque la féodalité s’est structurée, celle des vassaux. Mais de toutes les mentions de monuments de la Gaule antique, aucune ne se réfère à une entrée. On ne trouve pas une description complète du rituel avant les 13e et 14e siècles. Cette communication est donc aussi un appel pour le signalement de sources conservant la mémoire de ces entrées, notamment les actes devant notaires, gardant trace des serments.

Cette communication a suscité une discussion animée autour, notamment, d’H. Millet, F. Comte, V. Tabbagh, C. Barralis, D. Le Blévec, J. Madignier, P. Desportes, C. Vulliez, M. P. Subes et P. Montaubin.

 

II. Les participants français au concile de Constance, par Sophie Vallery-Radot

Le concile de Constance (1414-1418) occupe une place considérable dans l’histoire des assemblées de l’Église. Ses deux principaux objectifs : mettre un terme au Grand Schisme et mener la réforme de l’Église. Ce concile rassemblant des centaines de participants laïcs et ecclésiastiques permet le brassage, les échanges de tous ces participants. Pour faciliter son organisation et améliorer son efficacité, l’assemblée conciliaire est divisée en nations : italienne, allemande, anglaise, française et espagnole à partir de 1417. S. V.-R. s’intéresse à la nation française, un vocable comprenant les individus appartenant alors au royaume de France stricto sensu, et aux régions frontalières de Bourgogne, Lorraine, Provence, Savoie et Gascogne. L’histoire de la nation française, au sein même de l’assemblée conciliaire, est le reflet de la guerre civile qui sévit en France.

L’historiographie est considérable mais lacunaire et difficile d’accès. Il n’y a pas d’étude systématique sur les acteurs du concile hormis les principaux, Pierre d’Ailly et Jean Gerson. Il n’existe rien sur la nation française, ni sur les membres qui la composent. C’est en cela que réside l’intérêt de tenter de reconstituer la liste des participants au concile. Pour cela, nous disposons de listes contemporaines ou légèrement postérieures au concile, dispersées dans les différentes bibliothèques européennes. Dans la majorité de ces listes, le classement des participants au concile suit un ordre hiérarchique ce qui rend difficile l’identification des membres de cette nation, notamment dans le cas des procureurs, et en ce qui concerne les localisations.

S. V.-R. est finalement arrivée à identifier 285 individus quand une source (P. Glorieux, Le concile de Constance au jour le jour, Tournai, 1965) mentionne pour la seule nation française près de 400 participants dont 200 docteurs.

Cette recherche, tant sur la nation française à Constance que sur les individus qui la constituent, et sur leurs relations, attitudes et marges de manœuvre, intéresse au premier chef les membres des Fasti. C’est pourquoi, S.V.-R a préparé une liste des participants au concile pour l’équipe des Fasti en les classant par diocèse (liste envoyée sur demande).

En étudiant, à l’échelle de l’Église, l’implication d’individus que nous croisons dans les sources locales, S. V.-R. offre une problématique à la connaissance érudite. L’exercice de mise en relation de l’activité conciliaire avec les sources locales est forcément périlleux. Les membres des Fasti ont une belle occasion de prouver que la collaboration n’est pas un vain mot.

Signalez les sources et envoyez vos fiches biographiques à S. V.-R. par mail : s.vallery-radot@hotmail.fr

 

III. Les élections épiscopales devant la juridiction du concile de Bâle, par Émilie Rosenblieh

L’antagonisme entre les deux grandes traditions ecclésiologiques, conciliaire et pontificale, porté à son comble sous Eugène IV, touche, entre autres, aux désignations épiscopales. D’un coté, le concile se justifie par une tradition conciliaire ancienne, fort du 17e canon de Chalcédoine fondant sa juridiction, tandis que le pape défend la tradition de l’affirmation pontificale (causae maiores définies par Innocent III). En 1432, les Pères instaurent des tribunaux conciliaires, deux décrets de 1433 et 1436 tentent de réinstaurer la liberté de l’élection contre la volonté d’Eugène IV. L’attitude du roi de France Charles VII, protégeant le concile et négociant avec le pape, est pour le moins ambiguë.

Les sources. Aucun registre de procédure relatif aux causes épiscopales de France n’est conservé. E. R. a utilisé des sources conciliaires non judiciaires, tel le protocole de Pierre Brunet (nombreuses notations brèves et allusives sur les causes françaises), et les Gesta de Jean de Ségovie, qui couvrent le concile de Bâle jusqu’en 1442 (riches notices relatives à des procès). E. R. a également effectué des sondages dans les registres pontificaux et dans ceux du Parlement. Trouver des sources locales relatives à ce problème est plus ardu : celles de Paris n’offrent, par exemple, aucun intérêt pour Bâle.

Toutes les provisions pontificales concernant le royaume de France ne causent pas des conflits (cf Agen 1439). Mais dix-huit évêchés font recours devant le concile. Il est toujours difficile de reconstituer chacune des procédures et même de savoir si elles ont eu lieu. Cependant, sept sentences sont connues à propos d’Albi, Bayeux, Marseille, Saint-Pons, Sées, Sisteron, Tournai. En quoi la connaissance de telles causes nous disent l’attitude du roi de France vis-à-vis de la législation conciliaire ?

Eugène IV, défendant le système de la réserve générale, n’admet pas le principe des élections. Le concile de Bâle, en revanche, prétend protéger les élus. Dès août 1431, il reçoit un appel contre Jean de la Palu, nommé par le pape à l’évêché de Lausanne. L’assemblée conciliaire fonde sa position en créant deux décrets. Le premier, Sicut in construenda, s’inspire du Décret de Gratien et des Décrétales. Il s’inscrit dans la tradition de réforme contre la simonie. Le pape ne peut rien exiger en dehors du droit. Le second, du 22 mars 1436, est élaboré au cours d’une session sur la réforme in capite. Il décrète l’abolition de toute réserve générale ou spéciale. Le concile reconnaît cependant au pape le droit de déroger à ce décret sous certaines conditions. Le concile légifère sur l’élection et se réserve la connaissance des causes. Il suit deux procédures : dans le cas de la cause de l’évêché de Bayeux, les sentences sont rendues par la Rote conciliaire. Dans les autres cas, la décision revient à l’Assemblée elle-même. L’action conciliaire est généralement favorable aux élus, contrairement à la Rote romaine défendant le favori pontifical. Les élus appelants, reconnaissant l’autorité du concile de Bâle par leur simple appel, gagnent déjà un sacré avantage.

Les cas d’application de la juridiction contre l’intervention pontificale ne manquent pas. En mars 1439, sentence en faveur de R. Talon, élu de Sisteron, incorporé au concile dès 1433, et membre actif des ambassades. À Albi, encore, le concile donne droit à l’élu contre le favori pontifical. Jean de Ségovie associe cette sentence pro electo à un jugement en faveur de la réforme contre la désignation pontificale. Mais on compte également avec des sentences favorables aux provisions pontificales. Dans le cas de Sées : l’archevêque de Rouen, qui dit ignorer le décret conciliaire De electionibus, confirme Jean de Peyrusse pourvu par Eugène IV. D’après Jean de Ségovie le concile aurait donné raison, en 1438, à l’élu pontifical. Pour quelle raison le concile agit-il ainsi ? Il semble que là l’élément déterminant, soit l’intervention du roi. Ce qui semble certain, c’est que de nombreuses condamnations par contumace sanctionnent le simple fait d’ignorer le concile. Le seul fait d’être incorporé au concile pour suivre son procès est un avantage... même pour défendre un privilège pontifical. À Lausanne, Trêves, Utrecht, les sentences sont favorables aux candidats pontificaux.

Comment le concile justifie le mépris de ses propres décrets ? La question de l’application du décret De electionibus est au centre des négociations entre le concile et le pape : le pape devrait respecter le décret tandis que le concile pourrait s’en écarter pour des raisons particulières. Le concile tente d’imposer à l’Église sa souveraineté. Jean de Ségovie s’étonne du verdict favorable dans certaines affaires après la promulgation du décret De electionibus. Il emploie le terme de vexationes pour Sées et Trêves. Quel est son rapport à la juridiction conciliaire ? Il est un théologien, défend la juridiction conciliaire, qu’il assimile à la mission de paix assignée au concile par le pape.

Les décrets De electionibus sont reproduits dans le texte de la Pragmatique Sanction de 1438, in extenso pour le premier, sous une forme amendée pour le second : Sicut in construenda invitait les laïcs à ne pas faire ingérence dans les désignations, ni par des menaces, ni par les prières. Les prières sont désormais acceptées. On note, de la part du roi de France, de grandes réticences à l’égard de la juridiction conciliaire. Par l’ordonnance de Saint-Denis, en 1441, le roi rappelle que les décrets conciliaires ne peuvent être appliqués dans le royaume antérieurement à la promulgation de la Pragmatique Sanction. Et le projet de reconnaître les sentences du concile rendues avant 1438 n’aboutit sur aucune ordonnance. Ainsi, la Pragmatique Sanction est davantage conçue pour donner du poids aux Parlementaires sur les causes majeures, plutôt que pour reconnaître la juridiction conciliaire. En 1440, interdiction est faite d’invoquer toute sentence issue du concile. Le roi de France préfère traiter soit avec le Parlement soit avec le Pape. Il n’en a pas toujours été ainsi. Jean de Ségovie atteste l’existence des rapports entre le roi de France et le concile. Ainsi, le 18 mars 1435, deux lettres de Charles VII sont lues au concile, une en faveur d’un élu pontifical, l’autre en faveur d’un décret conciliaire où le roi de France tonne contre l’arbitraire pontifical.

Beaucoup de sentences du concile (Bayeux, Tournai, Saint-Pons) sont largement influencées par le roi de France. Mais il y a également des sentences contre l’avis du roi de France qui risquent de ne pas être exécutées. En effet, les sentences conciliaires n’ont d’impact que si elles sont soutenues par des forces sociales, royales notamment. À Albi, le sénéchal de Carcassonne met ses troupes au bénéfice du candidat du roi contre l’évêque élu soutenu par la cité d’Albi et le comte de Pardiac. Dans ces affaires, la personnalité du requérant et la puissance de son réseau de soutien, seraient deux facteurs décisifs. Quant au roi de France, il est très prudent vis-à-vis de la législation conciliaire, et tente de tirer parti du concile par l’exercice d’influences.

 

Une discussion animée a suivi avec J. N. Rondeau, P. Montaubin, V. Julerot et J. M. Matz sur des questions de droit et pour le signalement de sources locales.

 

IV. Informations et travail sur le cumul des bases de données : les notices des cardinaux

Quel que soit le support (CD ou mise en ligne) qui abritera la base de données résultant du cumul des informations publiées dans les 9 premiers volumes de la collection, sa réalisation sera la priorité pour l’année 2005, car les publications devraient connaître une certaine pause jusqu’en 2006. Il est encore trop tôt pour dire qui d’Auch, Autun, Avignon, Châlons-en-Champagne, Chartres, Clermont, Mâcon, Meaux, Poitiers, Riez, Sens, Strasbourg etc. sera prêt le premier : le concours est ouvert!

Le travail d’analyse et de programmation a déjà commencé avec l’aide de Stéphane Raux. On s’oriente vers une base de données relationnelle qui fournira les informations données dans chaque volume, après qu’elles aient été corrigées et mises à jour par chacun des auteurs. Pour les individus présents dans plusieurs diocèses, le lecteur pourra consulter non pas une notice synthétique mais chacune des notices éditées dans les volumes. Lorsque ces notices présenteront des problèmes de cohésion, voire des données contradictoires, il sera possible de donner des explications dans un fichier spécifique dénommé « arbitrage ». Ce cas de figure n’est pas purement hypothétique : les cardinaux, premiers concernés par le cumul des bénéfices, ont fourni l’occasion de faire des travaux pratiques.

Au commencement du programme, nous avions considéré que les cardinaux étaient des personnages bien connus, à propos desquels nous n’aurions que des informations complémentaires à donner. En fait, ce sont des personnages qu’on croit connaître et sur lesquels circulent des informations erronées. Comme leurs carrières dépassent très largement le cadre de nos enquêtes diocésaines, nous aurons recours autant qu’il sera possible à l’aide de nos collègues qui mènent, ou ont mené, sur eux des recherches spécifiques. Ainsi, pour les cardinaux de l’époque du Grand Schisme, Anne-Lise Rey-Courtel a accepté d’élaborer à notre intention des notices que nous pourrons réutiliser.

Voici quelques réflexions et consignes résultant de ce test sur les cardinaux.

  • Dans le volume sur Angers, 8,5% des individus renvoient à des individus déjà connus dans les autres volumes.
  • Dans le volume sur Mende, le chiffre est un peu inférieur puisqu’il est à 7 %.
    • Jacques Pycke, Sons, couleurs, odeurs, dans la cathédrale de Tournay au XVe siècle, coll. « Tournai Art et Histoire », 2004, 286 p. Il s’agit de l’édition et du commentaire de l’Ordinaire de la cathédrale.
    • Le Midi et le Grand Schisme d’Occident, Toulouse, 2004 (Cahiers de Fanjeaux n° 39).
    • Distribution des bons de souscription pour la thèse de Matthieu Desachy.
    • Chacun des auteurs a l’obligation de connaître et tenir compte des notices qui ont été publiées avant la sienne. S’il n’a pas rencontré lui-même les données fournies par un prédécesseur, il pourra lui faire crédit et les reprendre à son compte.
    • Contrairement à l’utilisateur de la base de données cumulées, le lecteur d’un livre ne dispose pas forcément de tous les livres de la collection. C’est pourquoi il n’est pas inutile de répéter les informations d’une notice à une autre.
    • Il est posé comme un principe qu’on donne des informations de plus en plus sûres. Si on donne une information qui est en contradiction avec celle d’une notice antérieure, ce doit être de propos délibéré, pour corriger ce que l’on considère être une erreur ou une approximation (cas des dates).
    • En vertu du principe énoncé au point précédent, une information qu’on aura omis de répéter sera considérée comme sujette à caution. Mais on ne manquera pas d’objecter qu’il ne sera pas toujours possible de reprendre toutes les informations, faute d’espace suffisant dans les champs. Dans le champ « cumul », une solution sera alors d’ajouter aux données incomplètes la mention « etc. ». Ou, de façon générale, on pourra mentionner dans le champ « biblio » : « Voir la (ou les) notice(s) Fasti antérieure(s) ». Saisir cette mention de façon à ce qu’elle soit éditée juste après les numéros correspondants du champ « Fasti ».
    • Lorsque la correction qu’on estime devoir apporter porte sur des informations pour lesquelles l’auteur précédent est a priori considéré comme plus fiable (car elles portent sur « son » diocèse), il est hautement conseillé de s’en entretenir avec lui.
    • L’auteur qui estimera avoir commis une erreur la corrigera. S’il le juge nécessaire, il pourra s’en expliquer dans le fichier « arbitrage ». Il rendra service aux autres auteurs en les avertissant de son erreur.
    • Ne pas hésiter à se concerter entre auteurs : reconnaître une erreur est un acte qui mérite la plus grande estime.

Compte rendu de la réunion de l'équipe des Fasti du 28 juin 2002

 

Informations générales

Le programme des Fasti Ecclesiae Gallicanae se poursuit désormais dans le cadre d’un nouveau GDR, intitulé SALVE (= Sources Acteurs et Lieux de la Vie religieuse à l’Epoque médiévale) et placé sous la direction d’Hélène Millet. Créé sous le code GDR 2513, il comporte sept autres programmes :

  • Sanctuaires et pèlerinages (C. Vincent)
  • PREALP (D. Rigaux)
  • L’Eglise et les fidèles du Midi (M. Fournié et D. Le Blévec)
  • Actes des évêques (M. Parisse)
  • Archives de la papauté (F. Bougard)
  • Réguliers et réseaux (A. Dubreucq)

Deux entreprises du programme « Archives de la papauté » placées sous l’égide de l’EFR nous intéressent au premier chef :

  • l’informatisation des lettres pontificales. Une étape considérable vient d’être franchie avec la publication du premier CD-Rom Ut per litteras apostolicas. Janine Mathieu est d’ores et déjà au travail pour préparer les suivants.
  • l’informatisation du fichier Lesellier. Son propriétaire, la communauté de Saint-Louis-des-Français a demandé à l’EFR d’en être le maître d’œuvre et celle-ci a passé contrat avec l’IRHT et le GDR pour la conception d’une application sous ACCESS et la saisie des données. Marie-Elisabeth Boutroue (IRHT), Laurent Vallière et Hélène Millet ont uni leurs efforts pour la mise au point de l’application ; elle sera opérationnelle à l’automne. Le chantier est donc ouvert à tous ceux qui le souhaitent. Un système de rémunération par vacation ou par bourse de l’EFR est prévu. Ne manquez pas de vous signaler si vous êtes intéressés.

A l’étranger aussi, les Fastes font recette. Nos collègues portugais ont obtenu le financement d’un programme de recherche sur trois ans. Ils l’ont exposé lors d’une session au Medieval International Congress de Leeds où ont été conviées Diana Greenway (pour les Fasti Ecclesiae Anglicanae) et Hélène Millet. Le numéro de 2003 des Quaderni di Storia religiosa portera sur Capitoli e canonici nel medioev,o avec un article pour rendre compte de l’état de la recherche en France.

Sont en cours de préparation pour une parution à l’automne les volumes sur Rodez (Matthieu Desachy) et Mende (Philippe Maurice). Ils ont donc doublé Angers pour lequel François Comte ne parvient pas à combler son retard. Sées est aussi candidat à une publication prochaine.

Les convocations aux prochaines réunions seront désormais envoyées, sauf impossibilité, par courrier électronique. Merci de signaler votre adresse à Mme Martin.

Il serait bon que de nouvelles bonnes volontés se manifestent pour aider aux divers travaux d’intérêt général : classement des livres de la bibliothèque, gestion de la « Boîte », rédaction des comptes rendus etc.

Diocèse et chapitre de Maguelone.

Daniel Le Blévec a résumé la journée d’étude qui s’est tenue le 13 décembre dernier aux archives départementales de Montpellier. Les communications ont permis une synthèse large, fondement de nombreux travaux futurs, même si bien des interrogations demeurent au sujet de cet évêché situé dans la partie orientale de l’actuel Hérault et dont l’existence fut relativement courte, puisque attesté pour la première fois en 589, il disparut de la carte en 1536, avec le transfert de son siège à Montpellier.

Les contraintes du milieu insulaire ainsi que la proximité de la ville de Montpellier ont largement marqué son histoire. L’université montpelliéraine a ainsi permis l’utilisation de personnel de bonne formation, y compris au plus haut niveau, mais il faut constater que la tutelle de l’évêque y a toujours fait l’objet d’une grande résistance. Plus localement, les liens constants entretenus avec le consulat, à partir du XIVe siècle, ont entraîné la présence de documents importants aux archives municipales, alors que le fonds de la cathédrale n’a pas encore été exploité systématiquement.

La position du diocèse en a fait un enjeu pour la royauté comme pour la papauté ainsi que l’a montré le cas de l’évêque Jean de Montlaur (1160-1190) qui paraît avoir privilégié les liens avec les Capétiens plutôt qu’avec le pape. Cette attitude lui fit d’ailleurs perdre un appui précieux dans le rude et long conflit qui l’opposa au prévôt du chapitre et aux chanoines.

Les chanoines de Maguelone constituaient un chapitre augustin, dont l’étude des Lettres Communes permet d’estimer la relative richesse, avec pas moins d’une trentaine de prieurés cures. Pour la connaissance de la vie quotidienne de la communauté, il faut souligner l’intérêt exceptionnel de statuts rédigés sous l’évêque Jean de Vissec, canoniste mort en 1334. D’une grande ampleur, ils comprennent 107 chapitres et peuvent être rapprochés de ceux de Saint-Victor de Marseille, même s’ils sont beaucoup plus détaillés. On s’interroge encore sur les motivations exactes de leur rédaction.

Un colloque sur la montagne

Michelle Fournié nous a rapidement informés du déroulement du colloque international Religion et Montagne en Europe de l’Antiquité à nos jours, qui s’est déroulé du 30 mai au 2 juin à Tarbes. Les actes de cette réunion axée sur la montagne sacrée et sa topographie ainsi que sur les rapports entre clergé et fidèles, devraient permettre de mieux cerner les éventuelles spécificités montagnardes.

Notice institutionnelle du chapitre d’Évreux

Annick Gossé-Kischinewski a fait part de l’état de ses recherches sur le diocèse d’Évreux qui comptait en 1370 473 paroisses. Des zones d’ombre subsistent, dues en grande partie à des travaux antérieurs incomplets voire erronés et à des incendies ravageurs. Tout ceci explique les difficultés actuelles (combien au juste le chapitre comptait de prébendes ? quel était le montant de la taxatio ? comment étaient les maisons canoniales ?), ainsi que la persistance de notions quasi légendaires faisant la part belle à Rollon. Mme Gossé-Kischinewski a largement déblayé le terrain mais apprécierait toute aide lui permettant d’avancer dans ses recherches.

L’Helvetia Sacra : quel regard sur les chapitres cathédraux suisses ?

Bernard Adenmatten nous a présenté l’Helvetia Sacra, entreprise née au début des années 1960 mais encore peu connue en France. L’Helvetia Sacra traite de l’ensemble des établissements ecclésiastiques helvétiques sans se limiter aux seules institutions diocésaines. L’accent y est mis sur les notices biographiques qui représentent à peu près les deux tiers des ouvrages, le principe retenu étant d’accorder à chaque individu autant de notices qu’il a rempli de fonctions. Ces notices ne concernent pas les simples bénéficiers. Cette volonté parfois discutée a permis à cette collection de se développer rapidement, malgré des contraintes telle que la nécessité de toujours user de la langue officielle des lieux concernés. Le premier volume parut en 1972, le dernier est prévu pour 2007, après l’évocation de 12 diocèses.

Contrairement à ceux des Fasti, les volumes de la collection couvrent une période extrêmement longue, puisqu’il s’agit d’aller des origines à nos jours. Ce choix s’explique par le rôle encore très important que joua l’Église dans les terres d’Empire après le Moyen Âge.

La collection se caractérise par une grande attention portée aux archives dont les fonds bénéficient de descriptions détaillées. La dispersion des archives est telle qu’on ne peut négliger les archives se trouvant à Turin, Annecy, Innsbruck ou Vienne. L’entreprise déborde donc largement du cadre de la Suisse.

Chronique de la finition d’un fascicule

Les problèmes que rencontrent les auteurs des Fasti aux derniers stades de leur travail ont été évoqués par Matthieu Desachy, à propos de son volume consacré au diocèse de Rodez. Il a insisté sur l’importance des tirages papier qui permettent les relectures et peuvent éventuellement être les bienvenus lors de difficultés informatiques. Il ne faut pas négliger non plus l’intérêt qu’il y a à parler de ses « cumulards » aux spécialistes des diocèses concernés, l’utilité de penser à faire une carte facilement lisible sans s’y pendre au dernier moment, et la nécessité de savoir s’arrêter en faisant abstraction d’éventuelles découvertes postérieures. Concernant le diocèse de Rodez en particulier, Matthieu Desachy a évoqué également la question de la graphie des patronymes, question aiguë pour le Midi. A ce sujet, il n’est pas inutile de rappeler que, quelle que soit la solution envisagée sur ce point, il est nécessaire de s’y tenir de façon cohérente et d’en avertir clairement le lecteur.

Les représentations picturales des chanoines

Faire la connaissance de visu d’un chanoine de Laon, telle a été l’expérience à laquelle nous avons été conviés par Inès Villela-Petit, grâce à son identification en tant que commanditaire d’un retable conservé au musée municipal de cette ville. Sur un panneau issu d’un triptyque qui devait surmonter initialement l’autel de la chapelle de la Madeleine est représenté le donateur, un chanoine portant une chape taillée dans un précieux brocart et une aumusse de petit gris. Il tient un bâton cantoral en forme de tau orné de pierres précieuses. Par une datation plus précise de ce retable, l’examen de ses dimensions et l’étude des registres capitulaires, Inès Villela-Petit est parvenue à identifier le chantre Pierre de Wissant, peint alors qu’il était âgé d’environ 70 ans, vers 1410.

De telles représentations de chanoines sont nombreuses, surtout au XVe siècle marqué par l’accroissement des commandes. Le chanoine, surtout à partir de la deuxième moitié du XIVe siècle, y est caractérisé par la présence de l’aumusse, généralement portée repliée sur le bras gauche. Le chantre est représenté avec son bâton cantoral dont la forme n’était pas encore fixée au XIIIe siècle. Il pouvait être alors soit fleuronné, soit fini par un pommeau ou par un tau. Par la suite, le tau l’emporta sans toutefois éliminer des formes plus recherchées. Les portraits collectifs ne sont pas toujours exempts de signes permettant d’identifier quelques chanoines, comme la représentation de clefs pour désigner un trésorier. Mais ils avaient pour objet d’évoquer l’unité du chapitre, alors que les portraits individuels étaient là comme offrande et hommage du chanoine à son église.

Pour commander le volume.

Contenu du volume :

  • 194 pages.
  • 253 notices prosopographiques.
  • 22 biographies d'évêques.

Ce volume contient en outre une carte du diocèse, un plan de l'enclos canonial, six illustrations et une notice institutionnelle avec éclaircissements sur l’appartenance du chapitre à l’ordre canonial, ainsi qu'une étude sur l’enclos canonial.

Dans ce volume consacré au diocèse de Sées, où le chapitre de la cathédrale appartenait à l'ordre canonial de saint Augustin, il n'est pas question de chanoines prébendés mais de chanoines profès. On trouvera des éclaircissements sur cette singularité dans la notice institutionnelle. L'enclos, où vivait la communauté, a fait l'objet d'un article particulier. Les recherches sur les individus ont été prolongées jusqu'en 1547, année de la sécularisation.

  • Note liminaire, par Hélène Millet, directeur du programme
  • Extrait du volume : "Un éveché régulier", pages 8-11.
 

Diocèse de Sées : note liminaire, par Hélène Millet

Qui n'est pas versé dans l'histoire canoniale ne verra rien d'extraordinaire à ce que le neuvième volume des Fasti Ecclesiae Gallicanae soit consacré au diocèse de Sées. Et pourtant ! Dans la province de Rouen et dans la France du Nord tout entière, le chapitre de Sées représente une exception institutionnelle de taille. Devenus réguliers par la volonté de leur évêque en 1131, les chanoines sont restés attachés à la règle de saint Augustin jusqu'en 1547, date tardive s'il en est puisque les seuls à pouvoir leur être comparés dans la région sont les chanoines de Saint-Malo, sécularisés quant à eux en 1319.

La singularité sagienne est une énigme historique qui aurait présenté un attrait certain pour les chercheurs s'ils avaient eu à leur disposition des archives susceptibles de les renseigner. Mais, comme toutes les communautés régulières, le chapitre de Sées est resté marginal par rapport au système bénéficial, et l'inflation bureaucratique générée par celui-ci ne l'a donc pas touché. Cette règle, que l'observation des nombreux chapitres méridionaux, plus tard venus à la sécularisation que leurs homologues nordiques, a permis d'établir, s'est encore trouvée renforcée, à Sées, ville de plat pays, par les destructions dues aux guerres.

Lorsque le programme Fasti Ecclesiae Gallicanae a été lancé, on savait certes que les chercheurs attirés, pour une raison ou pour une autre, par un diocèse dont la cathédrale abritait des chanoines réguliers se heurteraient au manque de documentation susceptible de nourrir un travail prosopographique. Mais les candidats n'ont alors pourtant pas manqué pour oser relever le défi. L'un d'eux était Françoise Loddé, dont le choix s'est porté sur Sées. Et, treize ans plus tard, Sées est le premier de ces diocèses « difficiles » à voir paraître « son » volume dans la collection. Ce ne sont pourtant pas les obstacles qui ont manqué sur le chemin de la recherche et de la publication !

Les attaches provinciales de Françoise Loddé se trouvaient à Saint-Béat en Comminges. En fait, rien ne la destinait particulièrement à travailler sur Sées, si ce n'est la sympathie qu'elle avait éprouvé pour Grégoire Langlois, l'un des cinq testateurs sur lesquels avait porté la thèse de troisième cycle qu'elle avait soutenue à l'Université de Paris-X Nanterre, en 1985, sous la direction de Philippe Contamine. Quelques années plus tard, on pouvait penser que les travaux menés sur les diocèses de la province de Rouen aboutiraient plus rapidement que les autres. En optant pour Sées, Françoise voulait tout simplement apporter sa pierre à l'édifice commun.

Elle avait enseigné en lycée avant de se former à la recherche historique. Celle-ci était pour elle une manière de lutter contre la perfide maladie qui devait l'emporter, le 14 avril 2001, à l'âge de 68 ans. Pour la seconder, Françoise pouvait compter sur la gentillesse et la prévenance de son époux, au bras duquel elle se rendait aux réunions de l'équipe. J'ai ainsi très présent à l'esprit le souvenir de ce 23 janvier 1998, où, dans la salle du bâtiment O à Villejuif, Françoise nous avait présenté les maigres sources dont elle disposait. Nous nous étions tous efforcés de trouver quelques éléments de réponse aux multiples interrogations soulevées par leur exploitation. Mais que de questions étaient — et restent toujours — mal résolues !

Tout de même un peu réconfortée par cette séance, Françoise avait présenté quelques-unes de ses observations à deux colloques d'histoire normande. Elle avait aussi préparé une première mouture de la base de données prosopographiques pour une centaine d'individus. Mais, quand elle s'est éteinte, elle avait surtout achevé de visiter les sources disponibles, préparé quelques-unes des notices et réuni tous les matériaux nécessaires à la rédaction des divers éléments constitutifs d'un volume de la collection. Bien conscient du trésor que cela représentait, Jean-Pierre Loddé a alors légué aux Fasti les caisses de papiers et de documents consacrés à Sées que son épouse avait amassés.

Pierre Desportes, un ami de longue date de la famille Loddé, m'avait accompagnée pour recueillir et inventorier cet héritage. Impressionné par le soin avec lequel Françoise tenait ses notes à jour, il s'est alors offert à reprendre le flambeau, à condition de n'être pas seul à le faire. Vers qui d'autre aller ? Jean-Pascal Foucher, directeur des Archives départementales de l'Orne, avait présenté un panorama imagé de son enquête sur les bâtiments capitulai-res sagiens à notre réunion de janvier 1999, mais il n'avait pas la disponibilité nécessaire. Il accepta cependant de pousser ses recherches jusqu'à rédiger la notice sur le « quartier canonial », notice d'autant plus attendue qu'elle allait mettre en valeur comment le chapitre de Sées avait donné une traduction architecturale de son originalité institutionnelle.

Une bienveillance du hasard me fit trouver un troisième homme. Au sortir de son doctorat sur la collégiale de Saint-Hilaire de Poitiers, Laurent Vallière cherchait à employer ses nouveaux talents. Nous avons donc fait affaire et partagé le travail sur la base suivante : Pierre Desportes allait terminer la notice institutionnelle et, avec la désormais traditionnelle collaboration de Vincent Tabbagh, rédiger les biographies des évêques, tandis qu'il reviendrait à Laurent Vallière de reprendre le fichier prosopographique et de préparer les notices concernant les sources et la bibliographie.

Cela est bien connu. Il est toujours difficile de terminer une recherche entamée par autrui, même lorsqu'elle a été menée avec l'esprit de méthode qui caractérisait Françoise Loddé. Le livre était donc encore loin d'être achevé lorsque Laurent Vallière eut l'opportunité d'aller travailler à Rome pour l'informatisation du « Fichier Lesellier ». Quelle heureuse coïncidence ! Comme Joseph Lesellier était d'origine normande, il avait relevé avec un soin tout particulier les données concernant Sées. Son fichier s'est ainsi avéré une source d'informations complémentaires inestimable pour les notices prosopographiques. Grâce à cet apport, le nombre des individus recensés — surtout les clercs titulaires de dignités, engagés par conséquent dans le jeu des collations apostoliques — a pu être multiplié par deux.

Mais ces découvertes tardives ont aussi compliqué le travail de coordina­tion et de finition entre les auteurs. De retouche en retouche, ce sont parfois des paragraphes entiers qui ont dû être réécrits. Non pas que les suppléments d'information aient toujours apporté une clarté décisive ! Sur les schismes épiscopaux — dont Sées semble s'être aussi fait une spécialité — l'émergence de nouvelles sources a d'abord révélé des incohérences. Il a fallu toute la ténacité de Pierre Desportes, après une attentive relecture par Heribert Müller, pour parvenir à restituer un enchaînement satisfaisant des faits à l'époque de la rivalité entre Jean Chevalier et Jean de Pérusse.

Dernier motif au retard de la publication, l'entorse que ce volume fait subir aux règles établies pour la collection. Il a en effet paru utile de prolon­ger le répertoire jusqu'à 1547, date de la sécularisation du chapitre. Les sources exceptionnellement précises engendrées par ce changement de statut donnaient en effet des aperçus plus que bienvenus sur son état antérieur. Il nous a en outre paru peu probable que nos collègues modernistes reviennent sur cette cinquantaine d'années, eu égard aux spécificités institutionnelle et documentaire de ce diocèse. En acceptant de relire les notices biographiques des évêques du temps de la Réforme, Nicole Lemaitre a permis que soit clos dans les meilleures conditions un dossier difficile à traiter. Mais pour garder son homogénéité au programme, il a été créé deux corpus distincts ; seules les listes présentées par ordre chronologique se prolongent sans rupture au-delà de 1500.

Il m'est particulièrement agréable de souligner combien ce nouveau volume de la collection doit à l'esprit d'entraide qui prévaut dans l'équipe des Fasti . Chacun a eu à cœur de signaler la ou les références qu'il avait pu glaner sur Sées durant son propre parcours de recherche. Le souvenir que nous avions tous de la gentillesse de Françoise Loddé a sans aucun doute donné une valeur supplémentaire à ces gestes. Je suis heureuse d'en offrir le résultat à sa mémoire et à son époux.

Voici donc le diocèse de Sées nanti, quasi miraculeusement, d'un fascicule qui dépasse de beaucoup les dimensions d'une plaquette. La modestie augustinienne — analogue à celle des moines — est effectivement parvenue à cacher les noms de l'immense majorité des simples chanoines : ils ne sont qu'une vingtaine à être sortis de l'anonymat. Mais elle n'a pas empêché les dignitaires de surgir de l'ombre, et, avec la complicité de quelques sources exceptionnelles, nous pouvons entrevoir, de façon certes sporadique, un peu de la physionomie de l'ensemble capitulaire. La notice institutionnelle, plus copieuse qu'il n'est d'usage, rend compte de ces aperçus, ainsi que les notices biographiques des évêques. C'est un pan du mystère des « diocèses réguliers » de France qui est ici soulevé.

Avec ce neuvième volume, le programme de publication des Fasti va connaître une pause. Plusieurs diocèses (Auch, Autun, Avignon, Châlons-en-Champagne, Clermont, Mâcon, Meaux, Poitiers, Riez…) sont dans un état d'avancement qui permet d'espérer un aboutissement prochain, mais il serait actuellement prématuré d'annoncer lequel verra le jour le premier. Ce répit sera mis à profit pour réaliser le projet, prévu dès le début de l'entreprise, de la réunion des fichiers prosopographiques déjà publiés en une seule base de données cumulées, et de sa mise à la disposition des lecteurs. Cette nouvelle phase s'accompagnera de la mise à jour (corrections et additions) des informations. Que tous veuillent bien se sentir concernés par cette opération : rien ne nous rendra plus service que de recevoir les observations des lecteurs. Merci à ceux qui nous ont déjà fait bénéficier de leurs critiques ou de leur savoir, et merci d'avance à tous ceux qui le feront ( mail, hmillet@cnrs-orleans.fr).

Orléans, le 3 décembre 2004, Hélène Millet, directeur du programme.

 

Extrait du volume concernant le diocèse de Sées

Un évéché régulier (pages 8-11)

La singularité de l'évêque de Sées tient au fait que depuis 1131 il se trouve à la tête d'un chapitre régulier. Il importe de bien mesurer la portée de la réforme intervenue. Ce ne sont pas seulement les chanoines qui ont été « régularisés » mais tout le personnel dirigeant du diocèse, à commencer par le pontife lui-même. Jean de Neuville revêtit personnellement l'habit régulier avant de le remettre aux clercs désireux de vivre selon la règle de saint Augustin. Le chapitre est certes dirigé par son prieur mais c'est incontestablement l'évêque qui tient la place du père abbé, présent derrière chaque paragraphe de la règle. Les réformateurs n'ont pas osé faire inscrire dans les textes de 1131 l'obligation pour l'évêque d'être lui-même un régulier. Le système sagien ne peut pourtant fonctionner correctement que si le prélat placé à sa tête possède l'expérience de la vie régulière. Le problème est que, dès le lendemain de la disparition de Jean de Neuville, réguliers et séculiers alternèrent sur le siège épiscopal. Quant aux archidiacres, auxquels incombait la lourde tâche de faire passer le souffle réformateur jusque dans les coins les plus reculés du diocèse, la réforme leur a imposé sans hésitation la vie commune.

L'événement en lui-même a été éclairé par un ensemble de publications récentes qui l'ont replacé dans son contexte tant politique que religieux, un contexte longtemps resté obscur. La principale de ces publications est assurément l'ouvrage collectif publié en 2000 sous la direction de Mathieu Arnoux, Des clercs au service de la réforme, Études et documents sur les chanoines réguliers de la province de Rouen , véritable étude d'ensemble sur le mouvement canonial en Normandie, que nous avons largement mis à contribution. La régularisation du chapitre de Sées en 1131 par son évêque apparaît comme le fruit de l'action conjuguée de la monarchie anglo-normande et de la puissance romaine. Seul leur double soutien permit au promoteur de la réforme de venir à bout des inévitables résistances rencontrées par celle-ci. L'intervention directe du roi Henri Ier Beauclerc a vraisemblablement précédé celle de la papauté. Durant les premières années du XIIe siècle, Robert de Bellême, profitant de la lutte entre Henri et son frère Robert Courteheuse, s'était encore plus mal conduit à l'égard de l'Église de Sées que ses devanciers un siècle plus tôt. Il avait mis la main sur l'évêché et ses possessions et contraint en 1104 l'évêque Serlon à se réfugier auprès du roi d'Angleterre. Les recherches de Gérard Louise sur la seigneurie de Bellême ont montré que dès 1106, après la reprise sur son frère du duché de Normandie, un des principaux objectifs du souverain anglo-normand avait été la réduction des velléités d'autonomie des sires de Bellême. L'action du roi, patiente et progressive, connaît une accélération après la prise du château de Bellême en 1113 et la destruction de cette seigneurie ; elle se traduit en 1124 par l'installation sur le siège épiscopal de Sées de l'archidiacre Jean de Neuville, un fidèle du duc en même temps qu'un clerc gagné aux idées réformatrices. C'est qu'en effet le spectacle du gâchis entretenu par les sires de Bellême avait provoqué l'amalgame sur place des uns et des autres. Nommer un évêque réformateur était une chose, le soutenir dans son action réformatrice et briser les oppositions suscitées par celle-ci en était une autre. Pour décider Henri Beauclerc à faire ce pas supplémentaire, il fallut l'intervention du pape : Honorius II lui fit comprendre que le soutien à la régularisation du chapitre de Sées était le prix à payer pour l'établissement de bonnes relations avec l'autorité romaine. L'installation à Sées d'une communauté de chanoines réguliers était de surcroît en elle-même une action pouvant parfaitement s'insérer dans « l'entreprise plus vaste, menée par le souverain, de restauration d'un ordre public et ecclésiastique régulier sur la frontière méridionale du duché ».

La politique pontificale est claire : il s'agit pour elle de faire enfin pénétrer la réforme grégorienne dans l'ensemble de l'Église et de la société du duché normand, un duché où les archevêques de Rouen ne sont pas parvenus à imposer d'en haut la réforme et où de nombreuses communautés de clercs séculiers, générées par un mouvement canonial spontané et multiforme, se sont révélées sur le terrain les meilleures propagatrices de celle-ci. La réforme du chapitre de Sées a constitué l'un des premiers succès de la réforme grégorienne dans l'État anglo-normand. Elle doit s'interpréter comme « la réinstauration de l'autorité pontificale sur un évêché conquis de haute lutte par le camp réformateur » et, semble t-il, destiné à servir à ce dernier de place forte à l'instar des sièges voisins de Chartres et du Mans. En effet, il existait alors au sein de l'épiscopat de l'Ouest une volonté commune de promouvoir la règle de saint Augustin dans les chapitres cathédraux. Sans parler de la tentative menée à Paris en 1127 ou 1128 par les chanoines de Saint-Victor à la demande de l'évêque Étienne de Senlis ou de celle, tout aussi vaine, faite à une date incertaine par Yves de Chartres (1090-1115) dans son propre diocèse, tentatives qui nous feraient sortir de la province de Rouen, on peut évoquer les inutiles efforts faits à Lisieux dans le même sens et au même moment par l'évêque Jean (1107-1141), oncle de Jean de Neuville. Dans les diocèses voisins, cette volonté se traduisit seulement par des donations en faveur des réguliers : en 1162, le chapitre cathédral de Bayeux céda la jouis­sance perpétuelle d'une de ses prébendes au prieuré augustin du Plessis-Grimoult à la fondation duquel il avait pris un peu plus tôt une part imporante, et à peu près au même moment l'évêque Achard d'Avranches avec l'accord de son chapitre attribua aux Prémontrés de la Lucerne une année du revenu des prébendes capitulaires vacantes. Enfin dans la lointaine Bretagne, l'évêque Jean de Châtillon, un ancien abbé de chanoines réguliers, réussit à soumettre à la discipline augustinienne le chapitre qu'il institua en 1152 à Saint-Malo, après avoir transféré en ce lieu le siège de son évêché.

Désignation des évêques : élection ou nomination, réguliers ou séculiers

L'établissement d'un centre réformateur à Sées, le plus éprouvé des sièges normands entre 990 et 1120, était un projet ambitieux. Il ne tarda pas à se heurter à de sérieux obstacles. En 1144, la succession de Jean de Neuville fut réglée par l'élection capitulaire mais celle-ci tourna au profit de Gérard qui faisait certes partie du chapitre mais à titre d'ancien chanoine séculier. Avant de confirmer son élection, le pape exigea de l'élu qu'il fasse person­nellement profession dans l'ordre de Saint Augustin et prête serment de maintenir de bonne foi cet ordre dans son Église. Par la suite les difficultés s'aggravèrent car, après la crise de la succession d'Henri Ier, les souverains anglo-normands oublièrent les bonnes résolutions un moment prises et revinrent sans tarder à leurs habitudes invétérées de désigner eux-mêmes les évêques. Henri II Plantagenêt imposa deux évêques successifs, Froger (1157-1186) et Lisiard (1188-1201), qui ne sortaient pas des rangs du chapitre, le premier notamment contre la candidature d'Achard, abbé de Saint-Victor ; les papes ratifièrent le choix royal sans plus poser de condition. Néanmoins les réformateurs tinrent bon et préservèrent la régularité du chapitre. En 1203, ils sortirent finalement vainqueurs de l'épreuve de force liée à la succession de Lisiard et imposèrent à Jean-sans-Terre la reconnaissance de Sylvestre, le candidat du chapitre, dont l'élection avait été confirmée par Innocent III en dépit de la violente opposition du roi. Le passage de la Normandie sous le contrôle direct des Capétiens régla peu après le problème de façon définitive.

Une nouvelle menace commence alors à se faire jour, le rapide déclin de l'élan réformateur. En 1220, le pape Honorius III jugea bon de secouer les chanoines sagiens en leur donnant comme évêque l'abbé général des Prémontrés, Gervais, un homme remarquable qu'il avait eu l'occasion de voir à l'œuvre. L'effet fut positif mais seulement pour un temps. Après la disparition du successeur de Gervais, les chanoines portèrent successivement à leur tête trois clercs séculiers de formation juridique, bien incapables de ranimer la flamme de la régularité. Puis réguliers et séculiers alternent, ce qui montre bien que l'élection capitulaire pouvait tourner en faveur de l'une ou l'autre catégorie, observation tout aussi valable pour les nominations. L'élection proprement dite se fait par recours au système des grands électeurs. En 1258 comme en 1278 et 1295, les chanoines désignent quelques-uns d'entre eux auxquels ils remettent l'élection du futur abbé. Les papes respectent le choix du chapitre. C'est notamment le cas en 1295 alors que l'élection de Philippe Le Boulanger, un régulier pourtant, a suscité des oppositions au sein du chapitre, pouvant facilement justifier une intervention romaine. Le principe de l'élection capitulaire réussit ainsi à se maintenir jusqu'au milieu du XIVe siècle, soit un siècle plus longtemps qu'ailleurs.

Le dominicain Guillaume de Rancé, nommé par le pape très vraisemblablement à la demande du souverain, ouvre en 1363 la série des hommes du roi. Passée cette date, la relative indépendance du chapitre en matière électorale ne va plus de soi. Avec la guerre désormais permanente, le choix de l'évêque dans une province menacée est plus que jamais une affaire politique. Face au Grand Schisme, les évêques et le chapitre suivent la politique royale, loyauté qui se retrouve également face aux envahisseurs et occupants anglais. L'évêque de Sées, Jean III (1408-1422), est le seul prélat normand à ne pas fuir sa cité devant l'arrivée des troupes d'Henri V. Son successeur, Robert de Rouvres, est un fidèle de Charles VII auprès de qui il réside. La situation devient très compliquée lorsqu'en 1433 ce même Robert est transféré par le pape à l'évêché de Maguelonne. En 1435, deux personnages se présentent simultanément au concile de Bâle comme évêque de Sées : d'une part Jean Chevalier, lié aux Anglais et élu du chapitre, de l'autre Jean de Pérusse, partisan de Charles VII et nommé par le pape. La mort du premier met fin dès 1438 à ce conflit que le concile n'avait pas été capable de régler. Un schisme plus durable éclate à la fin du siècle lorsque Louis XI prétend en 1480 imposer comme évêque Gilles de Laval, malgré une première résignation en 1478 de l'évêque Robert Cornegrue en faveur d'Étienne Goupillon. Ce dernier proteste hautement tant à Paris qu'à Rome, repoussant toutes les propositions de transfert qui lui sont faites. En 1485, l'évêché est un moment placé sous séquestre. Le conflit perdure finalement pendant treize ans, ne s'arrêtant qu'avec la disparition d'Étienne Goupillon en 1493. Durant la majeure partie de ce temps, Gilles de Laval administre effectivement le diocèse, ce dont il s'acquitte de manière irréprochable. Dans toute cette déplorable affaire, la voix du chapitre ne s'est guère fait entendre, bien qu'il ait été plutôt favorable à Goupillon, au moins au début. Précisons également que les deux compétiteurs étaient l'un et l'autre des séculiers. Le concordat de 1516 confirme définitivement le droit du roi à choisir les évêques de son royaume.

 
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  • 442 pages

 

 

Avec ce dix-septième volume sur le diocèse de Toul, les Fasti Ecclesiæ Gallicanæ opèrent leur deuxième percée dans l’Est de la France d’aujourd’hui après Besançon (volume paru en 1999), sans pour autant tomber en terre totalement étrangère. Ce territoire se répartit en effet entre de nombreuses entités féodales, qu’elles soient principautés (comté puis duché de Bar, duché de Lorraine, comté de Vaudémont), grandes seigneuries, temporels épiscopaux ou abbatiaux, mais où l’influence française était déjà grandissante depuis l’installation du roi dans le comté de Champagne en 1285, qui obtient ensuite la suzeraineté sur une partie du Barrois occidental appelée plus tard « Barrois Mouvant », avant que l’implantation des Angevins en Barrois justement et en Lorraine au xve siècle ne vienne servir les ambitions de la « grant monarchie de France » dans sa poussée hors de ses frontières. En conséquence, le chapitre cathédral de Toul n’est pas si étranger aux terrains déjà fréquentés par certains des volumes précédents de notre collection qui ont traité de diocèses plus ou moins voisins. D’ailleurs, le caractère universel – « mondialisé » dirait-on aujourd’hui – des carrières ecclésiastiques du Moyen Âge ne s’embarrassait guère des frontières politiques d’alors, même si la communauté canoniale touloise montre un recrutement avant tout local, avec seulement une centaine d’individus extérieurs à la Lorraine, pour moitié venus de l’Empire et pour l’autre de France ou de la péninsule italienne. Mais la pauvreté relative des sources locales, soulignée par les auteurs de ce volume, laisse dans un quasi anonymat nombre de chanoines par qui, avec une documentation plus abondante, ces conclusions auraient peut-être dû être nuancées.

Les sept cents membres environ répertoriés dans le chapitre de la cathédrale de Toul viennent abonder la base cumulative des évêques, dignitaires et chanoines – elle compte désormais près de 18 000 individus ! – que les Fasti Ecclesiæ Gallicanæ s’attachent à constituer et à enrichir chaque jour, en dépit des difficultés de l’entreprise. Celle-ci ne manque pas de nourrir depuis ses débuts les remarques attentives des recenseurs, bienveillantes dans le meilleur des cas, auxquelles nous essayons de répondre tant que faire se peut tout en restant attachés aux principes de base qui nous guident dans ce long cheminement. L’introduction d’une table chronologique des chanoines depuis le volume sur le diocèse de Bordeaux est un exemple parmi d’autres de la manière dont nous essayons de satisfaire les attentes de certains lecteurs telles qu’elles s’expriment dans les recensions. L’architecture et l’ampleur prise par les notices des évêques – afin de remédier aux lacunes de l’historiographie jusqu’à la plus récente et aux multiples erreurs véhiculées par les érudits locaux depuis parfois l’Ancien Régime – et le caractère foisonnant des références archivistiques et bibliographiques qui viennent les étayer est un autre exemple de la volonté de l’équipe des Fasti d’amender ses pratiques pour enrichir notre savoir sur le monde des desservants de tout statut des cathédrales de la France dans ses frontières actuelles.

Dès les premiers volumes de la collection parus, des critiques récurrentes ont pu s’exprimer librement pour en optimiser les apports : sources et bibliographie malheureusement données en vrac sans référence précise à tel item, sécheresse des notices (issues d’une base informatisée), cumul des bénéfices livré selon un ordre aléatoire. Une autre critique porte sur le choix de réserver un sort particulier aux bénéfices dits « mineurs » possédés dans le diocèse du chapitre traité par le volume ; ils sont pourtant le moyen d’apprécier l’ancrage local plus ou moins fort d’une carrière ecclésiastique – comme ils le seraient de nos jours pour les femmes et les hommes politiques s’ils étaient plus assidus dans leurs mandats que nos chanoines ne le furent dans leurs stalles…

Sans s’abriter derrière l’alibi facile des contraintes provenant de l’outil informatique, force est de reconnaître que le passage d’informations encodées à leur tirage papier a pour effet malencontreux de redistribuer certaines données et d’introduire par exemple dans le cumul des bénéfices un classement alphabétique des diocèses là où l’auteur les aura entrées selon l’ordre chrono­logique du déroulement d’une carrière. La critique est évidemment recevable, mais il ne faut pas non plus oublier que les dates retrouvées dans les sources ne sont souvent que des attestations à un moment donné dans un bénéfice qui peut être détenu depuis parfois longtemps et que la disparition d’un chanoine de la documentation conservée ne signifie pas forcément la résignation ou la permutation de sa prébende ou son décès. On a critiqué aussi la présence dans la base d’évêques n’ayant pas détenu auparavant de prébende ou de dignité dans le chapitre, mais l’épiscopat n’est-il pas la première dignité d’une église locale ? À ces critiques de méthode vient s’ajouter la mise en avant d’un paradoxe qui consisterait finalement, en apparence, à vouloir faire tenir dans un même livre deux entreprises différentes, en proposant le résultat d’une base de données sur la prosopographie des membres d’un chapitre cathédral assorti d’un ensemble de notices consacrées à la cathédrale en tant que bâtiment et à des sujets d’ailleurs variables d’un volume à l’autre (quartier canonial, bibliothèque et livres, trésor…), en fonction à chaque fois des sources disponibles, des études réalisées et des spécificités propres à chaque contexte local. La prosopographie reste évidemment le centre du projet des Fasti, mais l’idée de départ a toujours été de ne pas livrer une cargaison de notices sèches isolées de tout contexte humain et matériel. Il suffit de rappeler le rôle fondamental de ces hommes d’Église dans l’aménagement monumental des cathédrales qu’ils desservaient, dans la commande décorative qui les embellissait, dans la constitution des trésors et des bibliothèques qui les enrichissaient pour reconnaître que ces notices préliminaires, loin d’être inutiles ou superfétatoires, constituent un véritable supplément d’âme à la connaissance des hommes que la forme informatique réduit trop souvent à des informations brutes en style télégraphique.

La perfection n’ayant jamais été de ce monde, le regard critique est toujours le bienvenu et il ne manque pas d’enrichir une entreprise qui comme toute aventure scientifique a toujours quelque chose d’empirique dans sa démarche même si elle repose sur des présupposés mûrement réfléchis et appliqués avec rigueur par ses membres dans la durée. Le fonctionnement du projet a été ainsi voulu par sa fondatrice Hélène Millet et il est pleinement et totalement assumé par ses « héritiers », tout en laissant toujours une large part de liberté et d’initiative aux auteurs des différents volumes, sans lesquelles la recherche historique serait finalement bien ennuyeuse.

Depuis l’origine de la collection, les notes liminaires ont permis à leurs auteurs successifs de présenter avec plus ou moins de prolixité les évolutions de notre équipe, de souligner les changements intervenus dans les modalités de fabrication des volumes ou d’annoncer les diocèses en voie de progression ou d’achèvement. En l’état actuel, les prochains volumes, dans un ordre alphabétique tout aussi aléatoire que celui des bénéfices détenus par nos chanoines, devraient être ceux de Clermont, Le Mans et Narbonne, sous réserve d’un retard pris par l’un ou d’un surgissement inattendu d’un autre. Les notes liminaires sont aussi l’occasion de faire part d’événements qui témoignent de la vitalité de cette équipe de recherche « informelle » au sens où, bien qu’ayant une affiliation officielle, elle repose essentiellement sur l’investissement de chercheurs, institutionnels ou non, qui ont pour motivation principale de faire progresser son projet au prix de bien des abnégations. L’organisation de journées d’étude pour donner un contenu thématique à nos réunions annuelles et accroître la visibilité de nos travaux rencontre un réel succès. Les actes de la première, au printemps 2016, sur les chapitres cathédraux et la mort, sont en cours de publication dans un numéro spécial de la revue Le Moyen Âge, que nous remercions très sincèrement de son accueil. Après la séance tenue le 24 mars 2017 sur le thème « Évêques, chanoines et institutions charitables en France du XIe au XVe siècle » (avec des communi­cations sur la province de Reims, les chapitres de Paris et Maguelone, la France du Midi et l’Espagne), qui donnera également lieu à publication, la prochaine table ronde au printemps 2018 sera consacrée aux problèmes – tant heuristiques que méthodologiques – posés par les registres de délibérations ou de conclusions des chapitres cathédraux, une catégorie documentaire pourtant fondamentale pour nos recherches mais qui n’est certainement pas envisagée à sa juste valeur par l’historiographie tant les enjeux qu’elle soulève sont complexes.

Les notes liminaires sont encore l’occasion de remercier les Éditions Brepols de la fidélité dont elles font preuve dans leur soutien, assuré maintenant par Madame Loes Diercken ; elle a désormais remplacé avec la même efficacité Christophe Lebbe qui avait accompagné l’aventure des Fasti depuis ses débuts.

 

À Angers, le 31 mai 2017
Jean-Michel Matz

 

 
Toul