Fasti Ecclesiae Gallicanae. volume 23. Diocèse de Troyes

Couverture Volume diocèse de Troyes
Prix

80 €

Author
Mots-clés
Année de publication
2023
Volume
23
Éditeur
Brepols Publishers
Ville
Turnhout
Download citation

Pour commander le volume.

Contenu du volume :

  • pages approx. 450 p., 156 x 234 mm

 

 

La période actuelle est marquée par bien des incertitudes, mais le rythme de nos activités ne faiblit pas et on le doit à l’implication des membres des Fasti Ecclesiae Gallicanae. Le 25 mars 2022, nous avons pu tenir notre journée annuelle, désormais placée au Campus Condorcet (Aubervilliers), dans des conditions normales. Nous avons rendu hommage à notre regretté collègue Charles Vulliez, décédé en 2021. Le thème abordé lors de la journée portait sur « Les chanoines et la violence », sous la direction de Sébastien Fray. Les communications proposées seront publiées. La journée fut aussi l’occasion d’une présentation du programme et de la base Aposcripta par Julien Théry. L’affaire, soutenue par l’IRHT, un partenaire historique des Fasti, concerne les lettres pontificales et envisage leur recension aussi exhaustive que possible, tout particulièrement à partir des fonds locaux. C’est là que l’équipe des Fasti, au fur et à mesure de l’avancée de chaque volume et des dépouillements qui lui sont nécessaires, peut apporter une précieuse collaboration. Il conviendra de cultiver le lien entre les deux équipes. Par ailleurs, la collection sœur des Fasti Ecclesie Portugaliensis commence à se mettre en place, grâce aux bons offices de Loes Diercken pour les Éditions Brepols et de nos collègues des universités d’Evora et de Lisbonne, notamment. Notre propre collection est en bonne voie, avec un programme de parution à long terme : Cambrai prévu pour 2023 (Monique Maillard-Luypaert), Verdun pour 2024 (Michaël George), Beauvais pour 2025 (Sofiane Abdi), Aix- en-Provence (Noël Coulet) qui pourra sans doute s’insérer dans cette triade, puis viendront les tomes d’Aoste (Paolo Buffo), Orléans (Amandine Le Roux et Paul Chaffenet, dans la continuité du travail accompli par Charles Vulliez et en hommage à son œuvre scientifique), Le Puy (Sébastien Fray), qui se profilent entre 2026 et 2028. Quant à la base de données, elle évolue progressivement. Une page de ressources en ligne est désormais accessible à partir de notre site internet, l’essentiel restant réservé aux membres de l’équipe et constituant une plate-forme d’échanges d’informations, de sources, de documents inédits. On doit ces évolutions à Ahmad Fliti. Grâce aux fonds de notre association, une aide aux doctorants a été mise en place cette année 2022 et un appel à candidatures lancé. Espérons qu’elle pourra accompagner les recherches portant sur nos chapitres cathédraux, malgré sa modestie. Enfin, le volume d’hommages à Jean-Michel Matz, auquel participent plusieurs membres des Fasti et qui est dirigé par notre collègue Isabelle Mathieu de l’université d’Angers, est désormais achevé et il sera bientôt présenté à un éditeur. Outre sa propre collection de monographies, les Fasti induisent tout un faisceau de travaux d’édition – on songe à la collection des « Documents nécrologiques » de l’Académie des inscriptions et belles-lettres et à ses obituaires de chapitres cathédraux, par exemple – et de publications diverses, de manifestations scientifiques de toute échelle, de collaborations internationales. Dans l’année 2023, les nouveaux locaux du CERCOR pourront accueillir une bibliothèque des Fasti que nous espérons voir dotée d’un catalogage et de réper- toires de ressources efficaces. Elle aura été accrue du don de la bibliothèque de Charles Vulliez grâce à l’amabilité de ses héritiers et aux bons soins de Michel Sot. Enfin, l’organisation à Saint-Étienne du congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public, en mai 2024, sera aussi l’occasion de mettre en valeur l’activité des Fasti. Plus que jamais, notre équipe se prolonge en école, même si la question de l’avenir reste en suspens, tant les études médiévales en général souffrent du contexte de contraction des dépenses et de disparition des emplois publics et peinent à attirer des doctorants et de jeunes chercheurs.

Ce volume consacré au diocèse de Troyes est le fait de Sandrine Legendre, également spécialiste du chapitre cathédral de Besançon au XVe siècle. En dépit de ses activités professionnelles très prenantes et de ses lourdes charges d’enseignement, cette docteure en histoire du Moyen Âge a su mener à son terme son travail et l’on ne peut que joindre notre admiration à nos remerciements. Il s’agit du troisième tome concernant la province ecclésiastique de Sens, déjà éclairée par deux parutions, que l’on doit à Vincent Tabbagh, pour le diocèse métropolitain et celui d’Auxerre. Le présent ouvrage propose les notices de dix-neuf évêques de Troyes et « de plus de sept cent cinquante auxiliaires, dignitaires et chanoines du chapitre cathédral », ainsi qu’une étude du quartier de la cathédrale, autour des grand et petit cloîtres. La cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul, dont la reconstruction s’échelonne du XIIIe siècle à la fin du XVIe siècle, la maison épiscopale et les bâtiments annexes sont l’objet de développements de synthèse recourant également à des fonds inédits. L’auteure fournit aussi une notice sur la bibliothèque capitulaire. En outre, ce tome dresse un catalogue détaillé d’une trentaine de sceaux du chapitre Saint-Pierre et de l’officialité, grâce à la contribution d’Arnaud Baudin. Il s’agit d’un premier corpus établi à partir d’inventaires disponibles, qui offrira un indispensable outil aux recherches à venir. Quand les sources l’autorisent, on ne peut qu’encourager ce type de chapitre pour les ouvrages à paraître dans notre collection.

L’important diocèse de Troyes, placé au cœur d’une région riche de ses échanges économiques, de sa proximité avec le domaine capétien, a généré un milieu clérical original. Son chapitre cathédral est un puissant propriétaire urbain. Urbain IV est issu de la cité champenoise. Ses évêques, au début de la période issus de la noblesse champenoise tel Garnier de Traînel, gravitent dans l’entourage comtal puis dans celui du roi, particulièrement à compter de Jean de Nanteuil et du bénédictin Guichard, proche de la reine Jeanne de Navarre. On dénombre des gradués, en théologie comme Hervé, en droit avec Jean d’Auxois. Plusieurs d’entre eux sont de proches collaborateurs de la monarchie et mènent de riches carrières bénéficiales. Les grands commis de l’État royal sont fréquents à partir du XIVe siècle : Guillaume Méchin est conseiller, tout en ayant ses entrées à la curie de Jean XXII, Jean d’Aubigny œuvre à la Chambre des comptes, Pierre d’Arcis au Parlement, Étienne de Givry semble un proche de Guillaume de Dormans. Le prêcheur Pierre de Villiers exerce comme confesseur de Charles V. On ne s’étonne pas non plus de voir passer sur le siège de Troyes, ville si active dans les échanges, un fils de changeur tel Jean Braque, voire de surprendre Guichard tremper dans des affaires de malversations financières aux contours également politiques. Les prélats se préoccupent des établissements réguliers de leur diocèse, notamment ceux des moniales, ainsi que des hôpitaux, dans une région où les réseaux monastiques sont fort denses. Ils sont attentifs au culte des reliques, en acquièrent de prestigieuses, tout en bataillant au sujet de celle du suaire face à la collégiale Notre-Dame de Lirey au milieu du xive siècle. Mais les évêques de Troyes sont aussi accaparés par de récurrentes difficultés qui grèvent les ressources de l’Église locale et leur cassette personnelle. Le chantier de reconstruction de la cathédrale et son financement les occupent durant toute la période. Henri de Poitiers, tout comme Louis Raguier, pâtissent de l’exposition de leur diocèse aux conflits de la guerre de Cent Ans, ils s’investissent eux-mêmes dans la mise en défense et les opérations militaires.

Le clergé cathédral de Troyes présente un faciès spécifique, qui le rapproche évidemment des sièges voisins du domaine royal, comme Sens ou Auxerre. Mais la situation du diocèse, auprès des zones de divers conflits au XVe siècle, place ses prélats et ses dignitaires dans une situation politique délicate, non exempte de louvoiements et de subtils équilibres. Des familles s’enracinent tardivement sur le siège épiscopal, tels les Raguier, où colonisent le chapitre. D’autres ont une envergure plus large dans l’Église, comme les Méchin. Troyes constitue un important pivot pour la connaissance du clergé des cathédrales et de la diversité de ses investissements, au cœur et à la proche périphérie du domaine royal.

 

À Rognac, le 9 juillet 2022                                                                                                       Thierry Pécout

 
Troyes